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Entretien Yves ROUCAUTE

Entretien dans Atlantico.

Question 1.
La ville de Copenhague a subi hier soir deux attentats perpétrés par un homme dont le modus-operandi et les intentions nous rappellent fortement ceux de Paris, il y a un mois. On peut se poser la question de la capacité de résistance des sociétés européennes face à ce type d’attaques terroristes de plus en plus fréquentes. A partir de combien de répétitions d’attentats, la stabilité politique de nos démocraties pourrait être menacée?

Ce terrible drame de Copenhague s’inscrit dans une stratégie qui vise à déstabiliser les démocraties en Europe. Une stratégie qui n’a pas besoin de centre opérationnel et qui vise à mobiliser le maximum de musulmans autour de l’islamisme et dàdéstabiliser les démocraties libérales en ruinant leurs fondements, voire en créant les conditions d’une guerre civile en Europe au nom de l’Islam assiégé, comme le prône Al-Sourri, qui est un théoricien qui influence l’Etat Islamique en Irak.
Force est de constater la montée du terrorisme islamiste depuis l’attentat de la rue Copernic qui a fait 4 morts juifs en 1980 ou celui de la rue des Rosiers en a fait 6, en 1982, organisé par Abou Nidal, qui était réfugié chez son ami Saddam Hussein. Avec la chute du mur de Berlin, la montée en puissance de cette menace n’a pas cessé dans le monde. Sur notre continent, certains attentats ont été particulièrement meurtriers, comme celui de Madrid, en 2004, qui fit 194 morts, ou celui de Londres en 2005 qui en fit 56 morts, d’autres l’ont été moins, mais, aujourd’hui, les Européens ont compris que cette menace augmentait et qu’ils devraient vivre avec longtemps.
Néanmoins, il ne faut pas oublier que ce ne sont pas les menaces qui causent l’effondrement des Cités mais bien l’incapacité morale de leur résister. La force des républiques libres tient dans la vertu civique des citoyens pensait Montesquieu. Une vertu favorisée ou diminuée par les élites dont le rôle devrait être d’assurer l’unité nationale et de préserver le premier des droits naturels, celui de la sécurité du corps. Sinon, leur légitimité et celle de l’Etat qui devrait seul détenir le monopole de la violence légitime, est remise en cause.
Or, le problème aujourd’hui tient précisément à l’aveuglement de certains dirigeants européens qui nourrissent, sans le savoir, la stratégie islamiste. Faute de saisir les enjeux, ils ne prennent pas les mesures d’urgence nécessaires en Europe. Songez que, sous l’influence des socialistes, des Verts et du centre gauche, le Parlement européen a même refusé la création d’un fichier européen des voyageurs aériens (dit « PNR), pourtant réalisé aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, au Canada et en Australie, qui ne sont pas des dictatures, faut-il le préciser… Même le F.N. qui ne comprend pas plus les jeux et enjeux, embourbé dans sa démagogie coutumière, s’est opposé à cette mesure de bon sens. Une mesure bien insuffisante par ailleurs. Ainsi, au lieu d’une vraie réflexion sur la politique à mener dans ce qui s’apparente à une guerre, on voit se multiplier les postures mondaines et politiciennes, jusqu’à interdire toute réflexion sur un « Patriot Act » à l’européenne.
Vous évoquez d’ailleurs le mode opérationnel des terroristes, mais est-on certain d’en bien comprendre le sens ? Le processus en œuvre est celui de tous les révolutionnaires : « action-répression-mobilisation-action ».
Pour cela, ils choisissent d’abord leurs cibles : caricaturistes de Mahomet et juifs, jugés ennemis de lslam, les uns pour leur action, celle de dessiner, les autres pour leur naissance. Ce choix est tactiquement efficace. Il conduit à élargir leur popularité au-delà des cercles groupusculaires terroristes, vers les fondamentalistes qui partagent leur point de vue : interdiction de la liberté d’expression, extermination des Juifs. Et, plus encore, il permet de neutraliser nombre de musulmans qui, sans approuver l’acte terroriste, ont eu parfois comme réaction de renvoyer criminels et victimes dos à dos en raison des caricatures.
Ensuite, la répression. Il est important pour ces terroristes de montrer que les Etats des démocraties libérales sont « complices » des caricaturistes et des juifs, qu’il les protège au lieu de protéger le droit de croyance. « Je suis Charlie » fut à cet égard une véritable aubaine pour les terroristes qui ne pouvaient imaginer personnel politique plus niais, gauche et droite réunies dans une Union sacrée de démagogues irresponsables. Qu’est la France ? « Je suis Charlie » répondirent les élites. Tant pis pour les millions de musulmans français amoureux de la démocratie, rejetés pour avoir cru que l’Etat était au dessus des factions. L’Etat français n’était plus l’Etat de droit qui autorise l’usage de la liberté d’expression jusqu’à la caricature (de Mahomet mais aussi du Christ, de Bouddha et de toute figure symbolique…), il s’identifiait au point de vue particulier des caricaturistes. Et dans toutes l’Europe, on vit ainsi des élites maladroites tomber dans la trappe de « Je suis Charlie » avec ces mêmes conséquences : des musulmans applaudissant l’ignominie, d’autres doutant, tous ayant le sentiment d’être exclus. Cela, tandis que nos amis musulmans, du Roi du Maroc au gouvernement égyptien se trouvaient bien marris devant un tel aveuglement.
Répression, donc mobilisation, tel est le troisième terme. Les manifestations en dehors de l’Union européenne ne purent laisser de doutes quant au sentiment profond de bien des Européens musulmans. L’absence massive des musulmans autour de « Je suis Charlie » en France en fut une preuve supplémentaire, tout comme bien des réactions dans les quartiers dits « sensibles » et jusque dans certaines écoles. Le recrutement d’islamistes, sinon de terroristes, dans toute l’Europe, avait bien été ouvert.
Mobilisation donc action : telle est bien la dynamique voulue. Hier Paris, aujourd’hui Copenhague, demain ce peut être n’importe où. Avec, à chaque fois, la volonté d’augmenter le cercle des sympathisants et d’attiser la haine dans la société civile, ouvrant libre cours à la violence intercommunautaire. Ainsi, les terroristes gagner leur pari. Musulmans contre juifs et chrétiens, car ceux qui sont attaqués voudront se défendre. Et l’engrenage de la haine fera le reste.
Les démocraties européennes sont-elles désarmées face à une telle stratégie ?
Je n’en crois rien. Pour la plupart, elles sont même fortement armées, car moralement armées. Cela en raison de l’histoire, en particulier de l’histoire spirituelle, celle du christianisme d’où sont nées ces nations européennes rassemblées autour de valeurs universelles. Tant que ces valeurs tiendront, les sociétés tiendront l’engrenage de la haine à distance.
La clef de cette réaction se trouve d’ailleurs paradoxalement dans le soutien de tous, musulmans compris, à la communauté juive.
Il n’est pas innocent qu’elle soit la victime systématique de ces attentats. Car en la visant, c’est le cœur et le socle de la civilisation européenne que visent les terroristes. Eux savent que les valeurs universelles entrées dans les mœurs des Européens, sont judéo-chrétiennes. Et que ces valeurs interdisent leur projet liberticide, la charia, leur rapport aux femmes, aux enfants, aux autres cultures. Car il faut avoir la docte ignorance de certains athées pour ignorer que la laïcité elle-même vient de cette séparation évangélique entre ce qui appartient à Dieu et ce qui appartient à César et que leur liberté d’expression, voire leur droit à l’insolence, est l’expression du droit naturel qui est né dans ce creuset judéo-chrétien, dans cette civilisation qui place les droits naturels et la dignité humaine au centre des cités, jusqu’à organiser leur protection par des conseils constitutionnels ou des cours suprêmes.
Les terroristes veulent l’extermination des Juifs, comme Hitler, qui voulait fonder une nouvelle civilisation, la voulait aussi. Elle est la condition de leur ordre totalitaire pour extirper de la planète ceux qui portent dans leur histoire et leur chair cette loi d’humanité qui dit que tout n’est pas possible, qu’il y a de la loi et que le respect de l’autre est au commencement de la moralité.
C’est pourquoi « Je suis Charlie » est plus qu’une erreur, une défaite stratégique.
Il faut réunir toutes les composantes des nations européennes, musulmans et juifs unis, autour des valeurs universelles. Une nécessité pour résister à la haine. Avec ces valeurs, à la façon du peuple britannique durant la guerre, il est possible de résister à toutes les vagues des forces du mal. Sans ces valeurs, la défaite est assurée au prochain coup de feu.

Question 2
2.Parmi les différents pays occidentaux susceptibles d’être attaqués, y a-t-il une différence dans le nombre de « coups » qui peuvent être encaissés ? Quel est le degré de résistance de la France, notamment ?

Oui, certains pays sont mieux armés en raison de leur histoire, de leur composition sociale, de leur puissance morale et parce qu’ils ont une élite qui assume ses fonctions de protection du droit naturel à la sécurité sans craindre les foudres démagogiques et les jeux partisans.
Ainsi le Royaume Uni a vu, depuis 2005, l’ensemble des composantes politiques s’accorder sur le « Prevention of terrorism Act » qui permet au ministre de l’Intérieur de promulguer des ordonnances de contrôle sur les suspects, y compris non citoyens. Ce qui signifie des possibilités de sanctionner par des mesures de prisons fermes l’entraînement ka préparation mais aussi l’encouragement au terrorisme avec des registres de surveillance, des prélèvements d’empreinte, contrôles aux frontières. Et si l’opposition a tenu à ce que les nouveaux projets du gouvernement de priver les djihadistes de passeport voire de les bannir du territoire soient contrôlés par la justice, le principe n’est pas mis en cause. Non plus que la coopération renforcée avec les services de renseignements des Etats-Unis.
Dira-t-on qu’il s’agit d’une veille nation ? En Allemagne, la structure de la sécurité a été transformée depuis 2001 par la conjonction des Länders et de l’Etat fédéral et un centre spécifique de défense commun contre le terrorisme a été créé. Ecoutes et surveillances, des flux financiers, des banques, des entreprises de télécommunication, des compagnies aériennes, de l’Office fédéral pour la migration et même des informations médicales sont acceptées depuis la Loi de lutte contre le terrorisme de 2002, et cela vaut pour les non-citoyens. Non seulement l’acte terroriste, sous toutes ses formes est poursuivi, mais, depuis 2003, l’intention de le commettre aussi, et au même titre. Et, depuis 2007, dans un large consensus national, il est possible d’écouter les conversations, de les brouiller, tandis que depuis l’an dernier la propagande islamiste, étalage de signes inclus, est un délit sévèrement réprimé, y compris dans les communications privées.
Durant le même temps, la France est devenue moralement faible, incapable de prendre des mesures. L’extrême-gauche et les théoriciens postmodernes ont développé pendant des années une culture de haine antisémite sous le couvert du soutien aux Palestiniens et une culture de rejet de l’assimilation sous prétexte du « droit à la différence ». Une culture qui a nourri les djihadistes qui ont trouvé dans les fantasmes gauchistes la justification des assassinats juifs et de leur rejet de la France, ignorant même qu’il y a des palestiniens chrétiens, athées, juifs, qu’ils sont arrivés au XIXème siècle en « Palestine », que nombreux vivent en Jordanie (qui refuse le terme de Palestiniens) et que plus nombreux encore sont ceux qui cherchent simplement à vivre en paix.
Les socialistes, au lieu d’affronter cette extrême-gauche, comme le fit naguère la social-démocratie conduite par Guy Mollet, s’allia avec elle. Et elle repris sont laxisme moral. Quant à la droite républicaine, qui n’a plus aucune charpente idéologique depuis la disparition de Pompidou, elle a préféré courir après la gauche, croyant que l’air du temps serait aussi celui des urnes. Ainsi furent abolies la plupart des règles de l’assimilation. Et abandonnées les classes populaires qui devaient affronter seules, sans le soutien de l’Etat, des mœurs et des revendications qui, dans la quotidienneté, heurtaient leur mode de vie, pourtant généreux.
Certes, la France a produit 14 lois qui tentent d’arrêter le terrorisme, jusqu’à inventer un délit d’entreprise terroriste individuelle, mais elle se trouve incapable de propulser un Patriot Act sur son territoire et en Europe. Plus encore, mal dirigé, le pays n’a pu, malgré l’épisode fort de rassemblement lors du dernier crime terroriste, créer les conditions d’un vrai rassemblement national autour de « Je suis Français », au lieu de sombrer dans le piège de « Je suis Charlie ».
Dés lors, ce pays qui accueille le plus de musulmans dans l’Union européenne, risque de voir rapidement grandir l’esprit communautaire au lieu de l’esprit patriotique, avec les risques de dérive vers la violence prétendument « identitaire » au lieu de la violence républicaine tournée contre les islamistes.

Question 3
3.De par leur Histoire faite de violences, parfois extrêmes, les sociétés européennes possèdent une certaine « résilience » face à cette violence. Par peur de retomber dedans, les élites ont du mal à réagir au phénomène. Sommes-nous finalement désarmées face à ces attaques ?

Les histoires de toutes les nations sont faites de violences, et pas seulement de l’Europe. Et depuis le néolithique, tous les continents se sont ouverts de cimetières dus à la haine humaine. La différence tient plutôt aux moyens utilisés dans les guerres. La modernisation, née dans les facultés européennes sous l’influence du christianisme, a permis aux haines des massacres et des charniers de masse plus rapides. Mais songez à la disparition totale de la terrible civilisation Maya, qui se détruisit seule, à l’esclavage transsaharien organisé par les arabes dont il ne reste aucun survivant, aux conflits entre Turcs, arabes et perses(iraniens), aux guerres entre Japon et Corée…
Mais, je crois que nul ne s’habitue jamais à vivre dans la hantise d’être massacré. Surtout lorsque les civilisations mettent en avant la valeur de la vie humaine. Ce qui est le cas des civilisations européennes. L’histoire montre que les populations qui ont une telle crainte préfèrent se battre, si elles ont une chance de l’emporter, ou de fuir. Parfois même, songeons au Ghetto de Varsovie, les populations préfèrent mourir dans l’honneur quand bien même elles n’ont pas l’espoir de survivre.
Ce sont ces valeurs qui couvrent l’Europe qui expliquent la résilience : une volonté de se battre pour la liberté, jusqu’au bout, quand bien même la bataille paraît perdue. Songeons à Charles de Gaulle. Et la victoire finale.
Le véritable armement est moral et le désarmement aussi.
Chaque nation européenne, au fond d’elle-même, dans sa diversité, est forte des mêmes valeurs universelles. Ces valeurs sont encrées dans le sol, ce qui les rend plus fortes encore, car elles sont appuyées sur une histoire propre et des valeurs particulières. Il revient donc aux élites politiques républicaines d’assurer les citoyens de leur détermination à prendre les mesures pour assurer l’identité nationale autour de leurs valeurs. Et de rappeler que si un invité vient dîner chez un ami, il respecte le mode de vie de ses hôtes. Un individu qui arrive au Danemark, doit accepter les règles de vie de ce pays. Il en va de même dans le monde entier.
Par exemple, en France, première nation civique du monde, chacun est libre de la religion de son choix, mais seulement à partir du moment où elle ne viole pas les valeurs universelles de sa civilisation. Ceux qui refusent l’égalité entre hommes et femmes, qui violentent les femmes, qui les forcent à porter un voile intégral, qui décident de la mort pour apostasie de celui qui change de religion, qui pratiquent l’ablation du clitoris, qui refusent d’envoyer les enfants à l’école et bien d’autres pratiques que certains pays acceptent, doivent être sanctionnés sans aucun « droit à la différence ». Le droit à la différence passe derrière le droit à la déférence devant les valeurs de la nation. La véritable faiblesse de la France tient dans ces années de laxisme qui l’ont désarmée. Et il appartient de la réarmer.
D’où le Patriot Act. Je le dis sans détour : le Patriot Act à l’européenne est absolument indispensable. Il fait partie du réarmement moral.
Rappelons ce qu’est le Patriot Act et comment il pourrait être adapté. D’abord, il s’agissait pour Georges W. Bush de casser cette séparation et cette concurrence absurde entre le renseignement extérieur, en particulier la CIA, et le renseignement intérieur, en particulier le FBI. Une séparation qui avait conduit à sous-estimer les menaces par faute de coordination. Ne serait-il pas tant, au niveau européen, de fédérer l’ensemble des services, autant que possible, extérieurs et intérieurs des Etats ? Ou va-t-on encore découvrir après un nouveau massacre que les terroristes qui sévissent sur notre territoire sont connus des services de nos alliés ?
Le Patriot Act permet ensuite de régler une grande question : comment traiter des gens pris les armes à la main en Afghanistan, alors qu’ils ne sot pas citoyens américains et ont commis leurs actes en dehors du territoire ? Cette réalité fait qu’ils ne peuvent en aucun cas être jugés par une juridiction américaine qui devrait se juger incompétente et donc relaxer les prévenus. Et il faut tout l’anti-américanisme primaire de certains pour croire que ceux qui ont été appréhendés armés par les alliés, Français compris, et qui sont appelés « combattant illégaux » sont innocents. Et plus encore, ajouter la plus sotte des argumentations en prétendant qu’ils devraient être libérés puisqu’ils ne peuvent être jugés, sinon par l’armée. Dans quel conflit libère-t-on, avant la fin, les soldats pris ? Churchill était-il un monstre d’avoir envoyé au Canda de 1940 à 1946 les 35 000 soldats allemands pris par l’armée britannique ? Fallait-il les redonner à Hitler sous prétexte qu’ils n’étaient pas jugés ? Et fallait-il juger chacun des prisonniers allemands en 1945 sous peine de devoir les relâcher ? 400 000 pour le seul Royaume Uni ?
Clairement, le Patriot Act européen doit peser le statut de ces djihadistes qui rentrent en Europe. Ce sont bien des « combattants illégaux ». Et les remettre dans la nature revient à leur permettre d’assassiner. D’ailleurs Barack Obama qui avait promis de fermer Guantanamo n’en a évidement rien fait : sa démagogie s’arrêta devant le fait de devoir rendre des comptes si ces fanatiques sortaient et tuaient. Et par rejet idéologique, au lieu de prendre au sérieux les raisons du Patriot Act, le gouvernement français est coupable de n’avoir pas assuré la sécurité. Ce sont des combattants et, à moins de s’assurer de leur contrôle, tout djihadiste doit être gardé en détention dans des centres de haute sécurité européens spécialisés.
Et finalement, le Patriot Act contraint toute entreprise à fournir des renseignements d’information sur des activités terroristes suspectes. Ce que l’Allemagne ou le Royaume Uni ont imposé de leur côté. Et si, avec l’agence NSA, les Etats-Unis ont développé un système de renseignement sophistiqué pour pister le terrorisme, doit-on le leur reprocher, ou bien plutôt se lamenter de l’incapacité de l’Union européenne, de se doter de telles armes ?
Le seul reproche fait par une myriade d’ignorants et d’idéologues serait que le Patriot Act permettrait de torturer et serait sans contrôle. En vérité, la torture est évidemment interdite aux Etats-Unis. Et, comme le montre le procès de la prison d’Abu Ghraib, ceux qui s’y livreraient seraient condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement. Quant au contrôle, les interventions, en particulier les demandes d’écoute, sont bel et bien sous la responsabilité d’une Cour de 11 juges (F.I.S.C.), et celui qui la préside est nommé par le Président de la Cour suprême des Etats-Unis.
La question pour l’Union européenne n’est donc pas de rejeter un Patriot Act mais bien de l’organiser avec les contrôles juridiques nécessaires pour préserver de débordements inquisitoriaux la recherche de la sécurité.

