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Qatar, de l’eau dans le gaz ?

 

Par Yves ROUCAUTE

(publié Valeurs Actuelles. 12 juin).

Sanctionné pour sa duplicité envers terrorisme, Frères musulmans et Iran, le Qatar est mis en quarantaine. Arabie Saoudite et Washington sonnent la fin de la récré.

Si la duplicité des grands Etats importe peu, celle des moins puissants est rarement sans risques. Le Qatar l’apprend à ses dépens. Complicité avec le terrorisme, les Frères musulmans, l’Iran et déstabilisation des gouvernements : l’accusation est lourde. Confetti de 160 km de long sur 80 de large, en comptant plages et déserts de sable, le voilà mis au ban des nations par Arabie Saoudite, Bahreïn, Emirats Unis, Libye, Egypte, Yémen et Maldives. Les trois premiers ont interdit à leurs ressortissants de s’y rendre, expulsé leurs Qataris, consacré le blocus terrestre et alimentaire. Tous ont rompu relations diplomatiques, liaisons aériennes et maritimes. Seuls des pèlerins qataris pourront passer la frontière pour aller à La Mecque mais impossible d’y écouter l’islamiste Oussouf al-Qardawi vanter la charia: la chaîne Al Jazeera est suspendue.
Cette presqu’île du Golf persique, 2 millions d’habitants, dont 200 000 Quataris, sera-t-elle rayée de la carte ? A l’heure où Washington reconstruit l’alliance de l’ « arc sunnite » avec Israël, contre les Frères musulmans, les djihadismes et l’Iran, l’Europe joue à l’autruche. Effets des ors et lambris qataris?
Le prétexte ? L’émir du Qatar, contre la décision des autres membres du Conseil de coopération du Golfe (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Oman), aurait déclaré l’Iran, un allié. Depuis, notre Émir proteste : son Agence de presse aurait été piratée. Peut-être. Une goute d’eau dans le gaz liquéfié dont le Qatar est le premier exportateur mondial.
Chacun est fatigué d’une trop longue duplicité. Principal soutien des Frères musulmans? Le Qatar. Cheval de Troie pour imposer sa puissance dans tous les pays musulmans. Ainsi, en Egypte, il a financé l’élection du frère musulman Mohamed Morsi. Le coup d’Etat du général al-Sissi y met-il fin ? Depuis, Doha fomente des troubles.
Certes, l’Arabie Saoudite partage cette vision puritaine et archaïque, jusqu’au refus des droits individuels, mais elle refuse la suprématie du religieux sur le politique et rejette le djihadisme. Depuis le 11 septembre, poussée par les Etats-Unis, elle les a même bouté hors de son Etat. Et en 2014, avec Bahreïn et Emirats, rappelant leurs ambassadeur, elle a exigé la rupture avec ces « Frères », déclarés « organisation terroriste ». Doha a feint de céder : quelques expulsions mais le financement a continué. Le double jeu.
Attentats-suicides contre des juifs, roquettes sur les villages, l’organisation terroriste du Hamas créé par les « Frères » frappe dans la bande de Gaza. Et l’émir du Qatar va la saluer, en 2012, et installe le centre terroriste à Doha. Coalition au Yemen contre les djihadistes Houthis ?Bombardés par ses avions, financés par ses banquiers. Détournement des armements pour les islamistes en Libye, soutien à Ahrar al-Sham en Syrie, qui se bat aux côtés d’al-Qaïda et aide les djihadistes à rejoindre Daesch à Raqqa. Et cheikh Nouaimy, financier qatari, finance sans être inquiété filiales d’al-Qaïda en Irak, Syrie, Somalie, Yémen.
Les alliances avec l’Iran ? L’ayatollah Ali Khamenei ne fut-il pas le traducteur en persan d’ouvrages de Sayid Qutb, intellectuel des Frères musulmans ? L’Iran n’a-t-il pas applaudi l’élection en Egypte de Morsi ? Le Qatar soutient les sabotages dans la région chiite de Qatif, en Arabie Saoudite, manipule contre Ryad la tribu Al-Murrah pro-qatarie, déstabilise Barhein par la communauté chiite. Du grand art cynique. Hélas, pour le Qatar, l’Arabie Saoudite, avec l’appui de Washington, vient de sonner la fin de la récréation.

Les colombes blanches de l’Egypte copte

 

par Yves Roucaute

Paru Valeurs actuelles. Juin 2017

Ce 26 mai 2017, sur le chemin du monastère de Saint-Samuel-le-confesseur, les chrétiens égyptiens venus de Beni Suef et d’al-Minya ne songeaient ni à la mort, ni à l’horreur qui les attendaient. Membres de cette église copte de neuf millions de disciples, fondée en 42 après J.-C. par l’évangéliste Marc, ils étaient seulement impatients de communier dans la paix du christ avec celui qui devenu moine, « part au désert lointain, brûle d’un amour saint » (Cantique à Saint Samuel). Les dira-t-on fous d’afficher ainsi leur foi quand 45 chrétiens égyptiens sont assassinés en avril, 27 en décembre, quand la terreur quotidienne islamiste menace malgré la victoire du général al-Sissi contre les Frères musulmans ? Ce pays n’est-il pas « terre des martyrs » ? Et leur « calendrier des Martyrs » ne rappelle-t-il pas le goût égyptien du sacrifice chrétien depuis l’empereur romain Dioclétien, en 303?
Sortis de trois pick-up, déguisés en militaires, les terroristes liés à Daech arrêtent leur convoi. Ils « leur ont demandé de renier leur foi chrétienne, un à un, mais tous ont refusé. Alors les hommes armés les ont froidement abattus en leur tirant dans la tête » (Père Rashed). 29 assassinés: enfants et humains au cœur d’enfant. Aveu d’échec : les terroristes pensaient lire la peur dans le regard de leurs victimes. Ils y ont vu le reflet méprisant de cette lâche abjection qui tue des humains désarmés. Ils voulaient affirmer avec morgue la force de leur « djihad » face à des « infidèles » : ils ont lu dans les pupilles de leurs victimes la vraie foi, indomptable, celle qui croit le dieu-amour plus fort que la haine, l’espérance de la miséricorde plus grande que la cruauté, la vie plus forte que la mort. Et en tuant, ils ont révélé leur néant qui ne reflète rien, l’absence totale de compassion, ilot de haine entouré de haine, le Mal radical qui les habite.
Ami lecteur : ces martyrs savaient. C’est pourquoi ils ne cédèrent pas. Ils menaient la plus grande des batailles: spirituelle. Assassinés non loin de Maadi, où Jésus et Marie ont séjourné, les martyrs sont devenus comme les sept colombes blanches, rayons de lumière sur les dômes qui rappellent que ce Dieu diversement nommé, est toujours le même pourtant quand il dit l’amour de l’humanité. De l’ONU à la mosquée al-Azhar, les consciences entendent mieux à présent le doux murmure de cette source merveilleuse qui donne la vue à ceux qui ne voient plus et la vertu qui manque pour armer la morale.

Karim Benzema et la clef Deschamps

Karim Benzema en équipe de France ?

 

Par Yves ROUCAUTE

 
Paru Valeurs Actuelles. 1 juillet.
 
