Karim Benzema et la clef Deschamps

Karim Benzema en équipe de France ?

 

Par Yves ROUCAUTE

 
Paru Valeurs Actuelles. 1 juillet.
 
Karim Benzema en équipe de France ? Certes, cela se peut. Mais cela se doit-il ? Telle est la question. Réduire cette affaire, symptôme de bien d’autres, à un « sujet sportif » (Benoît Hamon) ? Voilà oubliés sens du sport de compétition et signification de cette « équipe de France ». Plus qu’un jeu et une localisation géographique : une présence spirituelle.
Dés les premiers jeux sportifs en Grèce, au VIIIème siècle avant J.-C., toute compétition sportive est une guerre pacifiée. Les Cités fabriquent des athlètes à leur image pour s’identifier à eux et à leur gloire. Avec le professionnalisme, au IVème siècle, naissent les entraineurs : s’ils recherchent la performance, ils n’oublient pas la priorité : incarner l’esprit de la Cité.
Et ils exigent une parfaite éthique. Les Léonidas de Rhodes ou autres Glaucos de Karistos, célébrés par toute la Grèce, sont des hommes d’honneur qui ont prêté serment de moralité devant Zeus. Et chacun attribue les victoires innombrables de Sparte à la vertu de ses sportifs. Condamnés et suspects ? Interdits de jeux. Imaginer des « représentants » se mettre en grève ou insulter un entraineur? Les sportifs grecs auraient préféré mourir à cette honte pour leur nation. Un simple retard conduisit à la proscription olympique d’Apollonios d’Alexandrie et la tricherie du seul Callipos exclut la cité d’Athènes de la 112ème olympiade.
Avec les sports collectifs, au XIXème siècle, la logique de représentation est poussée au paroxysme. La professionnalisation du football, en 1885, est exigée par les clubs du nord de l’Angleterre, industrielle et populaire, contre la Fédération anglaise. des entraineurs sont appelés pour construire une « équipe » : ensemble unifié, cohérent, au dessus des intérêts particuliers, pour apporter la gloire dans une guerre sociale pacifiée. Avec les compétitions internationales, l’esprit d’équipe est transposé au niveau national.
Mis en examen, Karim Benzema exige de Didier Deschamps, vecteur de l’esprit de la nation française, qu’il se déplace et lui « dise dans les yeux » les raisons d’une exclusion évidente. Il l’accuse d’accepter « la pression d’une partie raciste de la France », aiguisant la haine, dévoilant le racisme latent qui attribue à la race blanche tout différend. Adieu donc. Dépasser origines ethniques et différences sociales dans une unité supérieure qui représente notre belle nation civique française, donner du rêve et la mener à la gloire : c’est cela l’équipe de France.

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