Question 4.
4.Ces tensions interrogent nos rapports avec l’islam radical, et les religions en général. En France, les élites insistent beaucoup sur « l’islamophobie », certes réelle, mais les faits recensés sont finalement peu nombreux. Nos propres tabous nous empêchent-ils de riposter efficacement ?

L’islamophobie est parfois une réalité, parfois un effet de rhétorique démagogique pour s’attirer des voix et les bonnes grâces d’une intelligentzia de gauche dont la misère de la pensée n’est plus à décrire.
Quand elle est une réalité, c’est une ignominie. Le droit de croire est un droit naturel. Avec cette limite, répétons-le, du respect de la dignité humaine. Et cette limite vaut pour toutes les spiritualités
J’ajoute que la morale rejoint l’intérêt bien compris.
Permettez moi un souvenir. A la différence d’un philosophe français qui parle beaucoup mais vit surtout dans le simulacre, j’étais vraiment ami avec le commandant Massoud, qui était né la même année que moi ce qui nous faisait sourire. J’étais ami au point d’avoir été invité à fêter la victoire avec l’Alliance du nord à Kaboul où je suis arrivé avant les troupes US et cela alors que, vous le savez, Massoud a été tué avant les terribles événements du 11 septembre. Qui était le mieux armé pour détruire les talibans ? Le musulman Massoud. Et je dois à deux pilotes musulmans de m’avoir sauvé la vie, cette vie qu’ils aimaient tant.
Les musulmans sont les premiers touchés par le terrorisme. Et les musulmans démocrates sont toujours des cibles prioritaires. Voilà le vrai. Ceux qui prétendent vouloir en finir avec les 6 millions de musulmans français et le 1,5 milliard de musulmans dans le monde sont inaptes à gouverner des nations, mais seulement à les conduire à la ruine. C’est exactement le contraire qu’il faut faire : nous allier avec ces musulmans qui, du Maroc à l’Indonésie croient, à leur façon, en l’humanité de l’humain. Et qui sont plus aptes que nous encore à traquer ces êtres mauvais qui veulent détruire la vie.

Question 5
5. Selon vous, à partir de quand les populations européennes pourraient se sentir tellement en insécurité qu’elles réagiraient sur un plan politique?

A partir du moment où les élites politiques n’assureraient pas leur responsabilité face à une recrudescence des attentats. Mais elles seraient alors remplacées par le jeu électoral.
Dans l’hypothèse, à laquelle je ne crois pas, où les partis politiques ne pourraient mettre en place une politique garantissant le premier droit naturel, et où ils ne seraient pourtant pas balayés par un jeu parti, alors il y aurait en effet constitution de groupes paramilitaires. Et le pays, voire l’Europe, plongerait dans cette dynamique recherchée par les terroristes, de chasse communautaire pour se défendre. Mais le sentiment humanitaire ancré dans nombre de consciences devrait interdire ce genre de dérive haineuse. Nul ne peut penser arrêter la haine par la haine. C’est aussi cela l’enseignement de 14-18 et de l’odieux Traité de Versailles.
Pour arrêter la haine, il faut parfois montrer sa force, et cela avec détermination, parce que, comme le disait Saint Augustin, si « les méchant font la guerre aux justes par désir, les justes font la guerre aux méchants, par devoir ». Par devoir, donc sans cruauté, sans abandonner ses valeurs, sans haine, dans un souci de paix durable qui ne peut, finalement, la victoire acquise, être fondée que sur la compréhension mutuelle, le pardon et le don sans contre don.

« Je suis Charlie » : une défaite stratégique pour la France

new-york-statue-liberte-face-big“Je suis Charlie” : une défaite stratégique pour la France

 


« Le triomphe des démagogies est passager mais les ruines sont éternelles » disait Charles Péguy. Sans doute, la France meurtrie a-t-elle besoin de rêver d’union nationale. Sans doute encore, les mots « laïcité », « république », « liberté, « fraternité », et bien d’autres, réchauffent-ils le cœur de ceux qui, par générosité, veulent croire en l’effectivité de leurs valeurs. Sans doute enfin, à l’opposé de cet esprit de Munich qui gangrène si souvent les esprits, faut-il saluer une France qui déclare la guerre à la guerre, jusqu’à descendre dans la rue malgré la menace de mort.

Hélas, trois fois hélas, « Je suis Charlie » assure seulement la France d’une défaite certaine, morale, politique et militaire. Et l’histoire retiendra que la cause en fut l’aveuglement démagogique de ses élites. En France, « Je suis Charlie » est possible, voilà le droit à la liberté. Mais la France ne doit pas être Charlie, voilà le point de vue de la responsabilité.

Union nationale avec et autour de« Je suis Charlie » ? Pour aucun esprit lucide, cela ne se peut. 45 000 manifestants à Marseille, 300 000 à Lyon lors des fameuses manifestations dominicales. Les quartiers nord ne sont pas descendus. Une exception ? La règle. Les mondes musulmans, car la pluralité s’impose, ne se sont pas mobilisés. Et certains twitts et comportements en disent plus long que les proclamations lénifiantes et quelques reportages qui tentèrent de masquer la France faillée. Ils ne voulaient pas être Charlie : voilà le fait. Et s’il fallait choisir son camp, certains, écoliers compris, étaient prêts à ne pas choisir le bon : voilà le drame. Suivre le mouvement, en laissant, à gauche comme à droite, se construire l’identification de l’Etat et de Charlie : voilà l’errance.

« Je suis Charlie » exclut les musulmans. Evidemment. Tolérer critiques, caricatures, excès même, l’immense majorité des nés musulmans, dont nombre ne sont guère croyants, y consent. Mais respecter la liberté d’expression, annihile-t-il le droit d’être en opposition avec son contenu ? Face à la représentation de leur prophète, qui, pour nombre d’entre eux, est un blasphème, sont-ils tenus d’applaudir les caricatures, de manifester derrière « je suis Charlie », d’abandonner leur droit naturel à la liberté de croyance ? Fallait-il pousser la démagogie jusqu’à renouer avec le communautarisme en exigeant ou organisant la solidarité des « musulmans de France » derrière « Charlie », ignorant que le sunnisme, majoritaire, n’a aucune centralité ni aucune verticalité, et que les islamistes ne fréquenteront pas plus demain qu’aujourd’hui les mosquées dirigées par des imams « vendus » à la France ?

En cette période d’émotion et de course aux sondages, l’intelligence semble avoir oublié cette leçon de l’histoire de l’humanité : la non reconnaissance de soi est le chemin de la haine. Avec « Je suis Charlie », la voie est ouverte aux islamistes pour recruter les esprits les plus fragiles dans les quartiers « sensibles », prétextant le mépris de la France envers l’Islam.

Plus grave encore. Par cette identification de l’Etat français avec Charlie, le gouvernement socialiste et cette cohorte d’irresponsables de tous bords qui lui a emboîté le pas, a affaibli, voire isolé, les gouvernements musulmans alliés et permis aux terroristes de se présenter comme les défenseurs de la liberté de croyance dans le monde entier. Imagine-t-on le roi du Maroc, Commandeur des Croyants, afficher son soutien à l’Etat de « Je suis Charlie » ? Imagine-t-on les généraux égyptiens qui ont tant de difficultés à tenir leur pays en dehors de la haine, alimenter les forces qui veulent les détruire ? Pour gagner la guerre, du Sahel à l’Irak, via les armes et le renseignement, le France peut-elle se passer du soutien de l’Arabie Saoudite, de la Turquie, du Pakistan et de bien d’autres encore?

Ce qui manque ? A la place des petits calculs démagogiques, une claire vision stratégique. Et d’abord, selon la grande leçon de Démosthène, celle de l’ « ennemi ». Il n’est pas le « barbare », dénomination vague digne d’une pensée plus vague encore, qui désigne une population étrangère, peu développée, qui menace un mode de vie, comme le pensaient les Grecs de l’antiquité. L’ennemi n’est pas non plus l’esprit dictatorial qui viserait notre liberté d’expression.

L’ennemi principal s’appelle « islamisme radical ». Un ennemi qui ne songe pas seulement à persécuter la liberté d’expression mais qui a un projet totalitaire : l’asservissement des populations. Un projet non seulement pour la France mais pour la planète. Et cette claire définition de l’ennemi principal appelle à renvoyer aux jardins d’enfants ceux qui prétendent refuser les alliances nécessaires pour gagner la guerre. allant jusqu’à prétendre combattre Poutine ou nos amis qataris, sous prétexte de liberté d’expression, quand Winston Churchill s’était allié à Staline pour abattre Hitler et Ronald Reagan aux islamistes pour abattre l’URSS.

Plus terrible moralement : cette irresponsabilité des sommets de l’Etat se conjugue avec la pire des dénégations françaises depuis la Libération. Car, il n’est pas vrai que l’assassinat des journalistes et policiers soit du même ordre que celui des quatre Français juifs. Et immoral qu’il puisse être englobé dans un « Je suis Charlie » qui ne hiérarchise pas l’abjection.
Devenir journaliste pour assurer la liberté d’expression et d’information, policier pour préserver la sécurité et le jeu des libertés, caricaturiste jusque dans les joyeux dessins de la provocation libertaire qui est l’un des charmes de la France, tout cela tient à un choix de vie.

Nos concitoyens juifs ont été tués non pour leur dire, leur faire, leurs idées, mais pour leur être, leur apparaître, leur exister. Derrière l’assassinat, le crime contre l’humanité, derrière ce crime, l’ombre de la Shoah. Cette ombre niée par « Je suis Charlie » qui met tout dans le même sac à malices. Et, en persistant dans l’amalgame, se lit la dénégation d’un pouvoir trop influencé par une extrême-gauche prétendue « pro-palestinienne », alimente la haine antisémite depuis des décennies.

Ainsi, est déniée la nature de la menace islamiste à laquelle veut échapper le monde juif, quitte à devoir quitter le pays.

Faute de voir l’ennemi, le chantier de fourmis de la guerre culturelle contre l’islamisme pour ré-enchanter l’univers patriotique ne peut être ouvert.

Les petits calculs sont de retour. Le Premier ministre, croyant marquer des points, pour rassurer sa gauche, n’hésite pas à dénoncer « l’apartheid » organisé contre les immigrés. La France serait-elle l’Afrique du sud de naguère ? Oublie-t-il qu’il gouverne, que son parti a gouverné, et qu’il justifie ainsi en retour les violences qu’il prétend combattre ? Car, s’il y a apartheid, alors faire parler la poudre peut être légitime. Par ce prétendu « apartheid » il ouvre la boîte de Pandore de l’islamisme radical. Hier déjà, pour satisfaire cette extrême-gauche, il avait écarté le Front national au nom de l’héritage « Charlie». Au lieu de conduire ce parti à manifester dans l’union, ruinant la diatribe « anti UMPS », son gouvernement a alimenté la posture d’exclu et de victime du F.N. qui, en retour, fait signe aux exclus sociaux dans un processus de ressemblance-identification-mystification particulièrement fort dans les classes populaires et la jeunesse.

Symptomatiques de cette gouvernance démagogique où plaire est le premier souci et la navigation à vue l’art de la politique : les appels à plus de police, de lois, de contrôle tout comme la prétention pathétique de vouloir enseigner les grandes spiritualités. Si l’Islam est enseigné, pourquoi pas le bouddhisme, l’hindouisme, le confucianisme, le taoïsme, le shintoïsme le luthérianisme, le calvinisme…? Et si guerre il y a, au lieu de mesures sans efficace, ne faut-il pas repenser l’organisation de la sécurité publique, ses relations avec les entreprises privées, développer les partenariats internationaux, renouer les liens au Moyen-Orient, frapper les ennemis à l’intérieur comme à l’extérieur, adopter une législation qui permette de mettre hors d’état de nuire ceux qui nous font la guerre ?

Entre le refus de toute législation patriotique d’un côté, de l’autre, l’absence de réflexion sur les causes profondes qui ont conduit au désarroi moral, la confusion finale est au bout avec l’incapacité de mobiliser les patriotes de toutes origines autour des valeurs universelles de la France, de son mode de vie sucré et de la recherche de sa puissance. La bataille de France ? Il faut la mener, avec tous nos alliés, des Etats-Unis au Japon, tous menacés. Et il faut d’abord la mener en France. Au lieu de « Charlie » qui divise, choisissons Charles de Gaulle. Pour gagner la guerre, il savait la nécessité de construire « l’unité de la France déchirée ».

 

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Entretien dans Valeurs Actuelles

 

Entretien avec Yves Roucaute, fondateur de Contemporary Bookstore, une maison d’édition numérique française.

 

V.A. « Vous venez de créer Contemporary Boosktore qui engage une révolution dans l’édition. Vous délaissez complètement l’édition papier au profit du numérique. Vous vendez à des prix plus bas que les éditeurs traditionnels. Vous donnez 70% de droits aux auteurs et ceux-ci choisissent leurs prix de vente. Est-ce une déclaration de guerre aux éditeurs traditionnels ou aux diffuseurs comme Amazon ? »
Y .R. : Nous sommes une jeune entreprise internationale portée par un groupe d’écrivains, journalistes, universitaires, experts en technologies, déterminé à faire entrer l’édition dans le monde numérique. Mais nous voulons la faire entrer par la porte éthique. Dans le nouveau monde, la richesse se trouve dans la création et donc le respect des créateurs s’impose. Romans, cours universitaires, contes, ouvrages philosophiques, scientifiques, historiques, théologiques, nous avons pris l’engagement de diffuser les créations au niveau international et de contribuer au développement par la distribution gratuite des savoirs aux populations démunies, en particulier en Afrique. Une morale qui ne s’oppose pas à l’intérêt.
Nous pensons, en effet, que le métier de l’édition imprimée et celui de l’édition numérique ne sont pas les mêmes. Ils peuvent cohabiter, nous avons même des accords avec des éditeurs traditionnels, mais ils diffèrent sensiblement. Nous donnons 70%, sauf pour les travaux universitaires, car si certaines pratiques étaient peut-être légitimes quand le livre était du livre-papier, les coûts et les risques du numérique n’ont rien à voir avec ceux du papier. Donner 12%, 10%, 5% voire rien pour les œuvres numériques, nous a paru contestable. Et pour résister à la vague qui les emporte inexorablement, car le monde de Gutenberg est moribond, certains éditeurs feignent même de détenir les droits numériques de livres qu’ils n’ont pas. Car la plupart des contrats d’avant 2011 en France sont caduques en raison de l’évolution de la loi et des accords-cadres. Les contrats qui ne mentionnent pas expressément le prix du livre numérique, ses conditions de vente, le temps de validité du contrat n’ont aucune valeur juridique. Ce qui fait que 95% des auteurs ne sont pas sous contrat numérique.
Du côté des grands diffuseurs numériques, des marketplaces, nous comprenons mal que la loi anti-dumping ne s’applique pas. Car la numérisation a un coût et à Contemporary Bookstore nous constatons que les livres ne se numérisent pas tout seul. Or, certains diffusent gratuitement des ouvrages numériques ou les proposent à perte pour occuper le marché, tuer la concurrence et vendre d’autres produits. C’est en effet le cas d’Amazon. Et nous sommes aussi étonnés de voir Amazon vendre des ouvrages à partir de droits qu’elle n’a pas, sans même demander l’autorisation aux auteurs. Tout cela ne vaut pas que pour la France.
Certes, certains éditeurs se sont entendus avec certaines firmes comme Amazon pour maintenir leurs marges. Mais l’addition de deux entreprises qui violent les droits numériques et méprisent les créateurs ne fait pas une règle de droit. Et, moins encore, une règle morale.
Nous croyons, pour notre part, que le temps où les conditions de publication et le prix des ouvrages ne se négociaient pas avec les auteurs est révolu. Cette vision verticale du management n’est pas la nôtre. Les auteurs décident de la numérisation, de la forme du livre et du prix avec nous.
VA. « Vous êtes écrivain et philosophe, votre projet éthique ne va-t-il pas contre votre projet industriel ? N’aurez-vous pas besoin d’ouvrir votre capital ou de chercher des aides pour assurer le développement ? »
Y .R. : Tout est possible. Mais nous sommes sur un projet rentable et éthique auquel nous croyons. Nous y croyons au point d’avoir décidé que les fondateurs ne seraient pas rémunérés. Et au point, par exemple pour moi, de publier sur Contemporary Bookstore mes trois derniers livres, mon opuscule sur les Origines chrétiennes de la démocratie libérale en Europe et mes deux livres sur l’Histoire de la philosophie politique du néolithique à la fin du Moyen-Âge. Ce qui s’ajoute à la publication numérique de l’Eloge du mode de vie à la française. D’autres actionnaires, tels Ivan Rioufol ou Jean-Jacques Roche ont fait un choix similaire ainsi que les amis qui nous ont rejoint dés le départ en France, tels André Nahum, Michel Fromaget, Manuel Cordouan, Jacobo Machover, Jean-Louis Nacef Nakbi et bien d’autres. Ils ne craignent pas de se balader entre Arsène Lupin et Sherlock Holmes.
Malgré ou grâce à notre éthique, nous vendons quand même nos livres numériques sensiblement moins chers que les autres, sauf quand il y a du dumping. Bientôt, nous vendrons d’autres produits, telles que les liseuses ou les tablettes. Et nous avons une perspective de rentabilité très forte à l’horizon de trois ans.
Et nous n’acceptons de partenaires que parmi ceux qui savent que pour Contemporary Bookstore la diffusion mondiale des savoirs est un devoir naturel. C’est, selon nous, la meilleure aide pour contribuer au développement durable de l’humanité. Car la solution pour soulager durablement les souffrances est de distribuer les savoirs, en direction plus particulièrement des enfants, des micro-entrepreneurs et des collectivités territoriales. Défendre la création, la diffuser, aider les plus démunis : c’est notre morale et c’est notre concept. Et nous pensons que la morale rejoint l’intérêt particulier et, celui-ci, l’intérêt général, comme le pensait John Locke. À l’inverse, en appauvrissant le créateur, non seulement on freine son énergie mais le développement de l’humanité
V.A. « Quelles sont vos perspectives de développement ? »
Y .R. : Le développement dépendra de nos résultats d’exploitation, de nos partenariats et du marché corrélé au développement technologique.
À l’horizon de 3 ans, nous avons en vue les marchés dans huit langues. Cela représente plus d’un milliard de clients potentiels. Nous voulons faire entrer les œuvres, sous toutes leurs formes, dans l’ère numérique. Et vendre aussi, bientôt, des produits à forte valeur ajoutée, des cours en ligne aux liseuses et tablettes.
En ce qui concerne le marché visé, nous avons fait au départ le choix du marché anglophone et francophone, et, à présent, du marché hispanophone. L’explosion de la seule vente des livres numériques aux Etats-Unis est une indication certaine que nous sommes sur les bons rails. Le potentiel est immense. Et nous sommes engagés dans ces négociations avec des partenaires en Chine et en Afrique de l’Ouest.
Pour cela, nous allons dans deux directions. D’abord vers l’appropriation des avancées technologiques pour une capacité de diffusion nomade et mondiale efficace. Nous avons privilégié, dans la première étape, la production de livres numériques et les zones de langue anglaise, française, avec l’ouverture, depuis quelques jours, à l’espagnol. Mais nous avons besoin d’aller beaucoup plus loin dans l’utilisation des technologies nouvelles pour le e-learning, par exemple, et nous sommes en train de construire des partenariats pour assurer une dynamique numérique avec ses réseaux d’interactions.
Nous allons aussi vers des partenariats pour les traductions et la diffusion car de nombreuses œuvres sont accessibles seulement dans certaines langues, dites « rares », sous une forme passive et sur certaines zones géographiques couvertes par l’internet. Nous allons trouver des accords pour mettre les œuvres à la disposition du plus grand nombre.
VA. « Quelles sont les difficultés rencontrées et votre perspective de rentabilité face à la concurrence ? »
Y .R. : Si le marché est immense et en expansion, avec le développement technologique qui amène de nouveaux clients, environ un tiers des ventes aux Etats-Unis de livres passent par le numérique, la première difficulté vient de ce que ce marché est aussi logiquement de plus en plus concurrentiel. Or, le pari sur la qualité de nos produits ralentit le développement de notre exposition face à une concurrence qui n’a pas toujours le même souci. Ainsi, nous avons une centaine de livres en attente de diffusion plutôt que de les offrir précipitamment à la vente sous les différents formats.
Mais, ce choix présente néanmoins un avantage. Il rassure les auteurs sur la qualité et la pérennité de leurs œuvres, pour leurs enfants par exemple. Et nous leur donnons aussi la possibilité d’améliorer leur travail après publication et pas seulement avant, ce qui permet une offre qui s’adapte mieux à leurs désirs et, aussi, aux demandes. Cette qualité et cette souplesse que nous offrons déjà aujourd’hui n’a pas d’équivalent.
Il existe des difficultés propres aux technologies. Nous avons sécurisé nos produits sous la direction de l’un de nos actionnaires, Michel Riguidel, inventeur du tatouage. Mais cela reste évidemment toujours à recommencer. Nous testons aussi des produits pour le projet d’éducation-Afrique. La mise en place du e-learning présente en effet des difficultés, d’où la réflexion sur les partenariats. Nous pensons néanmoins parvenir rapidement à une solution, ne serait-ce que parce que les cœurs de métier du e-learning sont aussi ceux d’une partie de l’actionnariat.
Il y a des difficultés plus conjoncturelles. Nous nous heurtons non seulement au dumping mais, dans certaines zones, à certains problèmes sur la question des droits. Dans le monde anglo-saxon mais aussi parfois dans les pays hispanophones, le jeu des agents, qui voient leurs marges fondre, consiste plutôt à s’opposer au processus numérique en jouant à fond le livre papier. Mais cela ne durera pas car avec le développement des ventes numériques les auteurs vont prendre conscience des enjeux et avoir de nouvelles exigences. Et nous avons, d’ailleurs, un bon espoir de développement sur le marché hispanophone où le droit est favorable aux auteurs car la validité des contrats y est généralement restreinte à un seul pays et leur durée est relativement courte, à la différence du droit français très archaïque, qui protège le vieux monde plutôt que la création.