Karim Benzema en équipe de France ? Certes, cela se peut. Mais cela se doit-il ? Telle est la question. Réduire cette affaire, symptôme de bien d’autres, à un « sujet sportif » (Benoît Hamon) ? Voilà oubliés sens du sport de compétition et signification de cette « équipe de France ». Plus qu’un jeu et une localisation géographique : une présence spirituelle.
Dés les premiers jeux sportifs en Grèce, au VIIIème siècle avant J.-C., toute compétition sportive est une guerre pacifiée. Les Cités fabriquent des athlètes à leur image pour s’identifier à eux et à leur gloire. Avec le professionnalisme, au IVème siècle, naissent les entraineurs : s’ils recherchent la performance, ils n’oublient pas la priorité : incarner l’esprit de la Cité.
Et ils exigent une parfaite éthique. Les Léonidas de Rhodes ou autres Glaucos de Karistos, célébrés par toute la Grèce, sont des hommes d’honneur qui ont prêté serment de moralité devant Zeus. Et chacun attribue les victoires innombrables de Sparte à la vertu de ses sportifs. Condamnés et suspects ? Interdits de jeux. Imaginer des « représentants » se mettre en grève ou insulter un entraineur? Les sportifs grecs auraient préféré mourir à cette honte pour leur nation. Un simple retard conduisit à la proscription olympique d’Apollonios d’Alexandrie et la tricherie du seul Callipos exclut la cité d’Athènes de la 112ème olympiade.
Avec les sports collectifs, au XIXème siècle, la logique de représentation est poussée au paroxysme. La professionnalisation du football, en 1885, est exigée par les clubs du nord de l’Angleterre, industrielle et populaire, contre la Fédération anglaise. des entraineurs sont appelés pour construire une « équipe » : ensemble unifié, cohérent, au dessus des intérêts particuliers, pour apporter la gloire dans une guerre sociale pacifiée. Avec les compétitions internationales, l’esprit d’équipe est transposé au niveau national.
Mis en examen, Karim Benzema exige de Didier Deschamps, vecteur de l’esprit de la nation française, qu’il se déplace et lui « dise dans les yeux » les raisons d’une exclusion évidente. Il l’accuse d’accepter « la pression d’une partie raciste de la France », aiguisant la haine, dévoilant le racisme latent qui attribue à la race blanche tout différend. Adieu donc. Dépasser origines ethniques et différences sociales dans une unité supérieure qui représente notre belle nation civique française, donner du rêve et la mener à la gloire : c’est cela l’équipe de France.

Trumpête dans un verre d’eau

Donald Trump, le divertissement

Par Yves Roucaute

Paru Valeurs Actuelles 30 mai. 2017

« Les grandes haines ne se prêtent guère à des réconciliations » disait avec sagesse Esope. Bobos, multiculturalistes et péronnelles du politiquement correct détestent plus encore le provocateur Donald Trump depuis son élection. Ce sot, ce maraud, ce coquin, qui a osé volé l’élection d’Hilary Clinton avec l’appui de Moscou serait devenu un traître. Pour cacher sa félonie, il aurait licencié le directeur du F.B.I. et donné à l’ennemi russe des informations confidentielles qui menacent sécurité des Etats-Unis, des alliés, du monde peut-être.
Cette campagne de Russie en suit bien d‘autres, tout aussi pathétiques. Dix mille manifestants hurlant « Pas mon Président ! », à New York, début mai dans un pays de 324 millions d’habitants? Le peuple en marche contre Trump. Quelques nominations refusées par le Sénat? Le parti Républicain contre Trump! Recul momentané pour l’abrogation de la réforme santé de Barack Obama ? « Humiliation », échec cuisant », « débâcle »…. Tant pis si elle est finalement adoptée.
Après l’éviction de James Comey, directeur du FBI, Donald Trump aurait voulu interdire l’enquête sur ses relations douteuses avec Moscou durant la campagne électorale. Qu’importe si James Comey a nié l’implication du Président dans l’espionnage possible d’Hilary Clinton ? Leur preuve ? Depuis le célèbre, et incontrôlable, Edgar Hoover, resté de 1935 à 1972, les directeurs du FBI sont nommés pour dix ans. Or, tous les ont accomplis, sauf Comey. Donc Donald Trump est coupable.
Diantre. Passez moi la calculette : depuis 1972, en 45 ans, 14 directeurs. Un seul a tenu dix ans : Robert Mueller. Patrick Gray ? environ un an. Clarence Calley ? Cinq. Louis Freeh ? Sept, obligé de démissionner en 2001. William Sessions ? Cinq, licencié en 1993, par Bill Clinton, oui, le fameux mari d’Hilary-à-la-mémoire-défaillante. Viré par convenance politique : il a continué une brillante carrière juridique, en particulier auprès de Ronald Reagan.
Donald Trump aurait remis des « informations classifiées » à l’ « ennemi ». Face à au terrorisme, Donald Trump, chef d’Etat, n’a-t-il pas placé la Russie dans le camp des alliés ? Et n’est-ce pas, depuis Périclès, au chef des armées de décider de la stratégie, donc de ce qui est classifié ? Le droit américain confirme. Cette campagne de Russie va tourner à la Berezina. Et j’attends avec gourmandise la prochaine provocation de Donald Trump qui semble avoir compris cette forte pensée de Sun Tzu : « Si ton ennemi te semble colérique, cherche à l’irriter encore davantage. »

Le charme discret de Teresa

Qu’est-ce que l’Angleterre ?

 

par Yves Roucaute

 
Paru Valeurs actuelles. 15 mai 2017
 
« Qu’est-ce que l’Angleterre ? Une colonie française qui a mal tourné » disait Clémenceau. Hélas !, la perfide Albion n’en finit plus de se moquer de son colonisateur d’antan et de donner à la droite française des leçons de maintien. Dernier coup de Jarnac : le raz de marée conservateur aux élections locales du 4 mai. N’était-il pas moribond, éclaté entre pro et anti-Brexit, menacé par l’indépendance de l’Ecosse? Gain de 500 sièges, socialistes écrasés, nationalistes réduits à 1 siège. Et il emportera les législatives du 8 juin. Gagner des élections ingagnables ? De quoi donner des maux de tête aux Républicains français qui ont perdu une élection imperdable.
« Mieux vaut une tête bien faite, qu’une tête bien pleine » (Montaigne) leur rappelle, à sa façon, la subtile Teresa May. Héler l’électeur d’un tonitruant « Demandez mon programme ! » qui exige mille mesures et le sacrifice des électeurs au nom de l’intérêt supérieur de la nation? Catalogue de la Redoute, catalogue de la déroute : rien n’est distinct quand tout est indistinct, et plus facile de trouver des raisons de mécontentement. Se réjouir d’une TVA augmentée ou de travailler 39h payées 35 pour les fonctionnaires ? Si l’idée de nation votait, cela se saurait. ,
Notre Teresa a préféré séduire sa nation réelle, les individus qui la composent. Une vision, celle de puissance dans l’unité retrouvée après le Brexit. Et une poignée de mesures seulement, clivantes mais non impopulaires, face à un ennemi identifié. Il faut « un leader fort et stable », patriote, face à l’Union européenne « qui s’unit contre nous », aux séparatistes écossais, « qui affaiblissent les Ecossais eux-mêmes », au leader travailliste Jeremy Corbyn, et à l’extrême-droite, chantres du « chaos » économique et de la dislocation du Royaume. Pour le reste ? Du flou afin d’éviter la fuite du chaland. Jusqu’à refuser tout débat avec Jeremy Corbyn, marri de n’avoir pas son show pour une confrontation détaillée programme contre programme.
À la façon de Thatcher naguère, de Trump dans la région des Grands lacs, Teresa May est allée porter le fer chez ses adversaires. Du porte à porte en Ecosse, dans l’Aberdeenshire, fief des indépendantistes, là où plus de 60% avaient voté contre le Brexit. Des réunions au pied des usines, pour séduire classes populaires socialistes et nationalistes du Pays de Galles et d’Angleterre. Et partout, patriotisme, puissance et croissance pour les classes moyennes. De la grande stratégie politique qui dit l’espérance. Ce charme de Teresa May qui manque à la droite aujourd’hui.

A la mémoire de Claude Tresmontant

Il y a vingt ans….

Par

Yves Roucaute

Paru Valeurs Actuelles.10 mai 2017

Il y a vingt ans disparaissait Claude Tresmontant (1925-1997), monstre de savoir encyclopédique, antidote du politiquement correct. En ces temps troubles d’après tourmentes présidentielles, où des âmes se perdent dans l’accidentel, le colloque qui lui est consacré par l’Ecole Normale supérieure de la rue d’Ulm, le 15 et 16 avril, et l’ouvrage du franciscain Yves Tourenne, Claude Tresmontant et l’ontologie de la métamorphose, permettent de retrouver les hauteurs.
Dans ce milieu des années 70, entre préparation de l’agrégation de philosophie et dissertations sur la révolution dans les cafés, rien ne nous prédisposait à aller écouter un certain Claude Tresmontant à la Sorbonne. Il y enseignait pensée médiévale, théorie des sciences et une philosophie chrétienne qui n’était guère dans l’esprit du temps. Il n’avait pas encore écrit Le Christ Hébreu (1983), qui se vendit comme du bon pain, ni reçu le Grand prix de l’Académie des sciences morales et politiques(1987). Et il n’était pas très « fun » avec son gros sac de plombier en cuir, posé en évidence sur la table, qui contenait invariablement la Bible en hébreu, sa traduction grecque (Septante), l’Ancien et Nouveau Testament en latin, au lieu de Hegel, Marx et quelques postmodernes. Bref, pour paraphraser Molière, qu’allions nous faire dans cette galère ?
Ce qui charmait d’abord, c’est son honnêteté intellectuelle. Parfois un brin trop vindicatif ? Certes, mais quelle fraîcheur ! Travailleur infatigable, il passait tout au scalpel, de Dun Scot à Bergson. Dés sa thèse de 1961, il avait démontré la filiation entre pensée chrétienne et philosophie grecque. Il reprit les Evangiles, leur datation, leur signification, les réécrivit du grec à l’hébreu dont ils sont issus, rappela les filiations entre christianisme et judaïsme. Le grand rabbin Jacob Kaplan a pu dire « Ce juste parmi les nations est l’homme au monde qui sait l’hébreu. Nous, nous savons de l’hébreu, lui il sait l’hébreu. »
Et pour nous, d’un seul coup, la philosophie chrétienne devenait vivante. À la façon de Thomas d’Aquin, nous retrouvions par les sciences de l’infiniment grand et de l’infiniment petit, le chemin de Dieu. Tel Pierre Theilard de Chardin, géologue, paléontologue, passionné de thermodynamique et physique quantique , dont Tresmontant fut l’exécuteur testamentaire, contre les modernes, nous pouvions enfin relier morale, science, métaphysique et vie de la Cité. Et, nous retrouvions la plus belle œuvre divine, l’homme lui-même.
• Yves Tourenne, Claude Tresmontant et l’ontologie de la métamorphose, Editions Franciscaines, 2016

Elections, piège à c…?

Coup de grisou dans les partis

(publié Valeurs Actuelles. Avril 2017).

« Tout parti vit de sa mystique et meurt de sa politique », disait le perspicace Charles Péguy. Précisément. Quel avenir pour le Parti socialiste ? Aucun. Pour Les Républicains ? Incertain. Election de Donald Trump, popularité de Theresa May, victoire d’Angela Merkel, désordre italien, fragilité espagnole, tremblement de terre autrichien… les démocraties  signalent la débâcle des partis incapables de régénérer leur pratique, et célèbrent les stratèges qui façonnent l’espérance. A leur façon, naviguant entre économie numérique, réseaux sociaux, empathie sociale, inventant une organisation centralisée ouverte sur le maillage social, Emmanuel Macron a ringardisé l’offre des partis traditionnels.

Victime la plus spectaculaire: le Parti socialiste. Une mystique sclérosée qui conjugue encore haine de classe, solidarité de pacotille, redistribution étatique, refus du nouveau monde. Une politique dirigée depuis un petit groupe  d’apparatchiks fermés à la société civile, attachés à sa propre survie et à ses prébendes, et qui, une fois au gouvernement, troque le temps des cerises, promis aux gogos, pour une gestion conservatrice, incapable d’arrêter chômage, concurrence déloyale internationale et menaces islamistes. Résultat : 6,2 % de voix pour Benoît Hamon. Et le P.S., abandonné par les réformistes, en est réduit à monnayer l’appui d’un Jean-Luc Mélenchon et de son quarteron de groupuscules gauchistes.

Victime aussi : Les Républicains. Ce n’est pas le parti qui a perdu mais François Fillon, dit-on. Hélas !, l’échec n’est pas un accident. Structure molle incapable de choisir son stratège, simulacre de démocratie par une primaire absurde où des socialistes même ont voté, maintien d’une candidature vouée à l’échec: où était la politique ? Le plus beau programme ne dit pas qui doit le porter. Depuis clubs et sociétés populaires de la révolution française, machines politiques américaines de 1830 ou partis britanniques de 1860, l’ambition est de s’appuyer sur un maillage social maximal autour d’un dirigeant porté par une vision du monde. Derrière les grands de ce monde, depuis Périclès, je vois des pensées structurées et des styles pour convaincre et séduire. Un Winston Churchill ne s’excusait pas, pour même pour quelques moments d’ivresse. Et nul n’imagine un Pompidou céder aux injonctions d’inquisiteurs désignés par ses ennemis.

Demain sera-t-il un autre jour? Espérons le. Sinon, sans réforme de l’organisation et sans vrai stratège, la France de droite et du centre sera à nouveau orpheline.

 

 

Populisme: la ruine des nations

Le populisme mène à la ruine les peuples bernés

 

par Yves Roucaute

(publié Valeurs Actuelles. 20 avril 2017)

 

Populisme ? Trop souvent une invective adressée à ceux qui ont le souci des classes populaires. Sinon, au sens propre : l’assurance du malheur pour la nation gangrénée. Ainsi, le peuple de l’antique Rome, naguère « impérieux », est devenu « stupide, enseveli dans un repos fangeux, qui ne demande plus que du pain et des jeux » notait jadis le poète Juvénal.

Prolifération des chefs populistes ? Donc affaiblissement de la Cité. La première démocratie, Athènes, le montrait déjà. Périclès ? Démagogue, il obtient le bannissement de ses opposants, Cimon puis Thucydide, et ruine la Cité par un pré-socialisme d’Etat, via grands travaux, rémunérations judiciaires, redistributions d’argent et de biens qui lui assurent quinze réélections. Alcibiade ? Il séduit commerçants, agriculteurs et marins du Pirée à coups de flatteries, de promesses d’enrichissement facile et de détestation des riches avant d’engager une guerre désastreuse en Sicile. Le populisme au pouvoir a convaincu un peuple ignorant de se transformer en empire et de piller ses alliés de la ligue de Délos. Sanction : Athènes fut battue par la cité libre de Sparte gouvernée selon l’intérêt général, et perdit définitivement sa puissance.

Sombrant dans le populisme, Rome annonce la fin de la République et sa perte. Des jeux, du pain : le populiste Marius, Consul en 107, sept fois élu, transforme un peuple libre en une communauté assistée par l’Etat. César poursuit la transformation : subventions, travaux, distributions de terres et de biens, pots de vin, clientélisme. Ruine la république mais le peuple perverti applaudit guerres, arrestation de Caton, entrée dans Rome des légions, sa dictature à vie, ses jeux où les gladiateurs s’entre-tuent tandis que les animaux dévorent les prisonniers. Le pli est pris, l’assassinat de César ne change rien : la République est morte. Après lui, surenchère sociale, clientélismes, guerres. Dans les cirques, dans les rues, le parti populiste, celui des Verts, de Caligula et Néron, attise la haine sociale et déclenche la chasse, à mort parfois, des Bleus, nostalgiques de la république.