Inégale valeur des civilisations?

Entretien avec Marc Cohen, 16 octobre. publié dans Causeur.

Entretien sur l’inégale valeur des civilisations

Entretien avec Marc Cohen, pour Causeur, 16/10/2013 : Comment avez-vous pris connaissance de « l’affaire » ? 

De façon assez drôle. Ce mardi 7 février, j’avais exceptionnellement quitté mon bureau de la    place Beauvau, au cabinet de Claude Guéant, assez tôt, en fin d’après midi. J’avais pris ma voiture plutôt que celle du cabinet pour aller à une réunion discrète, je n’ai pas dit secrète (sourire). Les téléphones étaient éteints. Quand je suis sorti, j’ai constaté qu’il y avait eu beaucoup d’appels en absence et immédiatement le téléphone a sonné. J’ai répondu. Il s’agissait d’un journaliste que je connais et qui me dit tout de go  « Salut Yves, tu pourrais répondre au téléphone quand tu mets le b. dans le pays et me prévenir en premier. » J’ai cru à une plaisanterie sur le livre, Eloge du mode de vie à la française, que je venais d’écrire et de lui envoyer, dédicacé à la mémoire des Arméniens morts pour la France. Je lui ai donc répondu « Je vois que tu es encore la victime consentante du lobby anti croissant et anti arménien du Monde (…) ».  Il rit et comprit que je n’étais pas informé de ce qui s’était produit l’après midi à propos du discours que j’avais écrit, prononcé par Claude Guéant le 4 février devant le syndicat étudiant l’U.N.I. Il me raconta l‘accusation ubuesque de nazisme par un cancre, nommé Serge Letchimy, et le départ non moins ubuesque des députés de l’UMP de l’Assemblée nationale.

Comment savait-il que vous étiez l’auteur du discours ?

A vrai dire, il n’était pas le seul à le savoir. Je ne sais d’ailleurs pas si c’est « Le Monde », « Le Figaro » ou l’AFP qui a donné cette info le premier. J’ai même été contacté par la chaine du Sénat. C’était un secret de polichinelle. D’abord les journalistes qui suivaient Claude Guéant savaient que j’étais entré dans le cabinet pour les discours stratégiques. Et ce discours avait donné lieu à des discussions préalables entre les dirigeants de l’U.N.I. et moi. Donc, beaucoup de monde savait. Bien entendu, il arrivait à Claude Guéant, qui a une forte personnalité et une grande intelligence, de faire des digressions, de rajouter ou d’enlever des phrases, mais pas sur les discours écrits donnés à la presse. Il est vrai que j’ai appris plus tard que ce discours n’avait pas été donné à la presse sous la curieuse pression de François Fillon (rires). Et puis, cette phrase est tirée de mon livre publié au même moment. Il suffit d’ouvrir mon dernier livre page 21 : « les civilisations ne se valent pas ; Celles qui défendent l’humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient ; Celles qui défendent la liberté, l’égalité et la fraternité nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique ; le respect de la dignité humaine ne se négocie pas ». Cette phrase était d’ailleurs déjà dans un livre que j’ai publié, il y a une dizaine d’années. Pourquoi aurais-je nié ? C’est absurde. Les journalistes enquêtent, savent lire et détestent, à juste titre, qu’on leur mente.

Avez-vous été surpris par la polémique, où l’aviez-vous senti venir en écrivant le discours ?.

Ce fut incroyable, le vice appuyé sur le bras de la bêtise conduisait à une crise politique sans précédent. J’ai vu émerger une haine incroyable.

Certes, dans les rangs socialistes même, chacun s’accorde  sur l’inculture du pauvre Serge Letchimy, qui lança sa dénonciation de nazisme à l’encontre de Claude Guéant et de toute la droite républicaine.  On connaît les lumières de cet élu qui se dit « fils d’esclave », sachant que l’esclavage a été définitivement aboli en 1848 et que lui-même est né en 1953 : non seulement il a découvert la formule cachée du nazisme chez tous ses opposants qui dénoncent les atteintes aux droits humains par certaines civilisations mais aussi celle de la fontaine de jouvence. Et le pauvre ère ignore même que l’esclavage a été aboli sur la terre de France dés le Moyen-Âge et que son abolition dans les îles au XIXème siècle ne doit rien à la gauche.

Mais ce fut évidemment une décision politique du groupe socialiste. Clairement, les socialistes lancèrent cette crise par pur cynisme, tentant de sauver les meubles et croyant ainsi pouvoir coller l’accusation de collusion du F.N. avec l’U.M.P. pour effrayer le centre. Comme ils le font souvent. Ils eurent tort. ils ont entraîné une grande haine contre la droite républicaine dans leurs rangs, haine qui, à moyen terme rendra difficile la possibilité dun Front républicain face au F.N. Car à force d’insulter et de jeter l’anathème sur les républicains de droite, je ne vois guère comment on peut justifier ensuite une quelconque alliance.  D’autre part, comment pourra-t-on empêcher électeurs de droite et du centre, et de gauche même par capillarité, à voter F.N.?  Si l’UMP c’est comme le FN, alors le F.N. c’est forcément comme l’UMP. Par calcul à courte vue, faute d’intelligents politique, pur un plat de lentilles électorales, la gauche dédiabolise le F.N. chaque jour. Et elle lui ouvre le chemin du pouvoir.

C’était sinon un piège tendu aux socialistes. Mais ce n’était pas le premier et ce discours n’était pas le plus provocateur de ceux que j’avais écrit, loin de là. Je ne pensais donc pas que ce piège fonctionnerait à merveille. Je ne pensais pas non plus que le personnel politique de la droite républicaine était à ce point pleutre qu’il aurait peur de la tactique de Matamore d’une gauche en débandade qui hurlait d’autant plus que la plupart des députés socialistes étaient d’accord avec moi. Tout cela tourna rapidement en farce drôle et pitoyable.

Nicolas Sarkozy pensa d’ailleurs, à juste titre, que c’était la première victoire depuis son élection à la présidentielle. Mais, comme souvent,  il fut bien seul. François Fillon, malheureusement, n’eut pas ce sens politique. Sans doute est-ce l’un des multiples symptômes que nous avons un recrutement du personnel politique de droite qu’il faudrait revoir.

Et si ce fut une victoire écrasante, elle fut donc très momentanée. Les sondages nous furent pourtant immédiatement clairement favorables à plus de 70%. .

Notre victoire idéologique était donc sans appel et d’une importance stratégique car elle renvoyait le P.S. au relativisme moral et à l’incapacité d’agir en pleine période de crise où les gens ont besoin d’un capitaine et de repères culturels. D’autant que François Hollande, qui n’avait pas compris la manœuvre, refusa de désavouer celui qui était appelé par certains députés UMP « le cadeau de Martinique », d’autres plus méchants, disaient « le cancre de Martinique ».

Et qui, dans le  pays, pouvait en effet croire que toutes les civilisations se valent ? Qui pouvait même croire qu’elles n’existent pas comme bientôt ce fut l’élément de langage dominant du P.S. , avant la débandade de l’UMP ? Certainement pas les socialistes qui avaient jadis, alliés aux radicaux, profiter de ce fait pour justifier l’injustifiable, les grandes colonisations sous la IIIème République que le fameux députés martiniquais semble ignorer. Sans même évoquer leur gestion déplorable de l’Afrique du nord, sous la IVème république.

Le plus intéressant pour nous, à mon sens, car j’étais là pour mener cette bataille idéologique comme le font aux Etats-Unis au sein du parti républicain mes amis néoconservateurs, était que les socialistes se coupaient de la plus grande partie du monde intellectuel. Car la conséquence de cette position idéologique conduisait à soutenir des propositions absurdes, comme c’est toujours le cas lorsque l’idéologie est poussée au bout.

Si parler de civilisations était la marque du nazisme, alors tous les universitaires se trouvaient plus ou moins nazis, tous ceux qui travaillaient dans les départements d’étude des civilisations dans les universités du monde, ceux qui avaient apprécié le grand historien français Fernand Braudel et sa Grammaire des civilisations, ceux qui travaillaient sur les civilisations passées.

Le P.S. s’isolait de sa force de frappe culturelle.

Allez donc expliquer que tout se vaut à ceux qui travaillent sur les Incas, dont la civilisation pratiquait les sacrifices de masse les jours de fêtes et préférait brûler vif, étrangler ou enterrer vivants les enfants ? Ou à ceux qui travaillent sur les Aztèques, cannibales qui pratiquaient des sacrifices quotidiens, le cœur des suppliciés étant arraché pour assurer le lever du soleil et les enfants particulièrement recherchés pour être noyés afin d’appeler les pluies ? Aller expliquer cela à ceux qui travaillent sur la civilisation maya : tous les matins devait dégouliner assez de sang le long des pyramides pour qu’il nourrisse la terre et les enfants périssaient sous de savantes tortures car ils croyaient que leurs larmes amenaient les pluies.

Tous les chercheurs, plutôt à gauche, savent la supériorité des civilisations fondées ou refondées sur les droits et devoirs de l’humanité contre cet esprit sacrificiel et ce goût pour la mise en esclavage, les pillages, les massacres et les rites mutilants largement répandus dans le monde, à partir des âges des métaux, de la civilisation maori de Nouvelle-Zélande à celle des Iroquois. Pas un historien sérieux, eux aussi majoritairement à gauche, n’ignore la civilisation romaine qui pratiquait l’esclavage et les jeux du cirque où la population criait « jugurta » (égorge) un gâteau au miel dans la main.

Et aujourd’hui, quel anthropologue ou sociologue peut juger que les civilisations du Mali à la corne d’Afrique qui infibulent entre 100 et 140 millions de femmes valent les civilisations qui l’interdisent ? De la civilisation japonaise aujourd’hui à la civilisation nord-américaine, les civilisations fondées sur l’interdiction du sacrifice et le respect du droit naturel de l’humanité, valent assurément mieux que celles qui s’y opposent, tel est le credo le plus répandu chez les intellectuels.

Le plus drôle dans cet étalage d’ignorance de nos élites politiques issus d’une haute administration la plupart du temps dénuée de culture, car les socialistes ne furent pas les seuls en cause quand on songe à la tournure prise par cette affaire, c’est que si toutes les civilisations se valent pourquoi fallait-il s’opposer au nazisme qui prétendait justement proposer une nouvelle civilisation, celle du IIIème Reich ? Je sais pourquoi mon père a pris les armes contre le nazisme et je sais aussi pourquoi les ancêtres relativistes de Serge Letchimy n’ont pas trouvé que la défense d’une civilisation qui défend les droits et devoirs humains contre un projet de civilisation qui les nie, valait la peine de risquer sa vie, ni même sa carrière. Serge Letchimy avait au fond retrouvé naturellement le réflexe de ceux qui collaborèrent avec le nazisme comme de ceux qui acceptèrent de collaborer avec le colonialisme le plus abject comme on le vit lorsque la gauche française robespierriste avait rétabli l’esclavage à Saint Domingue en 1801 : si tout se vaut, alors pourquoi risquer sa vie?

En vérité, je crois, pour ma part, que précisément ces civilisations inférieures sont condamnées par l’Histoire. C’est pourquoi elles disparaissent et c »est très bien. Nous allons vers la convergence des civilisations entrainée par les grandes spiritualisés qui l’ont emporté et qui ont mis au coeur de leurs valeurs l’amour du prochain comme je crois avoir commencé à le démontrer dans mon livre « Vers la Paix des Civilisations ».

A mon grand étonnement, sur un piège si simple à éviter, le P.S. qui venait de perdre une bataille idéologique majeure en révélant sa véritable nature : non pas le parti des opprimés, des minorités ou des faibles, encore moins celui de ceux qui croient aux valeurs universelles d’origine judéo-chrétiennes, mais celui des sommets de la bureaucratie française qui veut le pouvoir pour le pouvoir et gouverne avec cynisme sans se préoccuper des valeurs au point de juger que tout se vaut si une carrière est possible.

Bref, nous avions gagné Austerlitz, il suffisait de planter notre drapeau. Mais, le plus croquignolesque c’est qu’au lieu de cela,  l’armée des vainqueurs a été reconduite par certains de ses chefs dans ses casemates, la tête basse.

Tes détracteurs vous ont-il demandé votre avis avant de pourrir par voie de presse?

Tout est allé très vite. Car après l’incroyable erreur stratégique du P.S. on assista à une plus incroyable débâcle de l’UMP. Imaginez un mascaret d’équinoxe imprévu qui déboule en quelques heures sur un fleuve puissant ! Je fus pris dans ce reflux dans les heures qui suivirent.

Claude Guéant, qui a un sens de l’Etat indéniable et une fidélité remarquable en ses engagements, à la demande de François Fillon qui paniquait devant le flux médiatique de gauche, me demanda de ne pas intervenir publiquement alors que je me dirigeais vers le seul média qui demandait alors des éclaircissements, la courageuse chaine du Sénat. À la place, je fus chargé d’écrire une réponse de Claude Guéant qui serait rendue publique. J’ai trouvé l’idée très bonne et j’ai immédiatement négocié avec un quotidien, qui accepta la proposition. Je déclinais donc finalement l’invitation d’aller m’expliquer sur la chaine de télévision, ignorant encore l’ampleur de l’incroyable débandade idéologique à droite.

Je n’étais d’ailleurs pas le seul à l’ignorer. C’est un autre côté amusant de cette affaire.  Chez certains intellectuels, le premier mouvement a été plutôt une course à qui s’approprierait mon texte. Même mon ami André Comte-Sponville, qui était déjà avec moi quand je dirigeais l’Union des Etudiants Communistes de la Sorbonne, a voulu sans doute être plus près encore de moi et a écrit qu’il était peut-être l’auteur de la formule. Et Luc Ferry, que j’apprécie beaucoup aussi, a renchéri en envoyant un communiqué à l’AFP. Cela n’a pas duré longtemps (rires).

Tous sans te citer alors que c’était devenu de notoriété publique?

Tous sans me citer, bien sûr. Je passe sur quelques autres intellectuels. Puis, soudain, ce fut le silence. La vague scélérate, ainsi que disent les marins, était arrivée.

Une partie de la presse, des blogs et des réseaux sociaux influencés par le P.S., envoya immédiatement l’artillerie contre Claude Guéant et moi pour prétendre que ce parti était dans son bon droit de nous traiter de nazis. Ce qui n’était pas étonnant même si je trouve peu déontologique d’attaquer des gens sans leur offrir la  possibilité de répondre, et, trop libéral peut-être, je n’aime pas les procès à la presse. Mais, du côté de la presse neutre et de celle qui était plutôt favorable à nos idées, la débandade de l’UMP alors qu’elle venait de gagner la bataille rendait tout illisible. Entre les consignes des uns et l’incompréhension des autres, le silence régna sur l’une et l’autre colonne.

Les choses s’éclaircirent pour moi rapidement : j’avais écrit l’article dans la nuit pour Claude Guéant mais celui-ci m’indiqua trois jours plus tard qu’il avait reçu la consigne de ne pas le publier. Claude Guéant, qui avait donné sa parole de toujours respecter les décisions du Premier ministre, et qui a un grand de l’honneur et du respect de la hiérarchie, n’a pas voulu passer outre à cette volonté du Premier ministre. Ce que je comprends car sans honneur  que valons-nous?

Je me retournais vers l’Elysée. L’Elysée me félicita une fois encore et tenta de me convaincre de rester dans le cabinet Guéant. J’ai obtenu des promesses, d’ailleurs non tenues pour la plupart (rire), mais je m’y attendais, et j’ai accepté pour poursuivre le plus important : cette bataille des idées en conjonction avec mes amis, élus et non élus. Ce qui me conduisit à écrire d’autres textes stratégiques pour Claude Guéant, et pas seulement (sourire), et à développer le cercle d’intellectuels créé pour aider Nicolas Sarkozy, dont le secret a été en partie éventé par la presse.

Quid de la défense de Guéant. Et de celle de l’UMP ?

La défense de l’UMP a été calamiteuse. Austerlitz a été gagné et on a oublié de planter le drapeau… L’UMP souffre, plus que le PS, d’une absence remarquable de pensée structurée. Cette affaire en a montré l’ampleur. Où sont les Reagan, les Thatcher, les Merkel ?  Il ne faut pas les chercher, il n’y en a pas. Seul Nicolas Sarkozy, homme d’intuitions mais non de concept, a la volonté qui aurait permis d’afficher la victoire. Mais il est malheureusement un peu seul sur ce sommets désertés par la pensée et cette solitude ne lui permet pas de mener à bien toutes les batailles, y compris celle de la présidentielle.

Une des raisons de la débandade, c’est que la plupart des dirigeants sont en effet incapables de défendre une position juste car ils sont eux mêmes relativistes ou dénués de culture fondamentale. Et ceux qui pourraient intervenir sont empêchés par ceux qui ne le peuvent pas. C’est la prime au premier de la classe en droit public, à condition d’être dernier en culture générale et dénué de toute imagination avec ce zeste de suffisance qui tient au classement de l’E.N.A.