Voix du peuple, voix de Dieu ? Il y a plus de sagesse dans les réseaux allemands catholiques de la “Rose blanche” ou protestants de Dietrich Bonhoeffer que chez ceux qui suivirent Hitler sous prétexte d’un vote majoritaire allemand. Une majorité ne dit pas la moralité, et un vote humain ne peut abolir un droit naturel universel. Et, le populisme mène toujours à la ruine les peuples bernés.

 

La leçon de Donald Trump

par Yves ROUCAUTE

(publié Valeurs Actuelles. 14 Av

Sous titre.

Après les frappes en Syrie, « America First » reste le projet des Etats-Unis. Ni isolationnisme, ni interventionnisme : un patriotisme ouvert, derrière un exécutif fort. Chemin de toutes les nations qui veulent rester puissantes.

 

 

Il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Attribuer à « l’émotion », « l’inexpérience», voire à « l’influence » de son gendre, la décision de Donald Trump, ce 6 avril, de frapper les troupes du Président syrien Bachar al-Assad ? Tel est bien le drame de cette France d’en haut qui ne saisit pas la nécessité d’un exécutif fort pour jouer dans la Cour des grandes puissances. Imaginer « revirement »,« volte-face », « changement de politique » après la frappe qui a pulvérisé la base aérienne de Shayrat, responsable de l’attaque chimique du 4 avril sur Khan Sheikhoun ? Suivre les « experts » abonnés à la caricature anti-Trump des médias new yorkais qui fantasment sur un Président républicain qui « se dédit », « trahit ses électeurs », abandonne son projet d’« America First » ? Voilà qui interdit de penser la continuité dans le changement et de discerner à partir de ce projet fondateur du retour d’une Amérique forte qui associe recherche de la puissance et défense d’un mode de vie, le défi que doit relever à la France.

Car « America first » a été, et reste, le point de vue fondateur de Donald Trump. « Neutralisme », « isolationnisme », « pacifisme » ? Tous ces « isme » dénotaient un formidable quiproquo. Et annonçaient la déconvenue de ceux qui croyaient trouver dans son élection, la justification de leur inepte détestation ou de leur fantasque engouement.

« America First » est à l’origine la vision du monde de George Washington (1789-1797). Certes, « il faut cultiver notre jardin » (Voltaire) est bien son profond désir, entre ses pêcheries et son entreprise agricole de Mount Vernon, en Virginie. Et contre Thomas Jefferson, pro français, et Alexander Hamilton, pro-anglais, par le premier décret de l’histoire américaine (1793), il impose bien la neutralité dans la guerre entre France et Royaume-Uni. Isolationnisme ? Non, froid calcul d’intérêts seulement : ni Londres, ni Paris n’accroissent la puissance américaine. Dans son célèbre discours d’adieu de 1796, cet ex-admirateur de la révolution française, qui l’a consacré citoyen, met en garde ses concitoyens contre la fourberie de ceux qui cherchent à les entrainer dans des conflits qui ne les concernent pas, telles ces guerres napoléoniennes engagées au nom de la liberté. Mais quand l’intérêt des Etats-Unis est en jeu, George Washington n’hésite pas. Il prend les armes durant la guerre de 1754-1763 contre Français et Canadiens pour conquérir la vallée de l’Ohio. Commandant en chef de l’armée continentale, il vainc les Britanniques et les boute hors des Etats-Unis. Président, il met en place la future doctrine Monroe : interdiction pour tout Etat d’intervenir dans les Amériques, placée sous tutelle des Etats-Unis, sinon la guerre.

Jamais ce courant patriotique ne disparaitra. Parfois appelé « jacksonien », en souvenir du Président Andrew Jackson, isolationniste un jour, interventionniste demain, apôtre de la puissance toujours. On lui doit la plus grande victoire terrestre américaine, en 1815, à la nouvelle Orléans, contre les britanniques qui tentent de reconquérir la Louisiane. La conquête de l’Ouest contre les indiens. L’indépendance du Texas contre le Mexique. Protectionniste souvent, libre échangiste parfois, il gouverne selon les intérêts américains.

Le Comité « America First », créé en septembre 1940, au moment où le Japon signe un accord avec l’Allemagne nazie, s’en revendique ouvertement. Ses 800 000 membres refusent d’intervenir dans la seconde guerre mondiale. À l’exception de quelques militants antisémites, tel Charles Lindbergh, ces neutralistes croient deviner derrière les appels de Churchill à combattre fascisme, nazisme et militarisme nippon, une volonté impérialiste britannique. Mais le 7 décembre 1941, ils découvrent, horrifiés, le massacre des Américains et la destruction de leur flotte par les Japonais, à Pearl Harbor. « Nous avons réveillé un monstre » déclare l’amiral japonais Isoroku Yamamoto qui savait la force du patriotisme américain. Au nom d’American first, les militants s’engagent dans l’armée, à la façon de leur Président, Robert Douglas Stuart, Lieutenant colonel, qui sera nommé un jour ambassadeur de Norvège par son ami Ronald Reagan. Ou de Gerald Ford, engagé dans la Navy du Pacifique, devenu capitaine de corvette, qui sera le 40ème Président des Etats-Unis. Et l’Amérique sortira plus forte du conflit.

« Mon attitude face à la Syrie et Assad a beaucoup changé » dit Donald Trump, non son objectif, « America First ». Un changement dans la continuité influencé par le principe de réalité.

Le 4 avril 2017, la station de renseignement britannique basée à Chypre, dans les montagnes Troödos, chargée d’espionner les communications au Moyen Orient, intercepte une heure de discussions entre responsables syriens qui révèle l’utilisation de gaz innervant dans une attaque contre Khan Sheikhoun. Attaque confirmée par l’Agence de renseignement américaine qui surveille l’espace, la National Geospatial-Intelligence Agency. Sur place, une centaine de morts au gaz sarin, dont 27 enfants. Une violation de l’accord de 2013 entre Etats-Unis et Russie, entériné par Bachar al-Assad qui interdit « de développer, produire, détenir ou utiliser des armes chimiques ». Accord obtenu par un régime qui avait refusé La Convention sur l’Interdiction des armes chimiques de 1977.

Que faire ? Barack Obama, le 20 août 2012, avait menacé de frappes le régime syrien s’il utilisait des armes chimiques, une « ligne rouge » à ne pas dépasser. Il se contenta de rodomontades, le 21 aout 2013, quand furent gazées 1423 personnes dont 426 enfants. Reproduire ce comportement d’une Amérique faible, incapable d’imposer le respect des accords qui la lient ? Quelle crédibilité envers les alliés, d ’Israël au Koweït, du Pakistan à la Corée du sud? Quelle crainte pour les ennemis ? Que penserait la Jordanie, dont le roi venait de saluer « le courage » de Donald Trump ? L’Egypte du général Sissi, vilipendée naguère par Barack Obama, « profondément inquiet » de la victoire contre les Frères musulman, saluée par Donald Trump « pour son travail fantastique » ?

Donald Trump simule une action devant l’O.N.U. : il sait la Russie incapable de lâcher son allié syrien, déterminée à mettre son veto. Puis, devant l’échec programmé à l’O.N.U., il réunit son Conseil de Sécurité Nationale et décide de frapper, prévenant les Russes pour qu’ils retirent leurs avions.