Il suffit de lire les réactions. L’énarque Juppé proclame le propos de Guéant « inadéquat », le diplômé de droit public François Fillon indique qu’il n’aurait certes jamais prononcé des telles phrases, la débandade fut quasi générale, jusqu’à mon ami Jean-Pierre Raffarin lui-même, sans doute pour régler un vieux contentieux avec Guéant, qui avait feint de croire que les civilisations n’existent pas.

Certes, dans cette réaction, il y a souvent une part de calcul politique. La droite ce n’est pas une meute mais dix meutes. Alain Juppé savait que la victoire de Nicolas Sarkozy signait la fin de ses espoirs d’être à nouveau un jour Premier ministre puis Président. François Fillon,  qui avait trainé les pieds sur maintes réformes, savait qu’une victoire de Nicolas Sarkozy signifiait la même fin de ses ambitions. La suite démontra qu’il convient de se garder de ses « amis «  et à cet égard. Claude Guéant aurait peut-être pu négocier pour obtenir un feu vert et foncer au lieu de se laisser malmener. Il aurait été applaudi après coup. Et il aurait gagné sa députation en se donnant une image qui n’était pas celle, extrémiste, qui fut imposée par la gauche dans une circonscription où le centre est si puissant, une image qui ne correspond en rien à ce qu’il est car il est profondément gaulliste et d’un gaullisme plutôt centriste.  Mais, une fois encore, je condamne rarement ceux qui sont fidèles à leur parole quand les hautes valeurs morales ne sont pas en cause.

Mais, ce qui joua plus encore pour tous ce fut la conjugaison de la peur de la gauche avec l’ignorance et l’origine sociale de cette élite. Car aucune autre droite dans les pays développés n’a un tel mépris des intellectuels et ne recrute la majeure partie de son haut personnel politique dans les cercles de la bureaucratie.

Avec cet effet pervers : les relations avec la gauche bureaucratique deviennent ambigües et les seuls intellectuels mis en valeur par la presse étant les intellectuels de gauche, lorsque la droite veut une légitimation idéologique, ce qui est toujours une nécessité, elle se tourne logiquement vers eux. D’où l’importance accordée aux Edgard Morin et Bernard-Henry Lévy dont les qualités ne sont pas en cause mais comment pourraient-ils offrir une vision d’avenir à la droite alors qu’ils se sentent de gauche ? Même si pour ma part, aussi bien proche de Tony Blair que de G.W.Bush, je trouve ces catégories bien désuètes et presque infantiles.

D’où, en tout cas, pour cette droite, l’incapacité à gagner les batailles idéologiques les plus faciles, comme sur cette question des valeurs. D’où l’apparence de lâcheté de certains dirigeants qui préfèrent leur carrière au pays et craignent moins de ne pas obéir aux valeurs qu’ils ignorent, qu’aux réflexes de prudence bureaucratique. Ne pas penser à un prix. Nicolas Sarkozy saura-t-il en tirer les leçons ? Cette affaire l’a encore démontré : la défaite de la pensée prépare toujours la défaite politique. Et si Nicolas veut revenir, et si, en admettant qu’il le puisse, il veut laisser une marque dans l’histoire, il lui faudra s’entourer de gens qui ont une vision de la France et du monde à l’heure de l’Internet 3, de la mondialisation et de la Puissance d’humanité. Ce n’est pas gagné (rires).

 Comment expliquez-vous que certains passages plus raides du discours que celui dont tout le monde a parlé, n’aient pas été mis en cause par les médias ! ( « La maison de France n’est pas une maison de tolérance » p.4) ou sur l’historiographie disons rapide du fascisme et du nazisme , tous deux déclarés enfants naturels du socialo-communisme?

Oui, j’ai déjà tenté de démontrer dans un autre ouvrage que je suis en train de republier, que les origines du fascisme se trouvent bien à gauche.

Créé par le socialiste Mussolini, qui dirigeait la gauche du Parti socialiste italien et était majoritaire dans le parti, le mouvement fasciste a entrainé l’ensemble des dirigeants des syndicats ouvriers, de l’industrie et de l’agriculture. Il y a un dialogue très intéressant entre Mussolini et le dirigeant communiste Antonio Gramsci à l’assemblée nationale qui éclaire le processus. Et le premier programme du parti fasciste, élaboré d’ailleurs avec une envoyée de Lénine, est conforme aux canons socialistes. La formule en exergue de son journal « Il Populo d’Italia » est d’ailleurs de Blanqui. L’opposition avec les communistes tient au fait que les fascistes italiens reprochent aux communistes de ne pas voir l’intérêt de la classe ouvrière italienne mais celui de Moscou. Et aux socialistes : ne pas vouloir vraiment la révolution nationale et socialiste.

Ce processus est identique dans tous les pays du monde européen, sans exception. Ce sont des dirigeants de gauche qui créent les partis fascistes et nationaux-socialistes (nazi). Le parti national socialiste allemand d’Hitler, né du Parti des Travailleurs Allemands,  de l’extrême-gauche, n’échappe pas à la règle dans sa formation et son programme de nationalisations et d’étatisations, jusque dans le plan de 4 ans de Goering, dont Goering, et il s’est réclamé du léninisme jusqu’à la fin des années 20, dit lui-mêmeu’il est influencé par la planification de Staline. En France même, le communiste, député maire de Saint Denis, Doriot, crée un puissant parti nazi, et le député socialiste Déat, un parti fasciste. Et ils font les mêmes reproches aux communistes : être inféodés à Moscou. Et le même reproche aux socialistes : ne pas vouloir vraiment la révolution nationale et socialiste.

Il faut s’appeler Serge Letchimy pour fendre de l’ignorer. Et d’ailleurs, une des caractéristiques de ces partis a toujours été, comme Serge Letchimy, d’insulter et de diffamer les adversaires, et d’appeler la haine sur eux au nom du prolétariat et des opprimés. Leur style violent dit leur fond. Y compris contre les juifs : l’antisémitisme nazi est en effet un antisémitisme de gauche. Alors que celui de droite part du sol et conduit souvent à l’expulsion et aux expropriations, celui de gauche dénonce dans le juif « le gros », « le riche », l’exploiteur et conduit à l’extermination totale sous prétexte de détruire totalement la bourgeoisie et les valeurs juives responsables de l’exploitation. Cela se voit chez les blanquistes qui inventent l’idée d’une race aryenne contre les juifs, dans leur journal « Candide » et leurs écrits qui seront repris par leurs disciples. Serge Letchimy, par son style violent, est plus proche de ces mouvements qu’il ne le croit.

Mais j’arrête là car je me suis longuement expliqué dans dseux ouvrage La République contre la Démocratie et  Les Démagogues sur cette histoire de la naissance et du développement du fascisme ainsi que sur le léninisme et le stalinisme.

Pourquoi dans ce discours, n’allez-vous pas au bout de votre pensée sur la France? Il suffit de feuilleter votre « Eloge du mode de vie à la française » pour voir que vous pensez que notre modèle est supérieur, non seulement aux aberrations du tiers-Monde, mais aussi, au modèle US ou allemand : les Gaulois, l’assimilation, le jambon beurre ( !!!!!) et même le café théâtre…

Je pense que la France dispose d’un modèle d’identité nationale qui est celui qui porte l‘avenir de l’humanité : une nation fondée non sur le sang mais sur l’appartenance à une société fondée autour des valeurs et habitant sur un lieu. Cette révolution qui a commencé avec Clovis est en effet pour moi la marque d’une avancée de l’humanité vers son destin : reconnaître en elle sa commune humanité. C’est pourquoi je suis fermement opposé à l’abandon du droit du sol que propose François Fillon.  Et c’est pour moi un casus belli.

En ce sens, sur ce point, je dis clairement que le modèle français est supérieur à tous les autres, à l’exception de ceux qui l’adoptent.

Mais je ne pense pas que notre modèle soit supérieur à celui des autres démocraties sur tous les points. Ainsi, en matière de civilité, je pense que le modèle japonais est plus avancé même si sur la place des femmes il est en retard. Je pense que le modèle des Etats-Unis est plus avancé en termes de libertés du corps,  de protection de la propriété et de liberté de la presse, mais moins en termes de protection des déshérités faute d’avoir pensé l’Etat compassionnel.

En fait, à la différence des relativistes, j’ai des critères que je crois clairs et une pensée structurée autour de valeurs et indications léguées par la grande tradition judéo-chrétienne.

L’ennemi idéologique est très clairement identifié : ce sont les trois idolâtries de la modernité : celle de l’Etat, de la Science et du Marché. A partir de ce qui va dans le sens de l’humanité de l’homme, dont j’ai posé les critères dans La Puissance de la Liberté puis La Puissance d’humanité, se dégagent des lignes d’orientation qui permettent de juger la valeur d’une civilisation et son état d’avancement vers l’amour universel des humains.

Or, la France, quand elle est fidèle à elle-même, quand des chefs éclairés la conduisent, a cet avantage sur les autres Cités : elle est vaccinée contre les trois idolâtries. Encore faudrait-il qu’elle secoue sa bureaucratie et retrouve sa joie d’être elle-même.

Quel intérêt de faire de la politique si on rêve pas de devenir conseiller général ou président de la République? Surtout à droite compte tenu de leur détestation quasi-unanime de la réflexion idéologique

La politique est un devoir quand bien même la scène politique est occupée par des ignorants, ce qui, depuis la démocratie athénienne n’est quand même pas un phénomène totalement nouveau (rire). Ma première thèse portait sur Aristote. Et je tiens de cette passion de jeunesse pour Aristote que tout citoyen a le devoir de s’intéresser à la politique. Or, il n’est pas possible de s’y intéresser à partir de grands modèles dans son bureau car, contrairement à ce que pensent certains universitaires, celle-ci n’est pas une science mais un art. Et cet art est un grand art, qui appelle la morale et la métaphysique sur un espace délimité avec d’autres humains. Quand bien même cette cité est gouvernée par des ignorants, chacun doit donc participer en tâtonnant, en se trompant car la privation de connaissances est dans notre nature, en dialoguant dans le respect mutuel afin de trouver le meilleur possible pour la cité. Exactement le contraire de ce qui s’est passé lors de cette polémique sur les civilisations mais ce contraire ne ruine pas la nécessité de continuer car l’ignorance est contingente, le devoir de participer nécessaire.

Le rôle d’élu est d’une autre nature. Il n’est pas une nécessité. Il appelle des responsabilités, donc des devoirs plus que des droits, même si certains élus semblent l’oublier. Il appelle ceux qui préfèrent leur Cité à leur carrière et à leur pécule. Tout juste puis je suggérer qu’il nous faut un Président et une équipe soudée autour de valeurs fermes et d’un projet  audacieux qui bousculent les conservatismes pour redonner à la France sa place. Je crois que c’est plutôt là mon rôle, celui de philosophe conseillant ses amis depuis quelques années. Ce sera ma suggestion à ceux qui ont quelque ambition légitime dans l’UMP ou ailleurs.

Entretien de Marc Cohen avec Yves Roucaute, publié le 16 octobre 2013 dans Causeur

La disparition de l’UMP est inéluctable.

La disparition de l’UMP est inéluctable.

Sa direction est comptable de la défaite.

In « Le Monde », du 28 mai 2014, page 21.

2603_58109804354_4619293_n-2L’UMP rentre dans une crise majeure dont le côté salutaire est à noter. Car ce qui ne peut durer à droite, n’est-ce pas l’UMP elle-même ? Face au Front national, devenu premier parti de France, il n’est certes pas étonnant de voir le président du parti, Jean-François Copé, dénoncer la gauche. Il sait l’enjeu : la survie de son organisation. Que le PS fasse donc une « autocritique », dit-il. Diantre, et pas d’autocritique à droite ?

Certes, les politiques d’austérité ne sont pas pour rien dans le rejet des partis institutionnels. Mais lenombre de partis de droite victorieux, rattachés au Parti populaire européen (PPE), majoritaire en Europe, interdit l’économie d’une réflexion sur la particularité de la situation française. D’ailleurs, hors Grèce, Danemark et Autriche, sans évoquer le Royaume-Uni, la vague extrémiste a été contrôlée dans l’Union européenne par le jeu classique des partis institutionnels, voire jugulée, comme aux Pays-Bas, en Hongrie et en Finlande.

Certes, la façon dont la presse a rendu compte de cette élection n’est pas non plus très satisfaisante. D’une part, la mobilisation autour des enjeux – l’élection du président de la Commission – n’a pas été mise en récit. D’autre part, la connivence entre les élites n’a pas permis d’entendre le monde ordinaire et sa façon de mêler immigration, sécurité, emploi et identité. Enfin, mais cela est lié, jamais le journalisme « éditorial » n’a été aussi développé au détriment du journalisme d’investigation, refusant souvent de jouer le rôle d’intercesseur auprès des experts et des citoyens ordinaires. Mais ces faits, dont d’autres pays latins sont aussi coutumiers, n’expliquent pas l’échec de l’UMP et sa disparition annoncée.

PEU DE DIRIGEANTS CONNUS

Première cause, la façon cavalière, voire irresponsable dont cette campagne a été conduite. La direction de l’UMP, comme d’ailleurs celle du PS, prétendait voir dans cette élection un enjeu vital pour la France. Pourtant, peu de dirigeants connus se précipitèrent pour conduire les listes ; certains étaient plus pressés naguère quand il s’agissait de prendre la direction du parti. L’Europe ne vaut-elle donc pas une messe ? Quelle crédibilité accorder à leurs discours ? Souvent choisis parmi les battus des législatives et les porte-flingues des caciques du parti, les candidats durent affronter un FN qui, lui, n’a pas hésité à envoyer ses dirigeants en première ligne.

Seconde cause, le désordre interne. Où est la cohésion entre fédéralistes et souverainistes ? Faute de débats, chacun défendit ses positions. Le paroxysme fut atteint quand 40 députés signèrent une pétition contre la ligne politique de leur parti et quand l’un de leurs, ex-plume de Nicolas Sarkozy, se déclara opposé à la liste présentée. Puisque nul ne leur avait demandé leur avis, ils le donnaient.

Troisième cause, la gestion opaque du parti. Faute de transparence, la rumeur devint l’alliée de la démobilisation. Le paroxysme fut atteint par la découverte des 20 millions d’euros versés à la société Bygmalion pour 70 conventions dignes de l’Arlésienne. Aux journalistes qui avaient accompli leur mission d’éclairer les citoyens, les sommets de l’UMP ne peuvent plus répondre par l’invective.

Dernière cause, l’autisme vis-à-vis des citoyens qui se sentent rejetés et dont les protestations ne sont plus entendues par une élite de droite coupée du monde. Une élite issue de la haute administration qui pense plus en termes de carrière que de bien commun et qui persiste à vendre une Europe tout aussi dénuée qu’elle du souci de démocratie participative.

Autant de symptômes du mal congénital qui ronge l’UMP. En 2002, l’UMP signifiait Union pour la majorité présidentielle : une organisation pour Jacques Chirac, alors président, mise au service de sa seule ambition. Une structure pyramidale opaque de nature bonapartiste. Un modèle âgé de deux siècles qui interdit toute gestion transparente et toute démocratie participative interne.

DES GUERRES PICROCHOLINES SANS INTÉRÊT

Efficacité ? Faible. Elle a d’ailleurs connu peu de succès, si l’on excepte la victoire de 2007 à la présidentielle, aux européennes en 2009 et aux dernières municipales. Ce type de structure rend possibles les mobilisations victorieuses seulement quand se rencontrent une vision du monde et une occasion ; un phénomène rare qui expliqua jadis le charisme d’un Charles de Gaulle. Il appelle plus souvent des guerres picrocholines sans intérêt, sinon d’assurer la carrière de ceux qui maîtrisent les rouages bureaucratiques.

Le soldat Sarkozy peut-il encore sauver l’UMP ? Son échec dans la volonté de dynamiser une campagne européenne minée par les jeux internes montre l’inanité du projet. Cet instrument, dont il avait su faire bon usage, est devenu inutilisable. Son charisme n’y est pour rien, la nature de la structure pour tout. Certes, dit Alain Juppé, « la droite et le centre font 30 %. S’ils se mettent en ensemble, le FN n’est plus le premier parti de France ». Mais le centre ne veut pas de l’UMP bonapartiste. Et ne faut-il pas 50 % pour gagner la présidentielle ? Des alliances électoralistes ne suffiront plus. Il ne suffira pas d’être « droit dans ses bottes » pour résister à la prochaine vague FN.

La reconquête : tel est l’enjeu d’une nouvelle organisation pluraliste, ancrée sur les valeurs universelles, mise à l’heure de la démocratie participative, avec le projet d’une France forte dans une Europe forte, qui tienne compte de la porosité des Etats, de la mondialisation et du développement des nouvelles technologies. Il n’est pas d’autre alternative qu’entendre le pays réel pour sauver la République du populisme, revenir à un jeu normal d’alternance démocratique entre partis républicains et ainsi sortir de la crise de régime. La disparition de l’UMP est bel et bien programmée.

Yves Roucaute (Philosophe, écrivain, professeur à l’université Paris-X Ouest, auteur d' »Eloge du mode de vie à la française », de Contemporary Bookstore.

Crimée : le droit naturel des nations

new-york-statue-liberte-face-big - Version 2 Crimée : le droit naturel des nations

La Crimée est russe depuis quatre siècles !

LE MONDE 

L’unité de l’Ukraine vaut-elle une guerre ? Pas même une larme. Pourtant, une armada s’est précipitée au secours de Kiev au nom du droit international, de l’histoire, de la morale même. Et tous de proclamer : force doit rester au droit, la population de Crimée devra demeurer ukrainienne. Le droit des nations à disposer d’elles-mêmes ? Pas pour la Crimée. Cette population ne devrait pas même avoir droit à un référendum. N’avons-nous donc rien appris de l’horreur du XXe siècle ? Combien d’années, de siècles, faudra-t-il pour abandonner cette idolâtrie de l’Etat et la sanctification de sa souveraineté ?

L’heure devrait être à la méditation sur la paix d’humanité dans notre prière pour les âmes balayées par cette boucherie de 1914-1918, née du refus du droit des nations. Sur l’ignominieux traité de Saint-Germain, qui refusa aux Sudètes enthousiastes leur droit de vivre dans la jeune République de Weimar, avant de les rattacher de force à la Tchécoslovaquie, ce qui les jeta dans les bras d’Hitler. Sur cette dynamique de lâcheté née des connivences entre pouvoirs en place, qui conduisit après 1945 au maintien des colonies, et donc aux guerres, puis au découpage arbitraire de territoires décolonisés, et donc aux conflits.

LA PAIX D’HUMANITÉ

Il est une loi qui surgit de la folie des siècles depuis Philippe le Bel et son premier Etat moderne : le refus de la reconnaissance des nations est toujours le chemin de la guerre. Vous voulez la paix ? Préparez la paix. La « vraie paix »(Thomas d’Aquin), la paix d’humanité, celle qui se construit sur la reconnaissance, le respect, la coopération et, finalement, l’aimer des nations.

Las, le bateau ivre de Barack Obama navigue dans un brouillard d’incohérences et il entraîne avec lui nos gouvernements d’ombres. Après avoir démantelé naguère l’Etat de Yougoslavie au nom du droit des nations, il refuse l’autodétermination aux Russes de Crimée. Ses 2 millions d’habitants ne vaudraient-ils pas les 2 millions de Macédoine ? Bataille pour le Kosovo, tenailles pour la Crimée ?