L’Amérique est de retour. L’ «émotion » n’y est pour rien. Les départs de Stephen K. Bannon et de Michael Flynn ont été les signes annonciateurs de la cohérence recherchée par Donald Trump pour réaliser son projet « America First ». Comment assurer la puissance quand le nationaliste Stephen Bannon attaque le monde musulman dans son ensemble, origine de l’interdiction ratée de recevoir sur le territoire les citoyens de six pays musulmans ? Quand est programmé le « renversement » des alliances entre sunnites, Israël et Washington, déjà mises à mal par Barack Obama et ses relations avec l’Iran? Quand l’organe de décision militaire, le Conseil de Sécurité Nationale Américain, est transformé, en chambre de conseils, qui rend impossible les opération? America First ne peut se conjuguer avec Amérique faible.

La prétendue influence du gendre, Jared Kushner, ami d’Israël, mise en avant par tous ceux qui réduisent l’univers de Trump à leurs fantasmes de népotisme ? Son rôle est surtout de dégraisser l’administration centrale de Washington en impulsant, par réformes modérées, un management proche de celui des entreprises privées.

La clef fut la désignation du Général Herbert R. McMaster à la tête du Conseil de Sécurité nationale, avec autorité sur le choix des membres. Militaire émérite, spécialiste du contre-terrorisme, il est opposé à l’illusion qu’une supériorité technologique avec des forces spéciales connectées et des bombardements ciblés suffiraient pour l’emporter. En 1997, il écrit un livre (Dereliction of Duty) qui étudie les erreurs du commandement dans la guerre du Vietnam. Patriote et croyant, refusant nationalisme et isolationnisme, il conjugue recherche de la puissance et valeurs morales de l’Amérique, proche des thèses néoconservatrices. Il croit au rôle des stratèges pour les objectifs, des diplomates pour les alliances et aux soldats sur le terrain pour combattre l’ennemi et en « travailleurs humanitaires » pour pacifier, comme au Kosovo. Avec lui, entouré du Général James Mattis et de Rex Tillerson, secrétaire d’Etat, ex PDG d’Exxon, tous partisans d’un renforcement des liens avec les alliés du Proche Orient, Donald Trump a pris la décision de la frappe au nom de l’intérêt américain et de la morale.

Une façon de se doter d’un statut de chef de guerre et de réunifier le parti républicain aussi. Non seulement la Président de la Chambre des Représentants Paul Ryan applaudit, mais les deux chefs de file ds frondeurs, John McCain et Marco Rubio aussi. Pour tous : dans l’environnement international actuel, le retour de la puissance américaine passe par un exécutif fort. L’ « extrême-droite » républicaine y serait opposée, invente la gauche médiatique française. Seuls les libertariens rechignent, tel le sénateur Rand Paul, mais appeler « extrême-droite » ceux qui refusent Etat, bureaucratie, guerre, impôts, est seulement la preuve que l’on peut avoir la plume vive et l’esprit paresseux.

si la plupart des démocrates applaudissent, certains protestent pour la forme, au nom d’un Congrès qui devrait décider des engagements militaires. Avant la guerre du Vietnam, la Constitution exigeait son approbation pour les seules Déclarations de guerre, cas contre le Japon. Depuis, l’autorisation est nécessaire en cas d’ « hostilités » supérieures à 60 jours. Mais, en 1999, le Président démocrate Bill Clinton décide 79 jours de frappes aériennes contre la Serbie, il engage des troupes au sol en Somalie (1992) et Haïti (1994) sans avis du Congrès. En 1911, Barack Obama agit de même en Lybie.

Démocrates ou républicains le savent :face aux menaces terroristes et aux Etats voyous, l’intérêt général commande un exécutif fort. « Russia first » ou « China first », de Vladimir Poutine à Xi Jinping, comme d’Angela Merkel à Theresa May, toutes les grandes puissances suivent lucidement ce chemin patriotique ouvert, qui n’est ni isolationniste, ni interventionniste. Seule la France paraît endormie, incapable de retrouver le chemin de la puissance et de la défense de son mode de vie, au cœur d’une Union européenne bien meurtrie.

 

 

CGT en berne, France en fête

 

(publié Valeurs Actuelles)

La bonne nouvelle syndicale

Bonne nouvelle : la C.G.T. n’est plus la première organisation syndicale du pays. 24,8% des voix lors des élections professionnelles  dans les entreprises privées, contre 26,3 pour la CFDT. Et le bloc réformiste, CFDT, CFTC, UNSA, 41,2%, devance CGT et FO. Qui s’en plaindra ? Ni les salariés, ni la France.

Certes, Montesquieu le notait déjà : aucune république ne peut vivre sans corps intermédiaires. Aujourd’hui, toutes ont besoin de syndicats pour négocier la défense des salariés et l’emploi. Hélas !, en France, la CGT a imposé une idéologie qui détourne les syndicats de leur rôle et les salariés des syndicats. Sur 14 millions, seuls 42,7% votent. La CFDT n’en représente pas même 10%, la CGT moins. La France a le taux de syndicalisation le plus faible d’Europe avec l’Estonie : 7,7% contre 25% au Royaume Uni, 37% en Italie, 52% en Norvège, 67% en Suède, 86% en Islande. En Allemagne, le syndicat unifié représente l’immense majorité des salariés. Il a 6,1 millions de membres contre 1,8 million pour les syndicats français.

Lors de la création de la Cgt, en 1895, rien n‘est joué pourtant. Bourses du travail et associations corporatives fondatrices se méfient des partis. Mais, après la révolution de 1917 en Russie, les communistes, emmenés par Benoit Frachon, scissionnent des réformistes. À la demande de Moscou, ils créent la CGT-U avec l’objectif d’une surenchère démagogique pour déstabiliser les démocraties « bourgeoises » et détruire le capitalisme. La grève ? Moyen privilégié de la lutte de classe, préparation de la grève générale insurrectionnelle. Leur retour dans la Cgt, en 1936 ? Simulacre voulu par Moscou qui refuse d’ailleurs l’entrée des communistes dans le gouvernement du Front populaire et pousse aux grèves. Finalement exclus de la Cgt pour leur soutien au pacte entre Hitler et Staline, ces révolutionnaires y reviennent en force après la seconde guerre mondiale et la dirige. Ils lancent les 5,5 millions d’adhérents contre le Plan Marshall américain de soutien économique. Et, après l’exclusion des communistes du gouvernement Blum, ils déclenchent grèves insurrectionnelles et violences extrêmes, jusqu’au déraillement d’un train à Agny, le 3 décembre 1947: 16 morts, 50 blessés. La scission de F.O. ne change rien : la haine de classe domine le paysage syndical pour un demi siècle.

Depuis la chute du mentor soviétique, l’imposture syndicale  a du plomb dans l’aile. Aujourd’hui, au lieu de la fantasque « crise systémique du capitalisme », celle de la Cgt. Peut-être annonce du printemps pour le syndicalisme.

 

LES SALAUDS

La présomption de culpabilité

par Yves Roucaute

Publié par Valeurs Actuelles sous le titre « Le présomption de culpabilité »

En intégralité ici.