Les Etats-Unis égarés déposent même dans l’abîme leurs valeurs fondatrices. Oubliée, la guerre d’Indépendance née du refus par l’Etat britannique de traiter également ses colonies et de les laisser choisir leur destin. Oubliée, la revendication de la supériorité du droit naturel du « peuple » américain sur le droit international. Pourquoi ne pas accepter de demander leur avis aux habitants de cette terre de Crimée quand les insurgés de Thomas Jefferson l’exigèrent pour eux-mêmes ? Pas même un référendum, dites-vous ? Quand les valeurs ne sont pas universelles, elles ne sont pas.

Les Russes auraient juridiquement donné la Crimée à l’Ukraine, disent nos Tartuffe. Russe, la Crimée l’est, depuis quatre siècles. Majoritairement fière d’être l’enfant du tsar Pierre le Grand. De ce tsar, passionnément européen, qui avait contraint les Russes à s’habiller à la française et sa cour à parler français. De ce tsar qui avait défait les Tatars sunnites de Crimée pour trouver l’indépendance stratégique que ni la mer Blanche, ni la mer d’Azov, ni la mer Noire ne pouvaient lui donner. Et sa capitale Sébastopol, fondée par la tsarine Catherine II, bat d’un cœur russe.

L’ARBITRAIRE D’UN DÉCOUPAGE TOTALITAIRE

Nikita Khrouchtchev, qui dirigeait l’Etat soviétique, a-t-il juridiquement donné la Crimée ? Avait-il demandé son avis aux populations ? Non. Que vaut alors ce droit ? Faudrait-il accorder au Soudan du sud son indépendance, prétextant, à juste titre, l’arbitraire d’un découpage colonial, tandis que la Crimée devrait supporter l’arbitraire d’un découpage totalitaire ?

Derrière cette errance, un non-dit, une crainte, la perception d’une menace, celle de l’ours russe. Non au référendum qui conduirait la Crimée à intégrer, et renforcer , la fédération russe pour devenir sa 22e République. Et d’aviser : un tel résultat ne serait pas validé.

Il serait facile de railler  : un tel acte serait pourtant tout aussi légitime, et moins illégal, que celui qui rattacha Hawaï aux Etats-Unis, en 1959, qui ne fut autorisé par aucun traité. Quant à sanctionner la Russie sous prétexte de n’être pas assez démocratique, pourquoi ne pas boycotter la Chine et son parti unique, qui occupe le Ibet sans même l’accord de la population ? La guerre contre l’URSS ? Inutile de la recommencer, elle a déjà été gagnée, par Ronald Reagan et Jean Paul II, ce Pape qui proclama le droit naturel des nations pour l’emporter.

Vous applaudissez la passion européenne de Kiev qui affaiblirait Moscou ? J’en suis fort aise. Vous engagez un bras de fer perdu d’avance sur une position immorale. Vous détricotez les coopérations laborieusement mises en place, jusqu’au Conseil O.T.A.N.-Russie. Vous perdez un allié face à l’ennemi principal : le terrorisme islamiste.

DEVENIR UNE RÉPUBLIQUE LIBRE

Plus encore, vous applaudissez un crime : jeter la Crimée, pourtant tournée depuis quatre siècles vers l’Europe, dans les bras de Moscou, faute de lui avoir proposé l’indépendance. Vous installez au cœur de ces Européens la détestation de ce qui devrait être leur rêve : devenir une République libre, respectueuse des droits naturels, ancrée dans l’Europe.

Et, au lieu de l’objectif de Charles de Gaulle, construire l’Europe des démocraties libérales jusqu’à l’Oural, vous nourrissez les pires forces réactionnaires, nationalistes et isolationnistes de Russie. Chemin faisant, vous entraînez l’humanité vers la pire des impasses, celle qui rend insoluble la question des Touareg, Kurdes, Palestiniens et Hmong, des dizaines de conflits ouverts ou latents sur le globe et qui jette vers les forces obscures ceux qui souffrent de l’indifférence.

construire La paix d’humanité exige, sur tous les continents, de défaire les Etats quand se joue le respect des nations, et de les aider à des cités libres respectueuses des droits, non de les maintenir dans les fers.

With friends like these

new-york-statue-liberte-face-bigWall Street Journal (Europe)
June 21, 2006

 With Friends Like These

By Yves Roucaute

The old Continent is wilting in the global war against terror, just as it did when faced off against fascism and then communism. When at today’s summit with U.S. President George W. Bush the European Union will once again take its ally to task over Guantanamo, it will expose its own, not America’s, most serious moral crisis of the post-Cold War era. A philosopher — a French one no less — can try to set the facts straight and offer some Cartesian good sense.

Faced with dark forces that want to destroy our civilization, we might recall that the U.S. is not only Europe’s ally but the flagship of all free nations. If America can sometimes make errors, the sort of anti-Americanism that drives the hysteria over Guantanamo is always in the wrong. Guantanamo, though, is not an error. It is a necessity.

Demagogues, and European parliamentarians are among the shrillest, claim that it’s inconceivable to keep prisoners locked up without trying them in courts of law. With this simple statement they annul — or, better, ignore — customary law and legal tradition as well as basic human-survival instincts. Whether they are legal or illegal fighters, those men in Guantanamo had weapons; they used them; and they will likely use them again if released before the end of the conflict. This is the meaning of their imprisonment: to prevent enemy combatants from returning to the battlefield, the only humane alternative to the summary execution of enemy prisoners practiced by less enlightened armies. Which French general would have released German prisoners in 1914, before the end of that great war, at the risk of seeing these soldiers mobilized again? Which American general would have organized the trial of 10 million German soldiers, captured during World War II, before Berlin’s unconditional surrender?

The release « without charges » of, so far, a third of Guantanamo prisoners doesn’t mean that those still imprisoned are innocent, as some claim. Similarly, the release of Waffen SS members « without charges » was no admission that they should have never been imprisoned in the first place — or that their comrades who were still locked up were victims of undue process. Only those Nazis who committed crimes against humanity or war crimes, and whose crimes could be proven in a court of law, were tried at Nuremberg.

The demagogues further complain about Guantanamo’s isolation and the secrecy around it. Isolation? When Hitler attacked Britain, was Winston Churchill wrong in sending captured German soldiers to isolated camps in Canada from which they would be released only five years later, after the end of the war? He forbade the exchange of information between the prisoners to make it impossible for them to direct networks of Nazi sympathizers and spies inside and outside the prison. This was a rather sensible measure and one that is also necessary to combat Islamist terrorists, who plan their attacks in loosely connected networks and have demonstrated their capacities to expand these networks in French and British prisons.

Secrecy? This is a common practice in warfare, designed to obtain information without letting the enemy know who has been caught or when. It lets us try to infiltrate and confuse terrorist groups. It saves thousands of lives without harming the prisoners.

As for the wild accusations of torture, the European Commission and Parliament would be well advised to investigate with caution. Terrorists have been trained to claim, in case of capture, that they’re being tortured to win sympathy from free societies. Abuses happen. Republics make mistakes. But they forever differentiate themselves from tyrannies in that violations of the rights of man tend to be punished. In abusing prisoners, a Western soldier breaks the law and undermines the moral foundations of his country. American military courts made no such mistake when meting out stiff penalties to the disgraced soldiers of Abu Ghraib.

But where is the evidence of torture in Guantanamo? The famous incriminating report of the U.N. Commission on Human Rights, whose members include communist China, Castro’s Cuba and Wahhabi Saudi Arabia among others, was based purely on the testimony of released Islamists. Not one member of the commission even visited the camp, under the pretext that they couldn’t question prisoners in private.

What about the docu-fiction « The Road to Guantanamo, » winner of the Silver Bear at the 2006 Berlin Film Festival, which told the story of the three « innocents » kept « for no reason » in Guantanamo? Consider the tale told in this film. Leaving the U.K., supposedly for a wedding in Karachi, three British lads of Pakistani descent somehow ended up 1,200 kilometers away in Kandahar, an al Qaeda command center in Afghanistan, allegedly in order to hand out « humanitarian aid. » Our unlucky strollers then arrived with Taliban reinforcements in Kabul before going for a walk with them to the Pakistani border, where they were arrested « by accident. » We are asked to believe, on top of this unbelievable story, their accusations of torture that mysteriously left no marks.

The three Guantanamo suicides earlier this month were treated as the much sought-after evidence that will bring about the closure of the camp. Did we have to release Nazi leaders after the suicide of Göring? Did we have to close German prisons after the suicides of Rudolf Hess or the Baader-Meinhof group? Should French prisons be closed because 115 prisoners took their lives in 2004 alone? Well, some of them actually should. Many French prisons and detention centers for asylum seekers are truly horrific. But they are of little concern to the anti-American demagogues.

Instead of joining Kant’s « Alliance of Republics, » which is the key to victory against Islamic terrorism, these politicians lead the EU into the traps set by the terrorists. While soldiers from free republics are fighting together as brothers for the freedom of Afghanistan, in Brussels and Strasbourg demagogues sow division and battle the « American enemy. » From Swiss parliamentarian Dick Marty, who reported on the « CIA flights » for the Council of Europe, to Martin Schulz, the president of the Socialist group at the European Parliament, the alliance among free countries is rejected and relations with the CIA described as « complicities. » Even though the accusers confess they have « no evidence at all, » they insist the « secret prisons » where terrorists are kept without trial are real. They embellish the story with more than 1,000 flights — « torture charter flights » — supposedly arranged by the CIA.

The real strength of republics must be measured by the courage to fight for them. On this side of the Atlantic, this strength, once again, is lacking.

 

Impensable abandon du droit du sol !

« Impensable abandon du droit du sol ! »

LE MONDE | 

 

cdgLes deux poids lourds de l’UMP, François Fillon et Jean-François Copé ont, enfin, trouvé un point d’accord : « Sus au droit du sol ! » A l’unanimité, la direction de l’UMP a applaudi. Fiscalité ? Chômage ? Nenni. Supprimer le droit du sol pour les enfants d’étrangers nés en France, tel serait le programme commun de rentrée. Un œil sur son ego, un autre sur les bataillons du FN, la garde de l’U.M.P. ne meurt pas, elle se rend.

Curieux. La puissance du FN ? La faute au droit du sol ? Pourquoi les Etats-Unis, qui ont une immigration clandestine plus forte encore et un droit du sol plus généreux, ne voient-ils pas un Front national émerger ? Pourquoi l’Autriche qui est une nation excluant le droit du sol, voit-elle un courant néofasciste à plus de 22 % des voix ?

Certes, la gauche ne semble guère plus lucide, tétanisée, elle aussi, par le FN. La molle réaction du président François hollande face à l’ignominieuse arrestation d’une collégienne lors d’une sortie scolaire laisse pantois. Mais que dire, pour les rares intellectuels, dont je suis, qui lui furent fidèles dans les pires moments, du silence de Nicolas Sarkozy face à la débandade culturelle de l’UMP ? Et des profondes brisures entre la droite intellectuelle et la droite politique produites par cette unanimité digne des soviets ?

LA NATION CIVIQUE FRANÇAISE

Car ce droit du sol n’est pas négociable. Il porte l’histoire et reste la clef de la cohésion et de la puissance française tout comme celle de la construction d’une identité européenne.

Incroyable révolution portée par ce droit du sol ! Contre la conception de la nation ethnique, fondée sur le sang, qui régnait sur le globe, la France a inventé la nation civique, fondée sur des valeurs, indépendamment de toute origine ethnique.

Révolution qui a ensemencé le monde : Etats-Unis, Canada, Royaume Uni, Irlande, Italie, Portugal, jusqu’en Amérique latine, du Mexique à l’Argentine. Et qui le nourrit encore. L’Allemagne elle-même, qui avait vu naître le nationalisme ethnique radical sous la plume du poète Friedrich von Schiller (1759-1805), a commencé, depuis 2000, à accepter ce droit du sol.

Cette révolution commença avec Clovis (466-511), même si les tribus gauloises admettaient déjà les mélanges ethniques, tels ces Gaulois saliens du sud, mix de Gaulois et de Ligures, ou ces Tarbelli celtes et basques. Clovis va plus loin. Il refuse la coupure entre Francs et Gaulois. Il interdit les mariages claniques, contraignant l’aristocratie à l’hybridation ethnique. Il assoit la France sur les valeurs universelles d’origine judéo-chrétiennes, franques du bien commun, locales des « pays » et le respect des devoirs envers institutions, maîtres et parents.

Lui-même donne l’exemple : il se marie avec Clotilde, burgonde. Et le processus d’hybridation de la lignée mérovingienne est lancé, à l’exception de Clotaire Ier. Francs, Wisigoths, Burgondes, Alamans, Gallo-romains, Armoricains vont se fondre. Ces aristocrates ressemblent à Chilpéric Ier qui épouse la gauloise Frédégonde. Les Carolingiens poursuivent cette entreprise entre Flamands, Alamans, Saxes, inventant le grand récit des « François », devenus plus tard celui de « nos ancêtres les Gaulois », tous « sujets du roi ».

Logiquement, l’édit de Louis X en 1315 indique : « Selon le droit de nature, chacun doit naître franc », donc libre, avec la première interdiction de l’esclavage sur le sol. Charles VIII évoquera bientôt formellement cette nation lors de sa victoire de 1495. Et, en 1515, par un arrêt, le droit du sol fut formalisé : il suffisait de naître et de résider en France pour être libre et égal sujet.

La France, soudée éthiquement, malgré bien des soubresauts, avait construit le premier Etat du monde sur une unité civique. Nation civique réaffirmée par le droit du sol en 1790, lors de la Révolution française.

LA FORCE DE LA VERTU ÉTHIQUE

Et telle fut la clef de la puissance quand le « Vive la nation ! » du général Kellermann, tombé de cheval, qui tenait son chapeau au bout de son sabre, fut repris en chœur par les troupes pluriethniques, ouvrant la victoire de Valmy en 1792 et la porte de la liberté aux populations d’Europe centrale.

Comment s’étonner si le général de Gaulle promulgua, le 10 octobre 1945, un code de la nationalité rétablissant le droit du sol, abolissant les décrets ethniques de Vichy, dont le FN semble nostalgique ? Il n’avait pas oublié la Résistance où combattirent les Français de toutes origines : les racines basques et arméniennes, cévenoles et italiennes, auvergnates et arabo-berbères, juives et chrétiennes, musulmanes et bouddhistes s’étaient mêlées pour assurer la victoire de la France libre et généreuse, unie non par le sang mais par les valeurs.

Mais si la vertu éthique est la force de telles nations civiques, elle est aussi leur talon d’Achille. Le ciment éthique s’acquiert, et cela ne peut se faire sans volonté. Et c’est bien la volonté qui manque dans cette droite désemparée qui ne sait plus où elle va, qui ne sait plus d’où elle vient.

Surveiller les frontières, certes, il le faut. Plus et mieux. Mais si quelques téméraires passent, la France ne changera pas de nature en les accueillant.

A l’inverse, quand les habitants ne partagent plus les valeurs communes, la République se meurt. Les petites incivilités annoncent les grands crimes. La générosité devient elle-même un songe-creux et s’efface devant l’égoïsme. Et le temps arrive où le philosophe meurtri ne peut plus regarder son ancienne nation civique qu’avec nostalgie. Il songe à ce temps où, nourrie aux valeurs universelles et civiques, la France accueillait deux illustres révolutionnaires, l’Américain Thomas Paine (1737-1809) et le Prussien Anacharsis Cloots (1755-1794) qui chantaient La Marseillaise en tant que députés, avant de célébrer le mariage de la République et de Jean Valjean, lequel, pour sauver Cosette, ne se préoccupait pas de savoir si ses papiers étaient en règle.

La responsabilité des élites politiques ? Rétablir les valeurs fondatrices, réinterpréter les symboles et réécrire le grand récit des origines. Par séduction et sanction. Si elles ne le peuvent ? Il leur faut partir. Et si elles restent quand même ? Alors, il faut leur faire quitter un navire sur lequel flotte en majesté l’oriflamme non de la nation ethnique mais de la nation civique.

Yves Roucaute dans la guerre contre les Talibans en Afghanistan

kaboul, nov 2001, arrivée de Roucaute avec l'Alliance du NordKaboul, novembre 2001, arrivée sur l’aéroport dans l’hélicoptère de feu le Comandant Massoud en provenance du Tadjikistan et en passant sur l’Hindou Koush alors que les combats font encore rage.

Invité pour fêter la victoire de l’Alliance du Nord qui allait se concrétiser quelques jours plus tard, appelé à participer à cette libération en remerciement de mon soutien à cette lutte et de mon amitié avec le commandant Massoud. Novembre  2001.  Chacun jugera entre ces philosophes qui parlent et prétendent qu’ils ont été proches de Massoud pour se faire de la publicité et ceux qui l’ont vraiment été. J’ai tout simplement été le seul intellectuel invité dans le monde, avec Alain Madelin qui avait lui aussi soutenu Massoud depuis le début et deux amis qui nous ont accompagné. Chacun jugera en conscience. La légende attribue à Aristote cette formule  : Platon est mon ami, mais la vérité l’est plus encore. dommage que cette formule ne soit pas au fronton de tous les médias.

 

 

 

Entretien avec le philosophe Yves Roucaute sur l’inégale valeur des civilisations

Entretien sur l’inégale valeur des civilisations

 

Roucaute chez les inuits Photo d’Yves Roucaute chez les Inuits, été  2011

Entretien avec Marc Cohen, pour Causeur, 16/10/2013 : Comment avez-vous pris connaissance de « l’affaire » ? 

De façon assez drôle. Ce mardi 7 février, j’avais exceptionnellement quitté mon bureau de la    place Beauvau, au cabinet de Claude Guéant, assez tôt, en fin d’après midi. J’avais pris ma voiture plutôt que celle du cabinet pour aller à une réunion discrète, je n’ai pas dit secrète (sourire). Les téléphones étaient éteints. Quand je suis sorti, j’ai constaté qu’il y avait eu beaucoup d’appels en absence et immédiatement le téléphone a sonné. J’ai répondu. Il s’agissait d’un journaliste que je connais et qui me dit tout de go  « Salut Yves, tu pourrais répondre au téléphone quand tu mets le b. dans le pays et me prévenir en premier. » J’ai cru à une plaisanterie sur le livre, Eloge du mode de vie à la française, que je venais d’écrire et de lui envoyer, dédicacé à la mémoire des Arméniens morts pour la France. Je lui ai donc répondu « Je vois que tu es encore la victime consentante du lobby anti croissant et anti arménien du Monde (…) ».  Il rit et comprit que je n’étais pas informé de ce qui s’était produit l’après midi à propos du discours que j’avais écrit, prononcé par Claude Guéant le 4 février devant le syndicat étudiant l’U.N.I. Il me raconta l‘accusation ubuesque de nazisme par un cancre, nommé Serge Letchimy, et le départ non moins ubuesque des députés de l’UMP de l’Assemblée nationale.

Comment savait-il que vous étiez l’auteur du discours ?

A vrai dire, il n’était pas le seul à le savoir. Je ne sais d’ailleurs pas si c’est « Le Monde », « Le Figaro » ou l’AFP qui a donné cette info le premier. J’ai même été contacté par la chaine du Sénat. C’était un secret de polichinelle. D’abord les journalistes qui suivaient Claude Guéant savaient que j’étais entré dans le cabinet pour les discours stratégiques. Et ce discours avait donné lieu à des discussions préalables entre les dirigeants de l’U.N.I. et moi. Donc, beaucoup de monde savait. Bien entendu, il arrivait à Claude Guéant, qui a une forte personnalité et une grande intelligence, de faire des digressions, de rajouter ou d’enlever des phrases, mais pas sur les discours écrits donnés à la presse. Il est vrai que j’ai appris plus tard que ce discours n’avait pas été donné à la presse sous la curieuse pression de François Fillon (rires). Et puis, cette phrase est tirée de mon livre publié au même moment. Il suffit d’ouvrir mon dernier livre page 21 : « les civilisations ne se valent pas ; Celles qui défendent l’humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient ; Celles qui défendent la liberté, l’égalité et la fraternité nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique ; le respect de la dignité humaine ne se négocie pas ». Cette phrase était d’ailleurs déjà dans un livre que j’ai publié, il y a une dizaine d’années. Pourquoi aurais-je nié ? C’est absurde. Les journalistes enquêtent, savent lire et détestent, à juste titre, qu’on leur mente.

Avez-vous été surpris par la polémique, où l’aviez-vous senti venir en écrivant le discours ?.

Ce fut incroyable, le vice appuyé sur le bras de la bêtise conduisait à une crise politique sans précédent. J’ai vu émerger une haine incroyable.

Certes, dans les rangs socialistes même, chacun s’accorde  sur l’inculture du pauvre Serge Letchimy, qui lança sa dénonciation de nazisme à l’encontre de Claude Guéant et de toute la droite républicaine.  On connaît les lumières de cet élu qui se dit « fils d’esclave », sachant que l’esclavage a été définitivement aboli en 1848 et que lui-même est né en 1953 : non seulement il a découvert la formule cachée du nazisme chez tous ses opposants qui dénoncent les atteintes aux droits humains par certaines civilisations mais aussi celle de la fontaine de jouvence. Et le pauvre ère ignore même que l’esclavage a été aboli sur la terre de France dés le Moyen-Âge et que son abolition dans les îles au XIXème siècle ne doit rien à la gauche.

Mais ce fut évidemment une décision politique du groupe socialiste. Clairement, les socialistes lancèrent cette crise par pur cynisme, tentant de sauver les meubles et croyant ainsi pouvoir coller l’accusation de collusion du F.N. avec l’U.M.P. pour effrayer le centre. Comme ils le font souvent. Ils eurent tort. ils ont entraîné une grande haine contre la droite républicaine dans leurs rangs, haine qui, à moyen terme rendra difficile la possibilité dun Front républicain face au F.N. Car à force d’insulter et de jeter l’anathème sur les républicains de droite, je ne vois guère comment on peut justifier ensuite une quelconque alliance.  D’autre part, comment pourra-t-on empêcher électeurs de droite et du centre, et de gauche même par capillarité, à voter F.N.?  Si l’UMP c’est comme le FN, alors le F.N. c’est forcément comme l’UMP. Par calcul à courte vue, faute d’intelligents politique, pur un plat de lentilles électorales, la gauche dédiabolise le F.N. chaque jour. Et elle lui ouvre le chemin du pouvoir.

C’était sinon un piège tendu aux socialistes. Mais ce n’était pas le premier et ce discours n’était pas le plus provocateur de ceux que j’avais écrit, loin de là. Je ne pensais donc pas que ce piège fonctionnerait à merveille. Je ne pensais pas non plus que le personnel politique de la droite républicaine était à ce point pleutre qu’il aurait peur de la tactique de Matamore d’une gauche en débandade qui hurlait d’autant plus que la plupart des députés socialistes étaient d’accord avec moi. Tout cela tourna rapidement en farce drôle et pitoyable.

Nicolas Sarkozy pensa d’ailleurs, à juste titre, que c’était la première victoire depuis son élection à la présidentielle. Mais, comme souvent,  il fut bien seul. François Fillon, malheureusement, n’eut pas ce sens politique. Sans doute est-ce l’un des multiples symptômes que nous avons un recrutement du personnel politique de droite qu’il faudrait revoir.

Et si ce fut une victoire écrasante, elle fut donc très momentanée. Les sondages nous furent pourtant immédiatement clairement favorables à plus de 70%. .

Notre victoire idéologique était donc sans appel et d’une importance stratégique car elle renvoyait le P.S. au relativisme moral et à l’incapacité d’agir en pleine période de crise où les gens ont besoin d’un capitaine et de repères culturels. D’autant que François Hollande, qui n’avait pas compris la manœuvre, refusa de désavouer celui qui était appelé par certains députés UMP « le cadeau de Martinique », d’autres plus méchants, disaient « le cancre de Martinique ».

Et qui, dans le  pays, pouvait en effet croire que toutes les civilisations se valent ? Qui pouvait même croire qu’elles n’existent pas comme bientôt ce fut l’élément de langage dominant du P.S. , avant la débandade de l’UMP ? Certainement pas les socialistes qui avaient jadis, alliés aux radicaux, profiter de ce fait pour justifier l’injustifiable, les grandes colonisations sous la IIIème République que le fameux députés martiniquais semble ignorer. Sans même évoquer leur gestion déplorable de l’Afrique du nord, sous la IVème république.

Le plus intéressant pour nous, à mon sens, car j’étais là pour mener cette bataille idéologique comme le font aux Etats-Unis au sein du parti républicain mes amis néoconservateurs, était que les socialistes se coupaient de la plus grande partie du monde intellectuel. Car la conséquence de cette position idéologique conduisait à soutenir des propositions absurdes, comme c’est toujours le cas lorsque l’idéologie est poussée au bout.

Si parler de civilisations était la marque du nazisme, alors tous les universitaires se trouvaient plus ou moins nazis, tous ceux qui travaillaient dans les départements d’étude des civilisations dans les universités du monde, ceux qui avaient apprécié le grand historien français Fernand Braudel et sa Grammaire des civilisations, ceux qui travaillaient sur les civilisations passées.

Le P.S. s’isolait de sa force de frappe culturelle.

Allez donc expliquer que tout se vaut à ceux qui travaillent sur les Incas, dont la civilisation pratiquait les sacrifices de masse les jours de fêtes et préférait brûler vif, étrangler ou enterrer vivants les enfants ? Ou à ceux qui travaillent sur les Aztèques, cannibales qui pratiquaient des sacrifices quotidiens, le cœur des suppliciés étant arraché pour assurer le lever du soleil et les enfants particulièrement recherchés pour être noyés afin d’appeler les pluies ? Aller expliquer cela à ceux qui travaillent sur la civilisation maya : tous les matins devait dégouliner assez de sang le long des pyramides pour qu’il nourrisse la terre et les enfants périssaient sous de savantes tortures car ils croyaient que leurs larmes amenaient les pluies.

Tous les chercheurs, plutôt à gauche, savent la supériorité des civilisations fondées ou refondées sur les droits et devoirs de l’humanité contre cet esprit sacrificiel et ce goût pour la mise en esclavage, les pillages, les massacres et les rites mutilants largement répandus dans le monde, à partir des âges des métaux, de la civilisation maori de Nouvelle-Zélande à celle des Iroquois. Pas un historien sérieux, eux aussi majoritairement à gauche, n’ignore la civilisation romaine qui pratiquait l’esclavage et les jeux du cirque où la population criait « jugurta » (égorge) un gâteau au miel dans la main.

Et aujourd’hui, quel anthropologue ou sociologue peut juger que les civilisations du Mali à la corne d’Afrique qui infibulent entre 100 et 140 millions de femmes valent les civilisations qui l’interdisent ? De la civilisation japonaise aujourd’hui à la civilisation nord-américaine, les civilisations fondées sur l’interdiction du sacrifice et le respect du droit naturel de l’humanité, valent assurément mieux que celles qui s’y opposent, tel est le credo le plus répandu chez les intellectuels.

Le plus drôle dans cet étalage d’ignorance de nos élites politiques issus d’une haute administration la plupart du temps dénuée de culture, car les socialistes ne furent pas les seuls en cause quand on songe à la tournure prise par cette affaire, c’est que si toutes les civilisations se valent pourquoi fallait-il s’opposer au nazisme qui prétendait justement proposer une nouvelle civilisation, celle du IIIème Reich ? Je sais pourquoi mon père a pris les armes contre le nazisme et je sais aussi pourquoi les ancêtres relativistes de Serge Letchimy n’ont pas trouvé que la défense d’une civilisation qui défend les droits et devoirs humains contre un projet de civilisation qui les nie, valait la peine de risquer sa vie, ni même sa carrière. Serge Letchimy avait au fond retrouvé naturellement le réflexe de ceux qui collaborèrent avec le nazisme comme de ceux qui acceptèrent de collaborer avec le colonialisme le plus abject comme on le vit lorsque la gauche française robespierriste avait rétabli l’esclavage à Saint Domingue en 1801 : si tout se vaut, alors pourquoi risquer sa vie?

En vérité, je crois, pour ma part, que précisément ces civilisations inférieures sont condamnées par l’Histoire. C’est pourquoi elles disparaissent et c »est très bien. Nous allons vers la convergence des civilisations entrainée par les grandes spiritualisés qui l’ont emporté et qui ont mis au coeur de leurs valeurs l’amour du prochain comme je crois avoir commencé à le démontrer dans mon livre « Vers la Paix des Civilisations ».

A mon grand étonnement, sur un piège si simple à éviter, le P.S. qui venait de perdre une bataille idéologique majeure en révélant sa véritable nature : non pas le parti des opprimés, des minorités ou des faibles, encore moins celui de ceux qui croient aux valeurs universelles d’origine judéo-chrétiennes, mais celui des sommets de la bureaucratie française qui veut le pouvoir pour le pouvoir et gouverne avec cynisme sans se préoccuper des valeurs au point de juger que tout se vaut si une carrière est possible.

Bref, nous avions gagné Austerlitz, il suffisait de planter notre drapeau. Mais, le plus croquignolesque c’est qu’au lieu de cela,  l’armée des vainqueurs a été reconduite par certains de ses chefs dans ses casemates, la tête basse.

Tes détracteurs vous ont-il demandé votre avis avant de pourrir par voie de presse?

Tout est allé très vite. Car après l’incroyable erreur stratégique du P.S. on assista à une plus incroyable débâcle de l’UMP. Imaginez un mascaret d’équinoxe imprévu qui déboule en quelques heures sur un fleuve puissant ! Je fus pris dans ce reflux dans les heures qui suivirent.

Claude Guéant, qui a un sens de l’Etat indéniable et une fidélité remarquable en ses engagements, à la demande de François Fillon qui paniquait devant le flux médiatique de gauche, me demanda de ne pas intervenir publiquement alors que je me dirigeais vers le seul média qui demandait alors des éclaircissements, la courageuse chaine du Sénat. À la place, je fus chargé d’écrire une réponse de Claude Guéant qui serait rendue publique. J’ai trouvé l’idée très bonne et j’ai immédiatement négocié avec un quotidien, qui accepta la proposition. Je déclinais donc finalement l’invitation d’aller m’expliquer sur la chaine de télévision, ignorant encore l’ampleur de l’incroyable débandade idéologique à droite.

Je n’étais d’ailleurs pas le seul à l’ignorer. C’est un autre côté amusant de cette affaire.  Chez certains intellectuels, le premier mouvement a été plutôt une course à qui s’approprierait mon texte. Même mon ami André Comte-Sponville, qui était déjà avec moi quand je dirigeais l’Union des Etudiants Communistes de la Sorbonne, a voulu sans doute être plus près encore de moi et a écrit qu’il était peut-être l’auteur de la formule. Et Luc Ferry, que j’apprécie beaucoup aussi, a renchéri en envoyant un communiqué à l’AFP. Cela n’a pas duré longtemps (rires).

Tous sans te citer alors que c’était devenu de notoriété publique?

Tous sans me citer, bien sûr. Je passe sur quelques autres intellectuels. Puis, soudain, ce fut le silence. La vague scélérate, ainsi que disent les marins, était arrivée.

Une partie de la presse, des blogs et des réseaux sociaux influencés par le P.S., envoya immédiatement l’artillerie contre Claude Guéant et moi pour prétendre que ce parti était dans son bon droit de nous traiter de nazis. Ce qui n’était pas étonnant même si je trouve peu déontologique d’attaquer des gens sans leur offrir la  possibilité de répondre, et, trop libéral peut-être, je n’aime pas les procès à la presse. Mais, du côté de la presse neutre et de celle qui était plutôt favorable à nos idées, la débandade de l’UMP alors qu’elle venait de gagner la bataille rendait tout illisible. Entre les consignes des uns et l’incompréhension des autres, le silence régna sur l’une et l’autre colonne.

Les choses s’éclaircirent pour moi rapidement : j’avais écrit l’article dans la nuit pour Claude Guéant mais celui-ci m’indiqua trois jours plus tard qu’il avait reçu la consigne de ne pas le publier. Claude Guéant, qui avait donné sa parole de toujours respecter les décisions du Premier ministre, et qui a un grand de l’honneur et du respect de la hiérarchie, n’a pas voulu passer outre à cette volonté du Premier ministre. Ce que je comprends car sans honneur  que valons-nous?

Je me retournais vers l’Elysée. L’Elysée me félicita une fois encore et tenta de me convaincre de rester dans le cabinet Guéant. J’ai obtenu des promesses, d’ailleurs non tenues pour la plupart (rire), mais je m’y attendais, et j’ai accepté pour poursuivre le plus important : cette bataille des idées en conjonction avec mes amis, élus et non élus. Ce qui me conduisit à écrire d’autres textes stratégiques pour Claude Guéant, et pas seulement (sourire), et à développer le cercle d’intellectuels créé pour aider Nicolas Sarkozy, dont le secret a été en partie éventé par la presse.

 

Quid de la défense de Guéant. Et de celle de l’UMP ?

La défense de l’UMP a été calamiteuse. Austerlitz a été gagné et on a oublié de planter le drapeau… L’UMP souffre, plus que le PS, d’une absence remarquable de pensée structurée. Cette affaire en a montré l’ampleur. Où sont les Reagan, les Thatcher, les Merkel ?  Il ne faut pas les chercher, il n’y en a pas. Seul Nicolas Sarkozy, homme d’intuitions mais non de concept, a la volonté qui aurait permis d’afficher la victoire. Mais il est malheureusement un peu seul sur ce sommets désertés par la pensée et cette solitude ne lui permet pas de mener à bien toutes les batailles, y compris celle de la présidentielle.

Une des raisons de la débandade, c’est que la plupart des dirigeants sont en effet incapables de défendre une position juste car ils sont eux mêmes relativistes ou dénués de culture fondamentale. Et ceux qui pourraient intervenir sont empêchés par ceux qui ne le peuvent pas. C’est la prime au premier de la classe en droit public, à condition d’être dernier en culture générale et dénué de toute imagination avec ce zeste de suffisance qui tient au classement de l’E.N.A.

Il suffit de lire les réactions. L’énarque Juppé proclame le propos de Guéant « inadéquat », le diplômé de droit public François Fillon indique qu’il n’aurait certes jamais prononcé des telles phrases, la débandade fut quasi générale, jusqu’à mon ami Jean-Pierre Raffarin lui-même, sans doute pour régler un vieux contentieux avec Guéant, qui avait feint de croire que les civilisations n’existent pas.

Certes, dans cette réaction, il y a souvent une part de calcul politique. La droite ce n’est pas une meute mais dix meutes. Alain Juppé savait que la victoire de Nicolas Sarkozy signait la fin de ses espoirs d’être à nouveau un jour Premier ministre puis Président. François Fillon,  qui avait trainé les pieds sur maintes réformes, savait qu’une victoire de Nicolas Sarkozy signifiait la même fin de ses ambitions. La suite démontra qu’il convient de se garder de ses « amis «  et à cet égard. Claude Guéant aurait peut-être pu négocier pour obtenir un feu vert et foncer au lieu de se laisser malmener. Il aurait été applaudi après coup. Et il aurait gagné sa députation en se donnant une image qui n’était pas celle, extrémiste, qui fut imposée par la gauche dans une circonscription où le centre est si puissant, une image qui ne correspond en rien à ce qu’il est car il est profondément gaulliste et d’un gaullisme plutôt centriste.  Mais, une fois encore, je condamne rarement ceux qui sont fidèles à leur parole quand les hautes valeurs morales ne sont pas en cause.

Mais, ce qui joua plus encore pour tous ce fut la conjugaison de la peur de la gauche avec l’ignorance et l’origine sociale de cette élite. Car aucune autre droite dans les pays développés n’a un tel mépris des intellectuels et ne recrute la majeure partie de son haut personnel politique dans les cercles de la bureaucratie.

Avec cet effet pervers : les relations avec la gauche bureaucratique deviennent ambigües et les seuls intellectuels mis en valeur par la presse étant les intellectuels de gauche, lorsque la droite veut une légitimation idéologique, ce qui est toujours une nécessité, elle se tourne logiquement vers eux. D’où l’importance accordée aux Edgard Morin et Bernard-Henry Lévy dont les qualités ne sont pas en cause mais comment pourraient-ils offrir une vision d’avenir à la droite alors qu’ils se sentent de gauche ? Même si pour ma part, aussi bien proche de Tony Blair que de G.W.Bush, je trouve ces catégories bien désuètes et presque infantiles.

D’où, en tout cas, pour cette droite, l’incapacité à gagner les batailles idéologiques les plus faciles, comme sur cette question des valeurs. D’où l’apparence de lâcheté de certains dirigeants qui préfèrent leur carrière au pays et craignent moins de ne pas obéir aux valeurs qu’ils ignorent, qu’aux réflexes de prudence bureaucratique. Ne pas penser à un prix. Nicolas Sarkozy saura-t-il en tirer les leçons ? Cette affaire l’a encore démontré : la défaite de la pensée prépare toujours la défaite politique. Et si Nicolas veut revenir, et si, en admettant qu’il le puisse, il veut laisser une marque dans l’histoire, il lui faudra s’entourer de gens qui ont une vision de la France et du monde à l’heure de l’Internet 3, de la mondialisation et de la Puissance d’humanité. Ce n’est pas gagné (rires).

 Comment expliquez-vous que certains passages plus raides du discours que celui dont tout le monde a parlé, n’aient pas été mis en cause par les médias ! ( « La maison de France n’est pas une maison de tolérance » p.4) ou sur l’historiographie disons rapide du fascisme et du nazisme , tous deux déclarés enfants naturels du socialo-communisme?

Oui, j’ai déjà tenté de démontrer dans un autre ouvrage que je suis en train de republier, que les origines du fascisme se trouvent bien à gauche.

Créé par le socialiste Mussolini, qui dirigeait la gauche du Parti socialiste italien et était majoritaire dans le parti, le mouvement fasciste a entrainé l’ensemble des dirigeants des syndicats ouvriers, de l’industrie et de l’agriculture. Il y a un dialogue très intéressant entre Mussolini et le dirigeant communiste Antonio Gramsci à l’assemblée nationale qui éclaire le processus. Et le premier programme du parti fasciste, élaboré d’ailleurs avec une envoyée de Lénine, est conforme aux canons socialistes. La formule en exergue de son journal « Il Populo d’Italia » est d’ailleurs de Blanqui. L’opposition avec les communistes tient au fait que les fascistes italiens reprochent aux communistes de ne pas voir l’intérêt de la classe ouvrière italienne mais celui de Moscou. Et aux socialistes : ne pas vouloir vraiment la révolution nationale et socialiste.

Ce processus est identique dans tous les pays du monde européen, sans exception. Ce sont des dirigeants de gauche qui créent les partis fascistes et nationaux-socialistes (nazi). Le parti national socialiste allemand d’Hitler, né du Parti des Travailleurs Allemands,  de l’extrême-gauche, n’échappe pas à la règle dans sa formation et son programme de nationalisations et d’étatisations, jusque dans le plan de 4 ans de Goering, dont Goering, et il s’est réclamé du léninisme jusqu’à la fin des années 20, dit lui-mêmeu’il est influencé par la planification de Staline. En France même, le communiste, député maire de Saint Denis, Doriot, crée un puissant parti nazi, et le député socialiste Déat, un parti fasciste. Et ils font les mêmes reproches aux communistes : être inféodés à Moscou. Et le même reproche aux socialistes : ne pas vouloir vraiment la révolution nationale et socialiste.