 

Avec l’arrivée du printemps, à la façon du chiendent, le « salaud » prolifère. Sartre appelait ainsi, dans l’ »Existentialisme est un humanisme », ces humains boursouflés d’eux-mêmes qui piétinent dignité et liberté avec morgue au nom de leur conviction. François Fillon est aujourd’hui leur cible.
Version militante du salaud: jets d’œufs et concert de casseroles pour interdire liberté d’expression et de réunion.
Version journalistique et intellectuelle : insinuations calomnieuses et diffamatoires.
Version politique et juridique : humiliations, mises en examen et fuites.
Pas d’états d’âmes, pas de doutes, pas de regrets. À la façon de Christine Angot, le salaud au « cœur creux et plein d’ordure » (Pascal) dit « J’assume !». Et, pour ma part, partisan du droit naturel à la dignité humaine et à la liberté, « j’assume » de les traiter de « salaud ».
« Il existe en France un usage barbare de punir les coupables, lors même qu’ils ne sont pas encore déclarés » tonne, ce 22 août 1789, à l’Assemblée nationale, Adrien Duport, disciple de Montesquieu, fondateur du Parti des patriotes avec La Fayette, Condorcet et Sieyès. Pour fonder l’Etat de droit républicain, il propose sa condition première, l’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen : tout homme est « présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable ». Premier à se lever et à intervenir pour le soutenir : Gérard de Lally-Tollendal. Il sait de quoi il parle: son père, Thomas, emprisonné à la Bastille par lettre de cachet à la suite de rumeurs, lui aussi vilipendé par des salauds, victime d’une enquête à charge, avait été condamné à mort sous le poids de ces ouï-dires, ragots, calomnies. Puis il avait été tué, après 4 ans d’emprisonnement, place de Grève, le 9 mai 1766, au second coup de hache, le premier, raté, ayant seulement fracassé mâchoire et dents.
Plus jamais cela !, proclame l’Assemblée. Hélas !, la corruption morale règne imposée par ceux qui feignent de la combattre. Déjà, avec la Terreur et sa Loi de suspects, les salauds veillaient durant la révoltution: suspects, Adrien Duport et Gérard de Lally-Tollendal fuiront pour échapper à la mort assurée. Aujourd’hui encore, nul « salaud » ne craint d’accuser sans preuve et de violer le Code de procédure pénale qui punit pourtant cette infamie est aisé quand on est du côté du pouvoir. « Retirez-vous monsieur Fillon » exige le Parti socialiste, le 22 mars 2017: « Les Françaises et les Français ne trouvent plus les mots pour décrire la surprise et le dégoût qu’ils ressentent » car « la liste est longue, trop longue, beaucoup trop longue des faits qui vous sont reprochés ». Faits ? Où cela? Aucun. « Selon » le ouï-dire des uns, « selon » les articles des autres dit le communiqué de ces ennemis de l’Etat de droit. « Je pense que François Fillon est le candidat le plus plombé par la corruption que l’on ait connu depuis très longtemps. Je n’ai pas le souvenir d’un candidat aussi marqué par les affaires » renchérit Benoît Hamon qui a le souvenir sélectif, disciple de Mitterrand, ex pote de Jérôme Cahuzac au point d’avoir présenté avec lui ses vœux le 23 janvier 2013. Emmanuel Macron jette aussi sa pierre dans ce jeu de lapidation humaine : « Quand des choses illégales sont faites, il faut aller devant le juge. » « Illégales» vraiment? Peut-être illégales et légales, « en même temps »?
Les « chiens de garde » (Paul Nizan) sont lâchés. Relayés par une certaine presse. « Un peu de décence » proclame l’indécent Maurizio Gribaudi, directeur d’études, dénonçant François Fillon, « qui trouve normal de profiter largement de sa position d’élu». Qui « fait partie de ces hommes politiques qui sont dans une espèce d’habitude de flirter avec l’illégalité » précise Karine Viard, qui ne parvient pas à se dégager de son rôle dans le film « Potiche ». Eric Cantona même devient héros médiatique : après voir traité Henri Michel de « sac à merde », frappé un supporter, insulté des arbitres, voulu interdire les matchs de football en Israël, « Je suggère que nous annulions l’élection quand les candidats se montrent irrespectueux envers la morale et l’éthique ». Et fallait-il saluer Philippe Poutou, incapable de prononcer deux phrases sans les demander à sa voisine, qui s’est senti pousser des ailes d’immonde stalinien pour diffamer, insulter, accuser, condamner sans aucune preuve avec cette morgue de « gros plein d’être » (Sartre) qui dit assez sa misère spirituelle?
Allons, contre cette corruption morale, rappelons que la présomption d’innocence, socle d’un Etat de droit, valeur clef de la République, ne se négocie pas. Hommes de gauche ou de droite ? Ouvrier ou bourgeois? Que m’importe. Défendre la dignité de tout être humain, cela se doit.

 

La proportionnelle contre la démocratie

La proportionnelle contre la démocratie

Par Yves ROUCAUTE

Publié Valeurs Actuelles

Demain, un « Parti des animaux » imposera-t-il sa loi en France, pays des bouffeurs de grenouilles ? Peut-être. Aux Pays-Bas, sur 150 sièges aux législatives, les amis des bêtes en ont obtenu 5, le parti populaire libéral, vainqueur des législatives, seulement 33. Insuffisant pour gouverner. Alors, avec la proportionnelle, tout est possible. Le chantage bien sûr, l’instabilité et l’inefficacité encore, le ridicule aussi.
Réconcilier ainsi la population avec les élites politiques ? Il n’y faut pas compter. La proportionnelle n’est pas le pouvoir du peuple mais celui des minorités. Le régal des groupuscules. Parfois un viatique pour ceux qui veulent la perte du pays. Le Denk turcophile aux Pays-Bas n’aurait jamais eu d’élus sans elle. Mais le 15 mars, ils ont été 4 à entrer au Parlement. Devinette : de quel côté pencheront-ils quand il s’agira de la laïcité ou de l’entrée de la Turquie dans l’Union ? Et qui est prêt à parier que les mêmes causes ne produiraient pas les mêmes effets en France, avec constitution d’un parti communautariste de l’immigration sur le modèle de Denk ?
Israël, depuis 2014, a cru pouvoir échapper à cette loi d’airain par un seuil de 3,25% pour la représentation. Résultat : ultra-orthodoxes séfarades, ashkénazes, extrémistes nationalistes continuent à s’en donner à cœur joie. Ils refusent de porter des armes pour défendre Israël mais ils donnent des leçons de morale, imposent des ministres, votent le financement de leurs écoles et refusent les conditions d’une paix durable. En Belgique, 5% pour le seuil et un système de quotient pour avantager le premier. Insuffisant : en 2007, il fallut 194 jours pour former un gouvernement. Après les législatives de 2010, 541 jours. Et, aujourd’hui, le pays vit de tractations. En Espagne ? 315 jours et deux scrutins, en 2016, avant la réélection de Mariano Rajoy, dénué de majorité, dépendant des socialistes. La France le sait qui a connu avec la IVème République et sa proportionnelle relative une période d’instabilité où les gouvernements de son succédés. De 1946 à 1958 : 24 gouvernements. L’Italie aussi qui tente de sortir de ses crises, donc de la proportionnelle : la nouvelle loi donne une prime au dessus de 40% des suffrages.
La proportionnelle rapprocherait-elle les élus du peuple ? Au contraire. Les partis fabriquent les listes sans se préoccuper de la population. A la façon de la Norvège et de la Suède. Ou des européennes. Avec l’objectif de recaser les apparatchiks et de distribuer les prébendes.
Notre système ? Le pire… à l’exception de tous les autres.

QUAND LA COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE LÈVE LES VOILES

par

Yves ROUCAUTE

Paru dans valeurs actuelles. 24 mars.

Pour la première fois, dans toute l’Europe, bouter le salafisme hors des entreprises est devenu un droit. Reste à l’exercer avec subtilité. L’islamisme a perdu une bataille décisive mais non la guerre.