Il faut s’appeler Serge Letchimy pour fendre de l’ignorer. Et d’ailleurs, une des caractéristiques de ces partis a toujours été, comme Serge Letchimy, d’insulter et de diffamer les adversaires, et d’appeler la haine sur eux au nom du prolétariat et des opprimés. Leur style violent dit leur fond. Y compris contre les juifs : l’antisémitisme nazi est en effet un antisémitisme de gauche. Alors que celui de droite part du sol et conduit souvent à l’expulsion et aux expropriations, celui de gauche dénonce dans le juif « le gros », « le riche », l’exploiteur et conduit à l’extermination totale sous prétexte de détruire totalement la bourgeoisie et les valeurs juives responsables de l’exploitation. Cela se voit chez les blanquistes qui inventent l’idée d’une race aryenne contre les juifs, dans leur journal « Candide » et leurs écrits qui seront repris par leurs disciples. Serge Letchimy, par son style violent, est plus proche de ces mouvements qu’il ne le croit.

Mais j’arrête là car je me suis longuement expliqué dans dseux ouvrage La République contre la Démocratie et  Les Démagogues sur cette histoire de la naissance et du développement du fascisme ainsi que sur le léninisme et le stalinisme.

Pourquoi dans ce discours, n’allez-vous pas au bout de votre pensée sur la France? Il suffit de feuilleter votre « Eloge du mode de vie à la française » pour voir que vous pensez que notre modèle est supérieur, non seulement aux aberrations du tiers-Monde, mais aussi, au modèle US ou allemand : les Gaulois, l’assimilation, le jambon beurre ( !!!!!) et même le café théâtre…

Je pense que la France dispose d’un modèle d’identité nationale qui est celui qui porte l‘avenir de l’humanité : une nation fondée non sur le sang mais sur l’appartenance à une société fondée autour des valeurs et habitant sur un lieu. Cette révolution qui a commencé avec Clovis est en effet pour moi la marque d’une avancée de l’humanité vers son destin : reconnaître en elle sa commune humanité. C’est pourquoi je suis fermement opposé à l’abandon du droit du sol que propose François Fillon.  Et c’est pour moi un casus belli.

En ce sens, sur ce point, je dis clairement que le modèle français est supérieur à tous les autres, à l’exception de ceux qui l’adoptent.

Mais je ne pense pas que notre modèle soit supérieur à celui des autres démocraties sur tous les points. Ainsi, en matière de civilité, je pense que le modèle japonais est plus avancé même si sur la place des femmes il est en retard. Je pense que le modèle des Etats-Unis est plus avancé en termes de libertés du corps,  de protection de la propriété et de liberté de la presse, mais moins en termes de protection des déshérités faute d’avoir pensé l’Etat compassionnel.

En fait, à la différence des relativistes, j’ai des critères que je crois clairs et une pensée structurée autour de valeurs et indications léguées par la grande tradition judéo-chrétienne.

L’ennemi idéologique est très clairement identifié : ce sont les trois idolâtries de la modernité : celle de l’Etat, de la Science et du Marché. A partir de ce qui va dans le sens de l’humanité de l’homme, dont j’ai posé les critères dans La Puissance de la Liberté puis La Puissance d’humanité, se dégagent des lignes d’orientation qui permettent de juger la valeur d’une civilisation et son état d’avancement vers l’amour universel des humains.

Or, la France, quand elle est fidèle à elle-même, quand des chefs éclairés la conduisent, a cet avantage sur les autres Cités : elle est vaccinée contre les trois idolâtries. Encore faudrait-il qu’elle secoue sa bureaucratie et retrouve sa joie d’être elle-même.

Quel intérêt de faire de la politique si on rêve pas de devenir conseiller général ou président de la République? Surtout à droite compte tenu de leur détestation quasi-unanime de la réflexion idéologique

La politique est un devoir quand bien même la scène politique est occupée par des ignorants, ce qui, depuis la démocratie athénienne n’est quand même pas un phénomène totalement nouveau (rire). Ma première thèse portait sur Aristote. Et je tiens de cette passion de jeunesse pour Aristote que tout citoyen a le devoir de s’intéresser à la politique. Or, il n’est pas possible de s’y intéresser à partir de grands modèles dans son bureau car, contrairement à ce que pensent certains universitaires, celle-ci n’est pas une science mais un art. Et cet art est un grand art, qui appelle la morale et la métaphysique sur un espace délimité avec d’autres humains. Quand bien même cette cité est gouvernée par des ignorants, chacun doit donc participer en tâtonnant, en se trompant car la privation de connaissances est dans notre nature, en dialoguant dans le respect mutuel afin de trouver le meilleur possible pour la cité. Exactement le contraire de ce qui s’est passé lors de cette polémique sur les civilisations mais ce contraire ne ruine pas la nécessité de continuer car l’ignorance est contingente, le devoir de participer nécessaire.

Le rôle d’élu est d’une autre nature. Il n’est pas une nécessité. Il appelle des responsabilités, donc des devoirs plus que des droits, même si certains élus semblent l’oublier. Il appelle ceux qui préfèrent leur Cité à leur carrière et à leur pécule. Tout juste puis je suggérer qu’il nous faut un Président et une équipe soudée autour de valeurs fermes et d’un projet  audacieux qui bousculent les conservatismes pour redonner à la France sa place. Je crois que c’est plutôt là mon rôle, celui de philosophe conseillant ses amis depuis quelques années. Ce sera ma suggestion à ceux qui ont quelque ambition légitime dans l’UMP ou ailleurs.

Entretien de Marc Cohen avec Yves Roucaute, publié le 16 octobre 2013 dans Causeur

 

 

Discours sur les civilisations proposé à Claude Guéant

IMG_0780La bataille de France est celle de nos valeurs.

Discours Y. ROUCAUTE pour Cl. GUÉANT, intervention du 5/02/2012, U.N.I.

Madame et messieurs les ministres (….),

Merci de me donner l’occasion de m’exprimer ici sur ce qui me tient le plus à cœur, la France, ses valeurs et sa civilisation.

Car l’enjeu de cette élection présidentielle aujourd’hui ce n’est pas un homme, ce n’est pas un parti,  c’est la France elle-même.

Oui, au milieu de cette tempête sans précédent, nous sommes engagés, chers amis, chers compagnons, dans une nouvelle bataille de France. Et, comme hier derrière le général de Gaulle, aujourd’hui derrière Nicolas Sarkozy, nous la gagnerons.

Vous me recevez parmi vous dans une salle qui porte le nom prestigieux de Victor Hugo et j’y vois un symbole.

Victor Hugo, c’était le courage de défendre les idées universelles de l’humanisme chrétien, contre le laxisme et le relativisme.

Victor Hugo, c’était le choix de la justice sociale au lieu de la démagogie qui entraîne les nations à la ruine.

Victor Hugo, c’était la défense de la patrie contre son affaissement

Victor Hugo, c’était le choix de la république une et indivisible.

Et ce choix, ce courage, cette lucidité, cet amour de la patrie, chers amis, je sais que vous les portez en vous.

Et je sais aussi que ce n’est pas toujours facile dans les facultés, les écoles, les instituts, les centres de recherche  d’affronter les idéologies archaïques venues de la gauche socialiste et de ses alliés d’extrême-gauche.

Oui, il faut bien du courage et beaucoup de lucidité pour afficher bien haut nos couleurs et garder le cap pour notre pays.

Car c’est bien CE dont je veux vous parler: de la France et de son avenir.

Je veux vous parler de son socle éthique et des menaces qui pèsent sur lui.

Pour vous livrer le fond de ma pensée, je trouve que dans notre pays il n’est pas suffisamment question de la France, de ce qui a fait et fait encore sa grandeur.

Voyez nos voisins ! Les Britanniques, les Allemands, ils n’ont pas les mêmes pudeurs. Et je ne parle même pas des Américains qui adorent planter leur drapeau dans leur jardin…

Partout dans le monde, les nations parlent de leur passé, de leur culture, de l’avenir de leur mode de vie.

En France, une idéologie sournoise, venue de gauche, tente de nous culpabiliser sur notre histoire de 1500 ans, elle tente de nous culpabiliser quand nous défendons notre socle éthique et nos manières de vivre, elle tente de nous culpabiliser quand nous préparons les mesures pour que la France ait l’avenir qui convient à sa grandeur.

Devrions-nous avoir honte d’une histoire qui remonte à Clovis ?

Devrions-nous avoir honte d’avoir offert à la planète la première nation civique du monde, une nation fondée ni sur la race, ni sur le sang mais sur l’assimilation des valeurs communes ?

Car nous sommes une grande nation, présente sur les cinq océans,  dont la force tient à notre socle éthique, à nos valeurs universelles.

Et notre camp est précisément celui de la défense de ces valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité.

Devrions-nous avoir honte de la république qui tient le glaive avec le flambeau de la Liberté ?

Car « Il y a un pacte vingt fois séculaire entre la grandeur de la France et la liberté dans le monde » disait le général de Gaulle. Et c’est vrai.

Devrions-nous avoir honte de la république qui tient la balance avec l’Égalité, avec l’égalité des droits, l’égalité des chances, l’égal accès au savoir.

Devrions-nous avoir honte de la République qui étreint ses enfants dans la Fraternité : avec ses valeurs de« solidarité », de « civisme », de « patriotisme », de « justice sociale » et cette valeur de « laïcité », qui permet de « rendre à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu ».

Oui, nous sommes le peuple de la liberté, de l’égalité et de la fraternité.

Et loin d’avoir honte de notre passé, nous n’oublions pas que notre nation a ensemencé la planète de ces valeurs universelles.

Jusqu’à défendre l’indépendance des États-Unis, auxquels nous avons offert la statue de la liberté, notre symbole à nous.

Jusqu’à donner au monde, non pas une Déclaration d’Indépendance, à la manière des Nord-Américains qui pensaient d’abord à eux, mais une Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, adressée à tous les peuples de l’univers.

Et le Président Nicolas Sarkozy, rompant avec le cynisme de François Mitterrand,  a inscrit la France dans cette tradition en allant défendre la liberté partout dans le monde, jusqu’en Côte d’Ivoire, jusqu’en Lybie,

Quelle différence avec François Hollande qui a hésité sur tous les engagements, qui a tergiversé et tremblé, comme on l’a encore vu quand nos valeureux soldats de la liberté sont tombés en Afghanistan !

Oui, la France a besoin d’un capitaine qui tienne fermement le gouvernail dans les tempêtes et ne change pas de cap à la moindre brise.

Nous ne voulons pas d’un capitaine qui prend dans son équipage des Eva Joly, qui exigent la disparition de la Marseillaise, qui piétinent les fêtes du 14 juillet, qui nient notre héritage spirituel, qui dénigrent notre histoire et veulent affaiblir moralement notre pays.

Avec Nicolas Sarkozy, nous voulons toujours conserver ce fil bleu blanc rouge qui lie Vercingétorix par Jeanne d’Arc et Charles Martel, aux sans culottes, à Clémenceau et aux résistants français.

Mais, nos valeurs fondatrices ne seraient rien sans la responsabilité qui permet de les réaliser.

La liberté guide nos pas, mais nous ne pouvons accepter l’irresponsabilité, nous ne sommes pas un peuple faible, nous ne sommes pas une nation sans colonne vertébrale.

Si, parce que nous aimons la liberté, nous aimons aussi la tolérance, celle-ci connaît une limite : l’intolérance pour les mœurs, les coutumes et les cultes qui violent la dignité humaine.

Cela s’appelle la responsabilité.

La maison de France n’est pas une maison de tolérance.

La nation française n’est pas un agrégat d’individus, d’ethnies, de sectes.

Elle n’est pas un assemblage de groupes et de communautés, sans identité ni destin commun.

La maison de France n’est pas un self-service où chacun pourrait se servir  à sa convenance.

C’est pourquoi, alors que les socialistes et leurs alliés d’extrême-gauche développent une idéologie de l’excuse pour les délits et les crimes, nous défendons les victimes et punissons les coupables.

C’est pourquoi, alors que les socialistes distillent chaque jour le venin du prétendu « droit à la différence, nous combattons fermement le communautarisme.

C’est pourquoi, alors que les socialistes et leurs amis prônent le laxisme en matière d’immigration et veulent même donner le droit de vote aux étrangers, nous le refusons fermement et définitivement.

Contre eux, nous rappelons que si notre nation civique, une et indivisible est généreuse, elle ne peut survivre dans le laxisme.

Pas de liberté sans sécurité pour son exercice.

Pas d’égalité des droits sans égalité des devoirs.

Pas de fraternité sans obligations envers la république.

De là découlent des choix politiques clairs.

Les choix de la responsabilité.

Oui, nous sommes le camp de la sécurité.

Sans ordre républicain, la liberté est celle du renard dans le poulailler.

La liberté se confondrait avec le règne du plus fort.

Et, finalement, si nous laissons faire la force brutale, les gens honnêtes ne parviendraient plus à exercer leur liberté. Ils ne pourraient plus rechercher leur chemin du bonheur.

C’est pourquoi, nous affirmons que la défense de la liberté commence toujours nécessairement par la protection de la personne, ce fameux droit à la sécurité, parfois décrié par des démagogues inconscients.

Et c’est parce que l’on est libre de ses actes que celui qui attaque la sécurité d’une personne doit rendre des comptes.

Quand on viole les lois de la République, quand on s’affranchit des règles les plus élémentaires de la vie en société, quand on empêche le libre jeu de la liberté chez les autres, on doit en assumer toutes les conséquences.

Nous avons une conception opposée à cette idéologie socialiste qui attribue tout crime et tout délit à la lutte des classes ou à la responsabilité d’une société dirigée par des dominants.

Cette conception socialiste conduit  toujours à laisser se développer une insécurité générale.

Chers amis, avec le Président Nicolas Sarkozy, nous l’avons refusée.

Nous  avons renversé le mouvement.

Grâce à nous la république est de retour sur tout le territoire.

Sous le gouvernement Jospin, la délinquance générale avait augmenté de 17,76%. Depuis 2003, elle a spectaculairement baissé de 16,47%.

Et cela, alors que dans le même laps de temps, la population française s’est accrue, depuis 2002, de 3,2 millions de personnes.

500.000 victimes de moins, aujourd’hui,  qu’en 2002, ce n’est pas rien.

Et ce n’est qu’un début, le combat continuera  pour cette œuvre républicaine.

Car tel est bien le sens de l’action voulue par le Président, et tel est bien le sens de mon engagement pour l’avenir : que force reste à la loi, que la république protège ses enfants, que la France préserve ses valeurs.

Les socialistes ne sont pas simplement fautifs d’avoir laissé exploser les chiffres de la délinquance pendant qu’ils étaient au pouvoir.

Ils sont surtout responsables d’avoir fait prospérer la culture de l’excuse violant ainsi notre pacte républicain.

Ils sont responsables et coupables de laxisme.

Un laxisme qui a conduit à laisser faire laisser passer les incivilités, sous prétexte que ce n’était pas grave. Les sociologues socialistes appellent même cela des « micro-agressions ?

Nous appelons cela le viol du socle de nos valeurs civiques communes et le début d’une dynamique qui conduit au pire.

Nous disons que c’est inacceptable et que c’est là un grand chantier que nous avons commencé et que nous poursuivrons dans les cinq années à venir.

Car ne serait-ce pas grave de siffler une femme dans la rue, de ne pas laisser sa place à une personne âgée, de menacer des passants, de bousculer dans les transports en commun, de huer notre hymne, de piétiner notre drapeau ?

Ce laxisme socialiste a conduit à culpabiliser les détenteurs de l’autorité, de l’instituteur au policier, en passant par les juges sous prétexte que la délinquance serait due à une exclusion organisée par la société.

Et, à force de chercher des excuses aux actes les plus condamnables, ils ont laissé se développer une dynamique de destruction du socle de nos valeurs civiques, de la galanterie au bien vivre ensemble, et ils ont produit une idéologie relativiste qui a attaqué nos valeurs universelles.

Avec ce relativisme, des générations de gens fragiles, qui avaient mal assimilés nos valeurs, furent incapables de distinguer le Bien du Mal.

Et quand il n’y a plus d’interdiction, quand les repères disparaissent, quand la responsabilité personnelle disparaît, la République se meurt.

On voit même d’anciens ministres socialistes  prôner la dépénalisation du cannabis !

Dans quelle société veulent-ils faire grandir nos enfants ?

Dans une société où l’on ne signale même plus que la drogue est un danger pour la santé physique aussi bien que pour la santé mentale ?

Faut-il cacher que le cannabis est responsable de certains processus qui conduisent parfois à une paranoïa irréversible, chez un nombre heureusement restreint mais réel de personnes ? Faut-il ignorer qu’il produit toujours à un état de déconcentration, de perte de mémoire, de perte de maîtrise de soi ?

Faut-il cacher que les réseaux de la drogue et du crime sont les mêmes et qu’acheter du cannabis c’est alimenter la traite des êtres humains, les trafics d’organes, la prostitution ?

Au lieu de responsabiliser la jeunesse, les socialistes ont même développé, par souci politicien, une tactique de dénigrement systématique du Président, d’attaques outrancières, personnelles.

Rappelez-vous les odieuses campagnes socialistes qui nous donnaient même des leçons de morale pendant que leur candidat, Dominique Strauss-Kahn, un vrai candidat bling bling celui-là, batifolait dans les hôtels après avoir célébré au champagne sa vie dans les milieux de la finance ! Cela ne les gênait pas à l’époque la finance !

Mais si on peut même insulter un Président, comment pourrait-on respecter un policier, un instituteur, ses parents ?

Eh bien nous, nous disons non !

Nous, nous croyons à la responsabilité individuelle.

Ce n’est pas toujours la faute des autres, de la malchance, voire de la société qui serait seule coupable.

Nous appelons « coupable », le coupable et « victime », la victime.

Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas être capables de repérer des circonstances atténuantes, mais la générosité commence par aider et secourir les victimes et par punir les coupables.

La détermination du Gouvernement à lutter contre les voyous est et restera sans faille dans les cinq ans à venir.

Nous avons créé les peines planchers pour que les récidivistes d’infractions graves ne puissent pas s’en tirer avec des peines ridicules…

Nous avons multiplié les moyens de la Police scientifique, comme le fichier des empreintes génétiques, pour que les auteurs de crimes et de délits puissent être identifiés et déférés à la Justice.

Nous avons créé un régime de sûreté pour les grands prédateurs sexuels qui régulièrement plongent la France dans l’horreur et le cauchemar afin qu’ils ne retrouvent pas la liberté de leurs mouvements même lorsqu’ils ont effectué leur peine.

A chaque fois les socialistes ont été contre.

Aujourd’hui, ils ne trouvent rien de mieux que de nous promettre de revenir à la police de proximité, qui s’est traduite par une augmentation de 17% de la délinquance, quand ils l’ont mise en œuvre. Ils promettent même  de créer des emplois de policiers. Croient-ils que nos amis policiers ont  oublié qu’avec les 35 heures, les socialistes ont détruit davantage d’emplois qu’ils n’en promettent ? Croient-ils que nos policiers soient dupes et ne se sachent pas visés dans leur fonction de protection par les accusations socialistes de politique sécuritaire?