Article

Ce 14 mars, par deux arrêts, la Cour de justice de l’Union Européenne vient de briser la stratégie d’entrisme islamiste dans les entreprises. Burqas, niqabs, foulards? Les entreprises privées ont le droit de les interdire. Et toute autre comportement et propagande salafistes aussi. Deux conditions simples: un règlement intérieur qui bannit les signes visibles religieux et une activité légitimant la neutralité envers les clients, obtenue par des moyens « appropriés et nécessaires ». Une interprétation de la plus haute juridiction européenne qui s’impose aux 28 Etats de l’Union.
Collectif contre l’islamophobie en France et islamistes européens n’ont pas tort d’éprouver une «profonde inquiétude». Durant trente ans, le politiquement correct, multiculturaliste et relativiste, leur a permis de déstabiliser les pays qui les avaient généreusement accueillis. Détournant les valeurs des démocraties auxquelles ils ne croient pas, au nom de la liberté, ils ont revendiqué le droit de porter le voile. Au nom de l’égalité, ils ont dénoncé les « discriminations ». Au nom d’une prétendue « islamophobie », ils ont miné mœurs et institutions.
Le voile ? Leur cheval de Troie. Dans le Coran, « hijab » est indiqué cinq fois : seulement un « rideau » derrière lequel se tenaient ceux qui demandaient un service aux épouses de Mahomet afin d’éviter le favoritisme. Le voile ? Deux fois: Sourate XXIII, verset 59 et Sourate XXIV, verset 30-31. Traduction de jalabibihenna, qui signifie « habits » que les femmes devaient porter à une époque où les nomades se promenaient souvent seins nus. Il leur faudrait « rabattre le voile sur leurs poitrines », « ne montrer de leurs atours que ce qui en paraît ». Cacher les « atours » : non les visages. Seul un hadith incomplet évoque le voile islamiste qui ne concerne pas le visage. Et il ne figure pas dans la compilation de l’imam al-Boukhari, seule référence.
Répondant à la Cour de cassation française et à son homologue belge, la Cour a donc balayé la stratégie salafiste. La prétendue « discrimination » d’une réceptionniste belge licenciée pour s’être mise à porter le foulard islamique alors que le règlement intérieur de la société avait interdit le port de tout signe visible religieux ? Baliverne, dit-elle au nom de la Convention Européenne des droits de l’Homme, des traditions constitutionnelles communes aux États et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union. A juste raison. La liberté religieuse est un droit qui vaut aussi pour juifs et chrétiens détestés par les islamistes, hindouistes avec lesquels ils se battent de Londres à New Delhi, bouddhistes, militants athées… Interdire le foulard islamique ? Le bon sens pour la paix sociale et la conquête des marchés. Et s’il n’y a aucun désavantage pour ceux qui respectent le règlement, la « discrimination indirecte » est une autre sornette.
Quant à l’islamiste embauchée en 2008 chez Micropole Univers, licenciée en 2009 sans préavis pour n’avoir pas répondu aux exigences du client, Groupama, qui ne voulait pas de personne voilée ? Il n’appartient pas au client d’imposer ses règles à une entreprise dit la Cour, mais elle aurait pu être licenciée avec un règlement adéquat .
L’esprit de la liberté a gagné une bataille mais non la guerre. La désunion fait la faiblesse. France, Belgique, Bulgarie, Pays-Bas et bientôt Autriche, Norvège et Luxembourg interdisent le voile intégral dans l’espace public. Au Royaume-Uni, les juges décident au cas par cas. En Allemagne, cela dépend des lands. En Tchéquie, interdiction du foulard islamique à l’Université. Le laisser-passer règne dans d’autres pays. Le temps est venu pour l’Europe de se mettre en ordre de marche contre l’offensive salafiste.

Benoît Hamon: l’Arlésienne

Benoît Hamon : l’Arlésienne

Paru dans Valeurs Actuelles. 14 mars.

Où est passé Benoît Hamon ? Proches et parti socialiste s’inquiètent. Avis de recherche lancé: 169 cm, 49 ans, cheveux châtains, yeux bleu-vert, mèches courtes rabattues sur le front, un peu chèvre selon son signe astrologique chinois. Récompense promise : une balade de trente minutes dans l’Opel Corsa du candidat et une bouteille de gnole offerte par Martine Aubry. Il aurait été aperçu pour la dernière fois dans une émission de télévision lors des primaires de la gauche. Rappelez-vous : au second tour, c’est celui qui n’était pas Manuel Valls.
Après l’affaire Troadec, l’équipe de campagne suspecte le pire : le siège du PS, rue Solférino, est tout proche de la Seine où il est facile de dissimuler un forfait. Et ils savent les ennemis nombreux et dissimulés : des parents socialistes prêts à tout pour lui tordre le cou et conserver la cagnotte électorale. A qui profiterait le crime ? A Emmanuel Macron. Un suspect.
Je le leur accorde : la machine à trahison fonctionne à fond. Emmanuel Macron ? L’Auberge du Bon Accueil Socialiste. Depuis le départ du sénateur-maire de Lyon, Gérard Collomb, Alain Calmette, Marc Goua, Dominique Baert, Christophe Caresche, Jean-Pierre Masseret, Rochard Ferrand, Stéphane Travert, Arnaud Leroy, Christophe Castaner, Florent Boudié, François Patriat, Nicole Bricq… et bien d’autres se sont attablés. Les écologistes, façon François de Rugy et Stéphane Gatignon se pressent, les radicaux de gauche s’empressent. Sur scène, Pierre Bergé et Bertrand Delanoë haranguent les infidèles, dans les coulisses, Ségolène Royal menace les fidèles.
Mais j’engage les derniers consommateurs de la buvette Hamon à ne pas désespérer. A mon avis, leur « candidat ordinaire » se cache. N’ayant aucune intention de l’emporter, mais de diriger un groupuscule de « vrais socialistes », type le défunt PSU, il veut se débarrasser des réformistes. Moins il parle, plus ils partent. Le coup du père Noël avec un revenu universel de 750 euros mensuel au coût de 400 milliards d’euros, équivalent du budget de l’Etat (494 milliards) ? Augmentation sensible du SMIC, abrogation de la loi travail, abaissement de l’âge de la retraite, objectif de 32 heures hebdomadaire, taxe sur les gentils robots ? Un coup de génie pour épurer le parti. Sa modération pour l’islamisme radical même, le démontre : dans cette campagne, Benoit Hamon ce sera l’Arlésienne de Bizet, version niqab et burqa, celle dont on parle parfois mais qu’on ne voit jamais.

AFFAIRE FILLON : QUAND LES JUGES PRENNENT LE POUVOIR

AFFAIRE FILLON : QUAND LES JUGES PRENNENT LE POUVOIR

Yves ROUCAUTE

 Philosophe

Article Valeurs Actuelles 8 mars

 

L’Elysée a créé un pouvoir judiciaire aux ordres après son quinquennat calamiteux. Dans son viseur : l’opposition. Une dérive amorcée de longue date, qui prend désormais la forme d’un coup d’Etat des juges.

« Il n’y a point de plus cruelle tyrannie que celle que l’on exerce à l’ombre des lois et avec les couleurs de la justice » disait Montesquieu. Hélas !, où va la France ? Par des procureurs aux ordres et des juges d’instruction soigneusement choisis, une Présidence cynique a créé un « pouvoir judiciaire » qui viole la Constitution, bafoue les droits individuels, contrôle le pouvoir législatif et prétend choisir le futur Président. Tout pour installer un héritier à son image ! Après avoir liquidé Nicolas Sarkozy, à coups d’humiliations et de « mises en examen », haro sur François Fillon ! Qu’aucun candidat de droite ou du centre ne puisse l’emporter ! Médias politiquement corrects et élus de gauche relaient l’ignominie. À droite même, certains plient devant la félonie.
« Une Constitution, c’est un esprit, des institutions, une pratique » disait le général de Gaulle, en 1964. Que l’on me montre les mots « pouvoir judiciaire » dans la Constitution : ils n’y sont pas. « Autorité judicaire » dit-elle. Les seuls « pouvoirs » ? Exécutif et législatif. L’esprit de la Vème République ? Le pouvoir du peuple et de ses représentants. Des Cours de justice de l’Ancien Régime, appelées « Parlements », au Tribunal Révolutionnaire de la Terreur, pour Charles de Gaulle, l’histoire de France démontre que le « pouvoir judicaire » annonce toujours le despotisme.
Le rôle de la justice? Appliquer la loi et, « gardienne de la liberté individuelle », assurer contre l’arbitraire. D’où la présomption d’innocence, affirmé par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de l’ONU, condition d’une justice respectueuse de la dignité humaine. « Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie. Les atteintes à sa présomption d’innocence sont prévenues, réparées et réprimées dans les conditions prévues par la loi » dit le Code de procédure pénale.
François Fillon ? Il est donc innocent. De droit. De fait. Alors pourquoi des procureurs laissent-ils passer les atteintes quotidiennes à ce principe dans la presse et jugent-ils inutile d’enquêter sur l’origine des fuites des procès-verbaux ? Pourquoi, à l’inverse, une telle célérité pour appeler « détournement de fonds » un contrat d’assistant avec des proches, utilisé pourtant par un bon tiers des députés depuis des lustres ? Échafaud à droite, exemption au-delà ?
Qui est dupe? « Mise en examen » ? « Inculpé » disait-on avant 1993. La charge symbolique négative est restée et la condamnation sans jugement s’impose à l’opinion. Soutenue par des rumeurs médiatiques organisées qui ruinent la réputation. D’Eric Woerth, contraint de démissionner de son poste de ministre, à Nicolas Sarkozy, battu aux présidentielles puis aux primaires, quand les juges des tribunaux correctionnels constatent l’inanité des accusations, il est trop tard.
Le processus de construction d’une société de contrôle s’est accéléré. Etonnant Parquet Pénal Financier, chargé de la grande délinquance financière, installé par François Hollande en 2014 qui nomma Procureur Général Eliane Houlette, sur proposition de Christiane Taubira. Moins de 24 heures après les révélations du Canard enchaîné, il s’autosaisit de l’« affaire Fillon ». Un salaire mensuel de cadre serait de la « grande délinquance financière ». Un rapidité inégalée : il avait mis 10 jours pour ouvrir une enquête dans l’affaire du « Football Leaks».
Suit une enquête policière tout aussi rapide, certains dirons bâclée. Trois solutions. Un classement sans suite, en l’absence d’indices précis et concordants. Ou une citation directe devant le tribunal correctionnel pour un jugement qui n’interviendrait pas avant longtemps. Ou, solution choisie, la nécessité d’investigations complémentaires par la nomination d’un juge d’instruction.
Le Parquet demande au Président du Tribunal de Grande Instance, Jean-Michel Hayat, conseiller au Cabinet de Ségolène Royal durant trois ans, ancien membre du Syndicat de la magistrature, de désigner trois juges d’instruction. Trois ? L’affaire est-elle si complexe ? Le fameux hasard socialiste aidant, voilà Serge Tournaire nommé. Moyenne des instructions ? 30 mois. Pour François Fillon : quelques jours seulement. Miracle socialiste : plus besoin d’investigations complémentaires pour la convocation de « mise en examen ». Où il y a d’la gêne, il n’y a pas de plaisir.
En juin 2012, Serge Tournaire avait signé un texte éloquent dans Le Monde pour dénoncer « la décennie qui s’achève ». Décennie ? En 2002, c’était le gouvernement du camarade Jospin. Pendant 10 ans ? La droite de François Fillon et Nicolas Sarkozy qui aurait « vu se déliter les dispositifs de prévention, de détection, d’alerte et de répression de la corruption mis en place dans la période précédente comme si les exigences de probité et d’égalité de tous devant la loi s’étaient dissoutes dans la crise. » Avec « la volonté de dépénaliser à toute force le droit des affaires ». Texte du syndicat de la Magistrature et du groupe « anticor » dont le membre le plus éminent s’appelle… Christiane Taubira. Le monde des camarades est si petit. L’homme a de la suite dans les idées. Déjà, dans l’affaire du financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, contre l’avis du second juge d’instruction, Renaud Van Ruymbeke, modèle d’indépendance, il avait ordonné le procès.
Rien n’arrête ce « pouvoir judiciaire ». Contre le pouvoir législatif, il prétend même contrôler le pouvoir législatif et l’Assemblée nationale. Selon une pratique séculaire, un député utilise son crédit mensuel forfaitaire comme employeur pour rémunérer ses collaborateurs, famille comprise. Seul, il décide de la façon d’être « assisté » : conseil, note écrite, rapport oral, rapport écrit. Aujourd’hui, un juge d’instruction prétend contrôler les règles d’emploi, juger du travail fourni, critiquer les « indemnités » obligatoires en cas de rupture de contrat.
Que restera-t-il de cette « « mise en examen » ? Juridiquement rien. Pas même sur les prestations de Pénélope Fillon dont le propriétaire de la Revue des deux mondes a dit, et prouvé, la réalité du travail. Mais, cela, c’est après les élections présidentielles. Avant, le poison distillé dans l’opinion produira ses effets.
Nicolas Sarkozy le prouve. Mise en examen dans l’affaire Bettencourt : non-lieu. Mise en examen sur le paiement par l’UMP d’une amende infligée sur ses comptes de campagne : non-lieu. Prétendue violation de l’instruction dans l’Affaire Karachi : non-lieu. Soupçons d’abus de biens sociaux et de complicité de vente de drogue dans l’affaire « Air cocaïne » : abandon. L’affaire Bygmalion ? Bien que Nicolas Sarkozy ne se soit pas enrichi, qu’il n’ait pas eu connaissance des fausses factures, il serait coupable d’avoir réclamé de nouveaux meetings et de n’avoir pas lu quelques notes comptables gérées par son équipe de campagne. L’« affaire » des « écoutes » ? Il aurait corrompu Gilbert Azibert, en promettant un poste à Monaco contre des informations dans l’affaire Bettencourt, bien qu’il ne l’ait jamais vu, ne lui ai jamais téléphoné, rien donné en échange. Qu’importent relaxe et non-lieu quand l’élimination politique est belle.
Dénoncer la nouvelle Loi des suspects ? L’accusation d’ « outrage » doit terroriser l’insolente liberté d’expression. Tel Henri Guaino poursuivi pour avoir soutenu Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bettencourt. Mettre en examen, perquisitionner, accabler une femme, salir une réputation ? Pas d’outrage. La dignité humaine, ce pouvoir fourbe ne connaît pas.
Evoquer le « pouvoir judicaire » aux Etats-Unis ? Il ne fonctionne pas sans contre-pouvoirs issus du suffrage populaire. Les juges ordinaires ? Elus. Ceux des cours d’appel ? Nommés après approbation du Sénat et destituables par la Chambre des représentants. Procureurs des Etats ? Elus. Procureurs fédéraux et juges de la Cour Suprême? Nommés par le Président avec accord du Sénat et destituables.
En France, retrouvons l’esprit de la Vème République, celui de la vraie justice, qui préserve les libertés individuelles, rendue par l’institution judicaire. Car, disait saint Augustin, « où il n’y a pas de justice, il n’y a pas de république ».

Il n’y a point de plus cruelle tyrannie que celle que l’on exerce à l’ombre des lois, et avec les couleurs de la justice, disait Montesquieu. Hélas ! où va la France ? Par des procureurs aux ordres et des juges d’instruction soigneusement choisis, une…
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