La police des patrouilleurs qui se met en place ce week-end c’est tout le contraire de la police de proximité, car c’est une police qui assume ses fonctions, et notamment sa fonction de répression qui n’est rien d’autre que la volonté d’interpeller les délinquants pour les mettre à la disposition de la Justice.

Une fonction qui consiste à protéger d’abord les plus faibles, la veuve et l’orphelin, car ce sont les plus faibles qui sont les premières victimes des bandes et des délinquants.

Car, chers amis, nous avons d’abord le souci de protéger les faibles.

Oui, car c’est nous qui sommes le camp de la justice sociale.

La solidarité et la justice sociale sont de belles idées que les socialistes et leurs alliés d’extrême-gauche ont dévoyées..

Nous leur avons redonné un sens, au nom de la fraternité.

D’un côté, nous refusons de laisser Gavroche tomber dans le ruisseau, d’un autre côté nous refusons  de lui faire croire qu’il s’en tirera avec les idéologies égalitaristes et démagogiques des socialistes.

Car rien n’est pire que de vendre des paradis qui se révèleront des cauchemars sociaux.

La justice sociale ne peut passer par la ruine du pays dont les plus faibles et les classes moyennes paieraient le prix.

Vous qui êtes les cadres de la France de demain, vous savez  combien est suicidaire les « y’a qu’à » socialistes, les «y’à qu’à   faire la chasse aux riches », le « toujours plus d’impôts », le « toujours plus d’Etat », et, finalement, le « toujours plus de dettes ».

Vous savez combien le programme du candidat Hollande, sous prétexte de mener la guerre à la finance va nous asservir demain à elle, parce que la France n’aura pas fait les réformes exigées par ses dettes, par la crise, par la concurrence internationale.

Comment croire sérieusement que François Hollande va pouvoir convoquer Angela Merkel et les chefs de gouvernements et d’Etat européens pour poser ses exigences ? Comment l’écouter, sans rire, quand il prétend qu’il va convoquer les Etats-Unis, la Russie et la Chine pour renégocier les accords internationaux et s’attaquer à la finance ? Même le coq le plus présomptueux doit finir par comprendre que ce n’est pas son chant qui fait se lever le soleil.

Notre conception de la justice sociale suit des chemins plus justes et plus lucides.

La solidarité, part d’une analyse concrète de situation concrète. Elle ne part pas de nos rêves.

Certes, nous aurions voulu faire plus et mieux.

Certes nous avons fait des erreurs.

Certes nous avons subi une crise d’une ampleur inégalée

Mais malgré la crise qui a empêché ou limité certains de nos projets, nul ne peut nous reprocher de n’avoir pas tenu le cap, de n’avoir pas commencé à mettre la France à l’heure des nouvelles technologies, de la nouvelle économie, de l’internationalisation des échanges,

Nul ne peut nous reprocher un manque de courage et de n’avoir pas engagé des réformes profondes et nécessaires pour que notre nation reste une grande nation.

François Hollande et ses alliés rouges-verts et rouge-rouge, qui se sont opposés à toute réforme, nous promettent de tout casser, de tout annuler.

Ces passéistes, ces réactionnaires, n’admettent même pas la justesse de la réforme des Universités et, encore moins celle des retraites.

Après avoir manipulé les jeunes durant les manifestations, leur faisant miroiter que leur retraite serait à 60 ans alors que leur espérance de vie sera de près de 100 ans, Ils veulent même revenir sur cette réforme des retraites.

De même, au lieu de continuer à dégraisser l’Etat, ils veulent le grossir encore.

Et ils veulent à nouveau créer des emplois artificiels pour les jeunes.

Ils n’ont rien compris, rien appris.

Ils en sont encore au XIXème siècle quand il faudrait qu’il se tournent vers le IIIème millénaire, comme le font d’ailleurs les autres partis socialistes d’Europe.

La justice sociale, c’est tout le contraire de l’irresponsabilité et de la course à la dette et à la ruine de notre pays.

C’est le contraire de l’assistanat généralisé et de la mise sous tutelle des individus.

La vraie justice sociale, celle que nous défendons  avec le Président de la République, repose sur une idée juste de la solidarité.

La justice exige de tendre la main à ceux qui sont dans le besoin.

Elle exige d’aider les personnes qui traversent une mauvaise passe pour leur remettre le pied à l’étrier.

La justice sociale est un effort des citoyens fait au nom de la fraternité, vers ceux qui souffrent.

Comment ces citoyens qui donnent pourraient-ils ne pas demander de contrepartie ?

La justice sociale vise à établir l’égalité des droits sociaux

Mais comment la république qui protège pourrait-elle ne pas exiger des devoirs ?

La justice sociale vise finalement à rétablir les conditions d’exercice de la liberté.

Comment pourrions-nous arriver à démettre les individus de leur responsabilité ?

La gauche nous dit que nous tenons un discours trop sévère quand nous exigeons des demandeurs d’emploi qu’ils ne refusent pas plus de trois offres de travail correspondant à leur niveau de formation pour pouvoir continuer à percevoir leurs indemnités.

Je réponds que c’est sévère mais juste.

C’est une marque de respect envers ces hommes et ces femmes qui cherchent un emploi.

Mais c’est aussi une marque de respect pour ceux qui se lèvent tôt qui travaillent dur, qui paient des cotisations et qui ressentent comme une véritable injustice que nous ne demandions pas avec suffisamment d’insistance à ceux que nous aidons de tout faire pour s’en sortir.

Nous vivons au sein de la même communauté. Nous devons tous faire, non pas les mêmes efforts, mais des efforts équivalents. Nous devons tous, chacun à notre niveau, prendre à notre compte une part du fardeau.

C’est cela aussi, liée à la justice sociale, la belle valeur de l’équité.

La solidarité ne peut être acceptée par tous, que si on ne demande pas toujours plus à ceux qui la supportent et toujours moins à ceux qui en bénéficient.

Ce n’est stigmatiser personne que de dire cela.

C’est du simple bon sens.

Avec cette conception, nous défendons les valeurs d’une république qui récompense l’œuvre de la liberté  par le travail, l’effort et le mérite.

Trois valeurs de la France.

Là où les socialistes veulent une société d’égalité, nous, nous voulons une société d’égalité des chances, c’est-à-dire donner leur chance à tous, mettre tout le monde en état de réussir.

Là où le socialistes prônent l’assistanat nous donnons les clefs de l’épanouissement et de la créativité personnelle.

Grâce à cette fermeté sur nos valeurs, notre gouvernement  a plus fait, depuis 2007, en matière de justice sociale que tous les gouvernements socialistes de la cinquième république.

Oui, notre bilan est bon.

Car la justice, c’est l’exonération de charges sociales sur les heures supplémentaires. C’est ainsi d’avoir permis à près de 5,5 millions de salariés de travailler plus pour gagner plus. Deux heures de plus par semaine pour un travailleur payé au SMIC c’est un treizième mois !

Et les socialistes veulent supprimer  cela !

La justice, c’est, pendant la crise, d’avoir réduit des 2/3 l’impôt sur le revenu des 6 millions de contribuables les plus modestes.

Et les socialistes augmenteront les impôts.

La justice, c’est d’avoir revalorisé les allocations familiales en fonction de l’inflation, et donc d’avoir permis aux familles de conserver leur pouvoir d’achat.

Et au lieu de poursuivre cette politique de soutien à la famille, qui est l’une des forces de la France dans le monde des pays développés touchés par une baisse démographique, les socialistes veulent la détruire !

Ils prétendent punir les naissances dans les familles des classes supérieures et moyennes et favoriser les familles modestes en supprimant l’avantage des parts familiales dans l’imposition.

Pour nous, la France n’a pas besoin de démagogie mais d’un soutien ferme à sa politique démographique.

Elle a besoin de tous ses enfants, quelle que soit leur origine sociale. Car un enfant est un enfant. Et on ne développera pas la démographie en freinant celle des classes moyennes et supérieures.

C’est sans doute cette incapacité à penser la famille qui explique leur incapacité à la défendre.

La famille est l’endroit où se fabrique la vie, et c’est bien elle que nous voulons protéger. Elle participe de l’équilibre naturel psychologique dont a besoin tout enfant pour se développer et faire ses propres choix de vie. Les divorces et les séparations le montrent : nous ne souffrons pas de trop de politique familiale et de défense de la famille, mais de pas assez.

La justice c’est encore d’avoir tenu nos engagements de revaloriser de 25% l’allocation adultes handicapés et le minimum vieillesse et cela même dans la crise.

Les socialistes qui sont dans un culte du jeunisme à tout va, n’y avaient même pas songé.

La justice c’est d’avoir instauré le service minimum dans les transports publics pour que les voyageurs ne soient plus pris en otage par une minorité.

Les socialistes sont contre.

La justice c’est d’avoir revalorisé le minimum vieillesse, les pensions de réversion pour les veuves et pour les retraités agricoles

La justice c’est d’avoir exonéré 95 % des familles des droits de succession.

La justice c’est la création des internats d’excellence qui permettent à des enfants doués mais dont l’environnement ne permet pas qu’ils puissent réussir,  d’entrer dans les plus prestigieuses de nos grandes écoles.

La justice c’est d’avoir doublé les dotations de péréquation pour les budgets des communes rurales.

La justice c’est de proposer le financement de la dépendance des personnes âgées.

La justice c’est d’avoir sauvé notre système de retraites qui était menacé de ne plus pouvoir payer les pensions.

La justice enfin, c’est de maîtriser les finances publiques pour que nous ne laissions pas à nos enfants le fardeau de payer à notre place nos dépenses.

A chaque fois, le socialistes se sont opposés à nous.

Vous le voyez, nous n’avons aucune leçon à recevoir en matière de justice sociale.

Vraiment, je vous le dis, il n’y a pas seulement de quoi être fier de notre bilan.

Oui, le parti de la justice sociale, c’est nous.

Mais nous sommes aussi le camp de la puissance de la France, celle qui exige une politique de l’immigration conforme à notre pacte républicain.

Pour les belles âmes socialistes, l’immigration, c’est le sujet tabou par excellence.

Cela parce qu’ils ont tenté de récolter des voix sur la détresse de certains clandestins en croyant nous mettre en difficulté sur cette question.

Mais aussi parce que certains ont une vision idéologique, communautariste et mondialiste de la France.

Comme c’est tabou, ils ont terrorisé intellectuellement ceux qui réclamaient une vraie politique de l’immigration et ils ont laissé s’installer les communautarismes.

La république exige plus de courage et une clarification sans appel.

Car l’immigration n’est pas la rencontre de deux individus, mais bel et bien de deux  cultures. Un étranger vient en effet toujours avec son bagage culturel. Nul ne peut lui en tenir rigueur.

La question est bien de savoir comment une nation qui reçoit doit agir, sans naïveté.

La question est bien de savoir comment elle doit recevoir, qui elle peut recevoir et jusqu’où elle peut recevoir.

Toutes les nations du monde se posent cette question.

Pour une nation comme la nôtre, fondée sur des valeurs et non sur le sang, la question des valeurs est plus importante encore.

Montesquieu disait que la vraie force des républiques est leur force morale, leur vertu, tandis que les tyrannies peuvent se satisfaire de régner par la force.

Refuser d’aborder la question des valeurs acceptables et inacceptables, des comportements acceptables ou inacceptables, c’est accepter de prendre un risque énorme. Celui de notre affaiblissement, de notre décadence, de notre perte.

Il ne s’agit donc pas de montrer des groupes humains du doigt, mais seulement d’agir dans le respect de la loi de la République, dans le sens de ses valeurs et, j’ose le dire, avec le souci de la puissance de la France.

Or, il y a des comportements, qui n’ont pas leur place dans notre pays, non pas parce qu’ils sont étrangers, mais parce que nous ne les jugeons pas conformes à notre vision du monde, à celle, en particulier de la dignité de la femme et de l’homme.

Contrairement à ce que dit l’idéologie relativiste de gauche, pour nous, toutes les civilisations ne se valent pas.

Celles qui défendent l’humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient.  Celles qui défendent la liberté, l’égalité et la fraternité nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique.

En tout état de cause, nous devons protéger notre belle civilisation.

Quand un époux interdit à sa femme de sortir de la maison, ou de prendre la parole sans son autorisation, quand un autre refuse de serrer la main d’un fonctionnaire qui se trouve être une femme, au motif qu’elle est une femme, quand, comme on l’a vu un temps à Lille chez Martine Aubry,  on donne aux islamistes des horaires réservés pour aller à la piscine, quand certains réclament, comme Eva Joly, des jours fériés pour chaque religion, je dis : nous ne pouvons accepter cela.

La République exige le respect des règles et valeurs communes.

En particulier, la République exige le respect de la laïcité.

Il est à cet égard curieux de voir  le candidat socialiste, François Hollande, menacer de mettre le feu à la France en remettant en chantier une laïcité parfaitement bien acceptée et comprise.

Et quand il prétend mettre cette laïcité dans la Constitution, comment n’être pas abasourdi ?

Car elle s’y trouve déjà. L’article 1 précise, sans ambiguïté : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. »

Mais peut-être a-t-il beaucoup à se faire pardonner et quelques voix à glaner en jouant aux matamores.

Car les socialistes n’avaient rien fait contre le voile intégral des femmes, c’est nous qui l’avons totalement interdit.

Car, pour nous, la dignité des femmes et la laïcité ne sont pas négociables, même contre quelques voix.

Les socialistes avaient laissé prêcher les islamistes dans les rues de Paris, c’est nous avons qui avons interdit ces rassemblements et rendu les rues à la liberté.

Et surtout, les socialistes avaient laissé se développer une immigration sans contrôle, sans aucune exigence éthique, au lieu de vérifier que ceux qui arrivaient sur notre sol étaient disposés à accepter nos valeurs et nos lois.

Oui, François hollande et ses amis ont beaucoup à se faire pardonner pour leur laxisme..

Ils ont même inventé pour les clandestins le terme de « sans papier», comme s’ils n’en avaient pas ! Seulement voilà, ils en avaient mais c’était ceux de leur pays d’origine. Et ils étaient sur notre sol en mentant, fraudant, en travaillant au noir.

Et l’on vit même socialistes manifester au nom des prétendus droits de ces clandestins à rester, à se faire soigner gratuitement  et à trouver prioritairement un logement  quand les travailleurs français mettent des mois voire des années pour trouver des logements sociaux pour eux ou leurs enfants !

Comment voulez-vous ensuite, quand ces clandestins furent régularisés en masse par les gouvernements laxistes, que ces mêmes gens aient acquis le respect de nos lois et de nos valeurs !

Pourquoi salueraient-ils le drapeau ou chanteraient-ils la Marseillaise quand ils ont pu narguer la police et violer les lois avec le soutien d’élus socialistes ?

Pourquoi iraient-ils, à la façon de nos immigrés venus naguère d’Arménie ou d’Italie, d’Afrique noire ou d’Asie, mourir pour notre pays quand ils sont entrés par un pied de nez à la nation?

A la demande du Président de la République, nous avons changé complètement de stratégie.

Nous en sommes revenus à la tradition de la République française.

Une tradition qui exige d’abord de n’accepter sur son sol que ceux qui sont d’accord avec nos valeurs.

Une tradition qui exige ensuite de pourchasser l’immigration illégale

Une tradition qui exige enfin de limiter l’immigration légale à nos besoins et à nos possibilités d’accueil.

Ainsi, nous avons rompu avec ce temps où nous devions vivre dans la mauvaise conscience, de « la France moisie », dans la repentance d’une histoire dont pourtant nous n’avions pas à rougir.

La France devait tout tolérer, tout accepter, parce qu’elle se sentait coupable… Coupable de tout ou presque : du sous-développement, de la faim dans le monde, de la pauvreté dans le Sud.

Nous n’avions plus le droit de nous montrer un tant soit peu fiers de notre passé, de notre histoire glorieuse, de notre civilisation humaniste.

C’est à cette époque que l’on s’est mis à rejeter la politique et le mot « d’assimilation ». On le jugeait trop dur. On s’est mis à parler de « droit à la différence ».

Ainsi, est-on arrivé à un paradoxe aberrant : alors que la République avait exigé des premières vagues d’immigrants venues d’Italie, de Pologne, d’Espagne ou du Portugal, l’assimilation pure et simple, nous avons baissé la garde.

Nous n’avons pas eu les mêmes exigences avec de nouveaux venus dont la culture et les modes vie étaient parfois très différents des nôtres. Des modes de vie où les notions les plus élémentaires, comme le respect du travail et du savoir, étaient mal connues. Ou des comportements pour nous évidents, comme la galanterie ou le respect des maîtres étaient inconnus.

Oui, subissant le laxisme, nous avons oublié qu’il n’y a qu’une seule règle possible pour qu’une nation civique reste forte : l’assimilation.

L’assimilation, j’insiste.

Je dis qu’un étranger qui est admis à vivre en France doit s’intégrer vraiment, c’est-à-dire admettre nos valeurs universelles, appliquer nos lois, s’adapter à notre règle de vie, respecter nos règles de civilité et parler le Français.

Et je dis que lorsqu’il souhaite s’établir durablement dans notre pays, surtout s’il ambitionne d’acquérir la nationalité française, il doit non seulement s’intégrer mais véritablement s’assimiler.

S’assimiler, c’est-à-dire non seulement admettre nos valeurs mais les épouser, sans réserve,  et épouser entièrement notre communauté de destin au point de se battre pour elle, s’il le faut.

Cette cohésion n’est pas la négation de l’histoire de chacun.

Elle ne remet pas en cause l’attachement que l’on peut avoir au pays de ses parents ou de ses ancêtres.

Elle est respectueuse des choix religieux, à condition que ceux-ci ne violent pas la dignité humaine.

Voilà pourquoi je n’ai pas hésité à renvoyer chez eux ceux qui prêchent la guerre sainte contre notre civilisation humaniste à partir des prisons ou des quartiers.

C’est dans le même esprit que j’ai annoncé la diminution de l’immigration légale dans notre pays.

Là encore, c’est du simple bon sens.

On ne peut pas continuer à faire entrer en France, chaque année, l’équivalent d’une ville comme Rennes (200 000 hab), et s’étonner de ce que tous ces nouveaux venus aient du mal à s’intégrer !

Les deux choses sont liées. Il faut que nous ayons la capacité d’intégrer les nouveaux arrivés.

C’est la condition de la préservation de rapports apaisés au sein de la communauté nationale et, plus largement, la condition de la préservation d’une bonne cohésion sociale.

Voilà pourquoi nous exigerons, à partir du 1er juillet que tout candidat à la naturalisation passe des tests pour vérifier qu’il connaît notre langue au lieu de se croire autoriser à parler une autre langue sur les marchés ou dans les écoles.

Pour vérifier qu’il connaît notre histoire et notre géographie au lieu de s’intéresser seulement aux droits qu’il pourrait obtenir.

Car, chers amis, je le dis avec force : pour nous, les frontières existent encore, les nations ne sont pas appelées à disparaître et si un invité est toujours un hôte de marque, il ne lui appartient pourtant pas de décider du menu.

Certes, je sais que ce que je dis n’est pas toujours facile à défendre.

Mais je sais, chers amis, que vous ne vous laissez pas intimider.

Rappelez-vous que ceux qui nous stigmatisent n’ont aucune leçon à nous donner.

Les socialistes vous traitent de « sécuritaires », voire de « fasciste »

Rappelez-vous que le fascisme est né dans le parti socialiste italien avec Benito Mussolini, le numéro 2 de ce parti et leur dirigeant le plus populaire

Rappelez-vous que nazisme signifie national-socialisme, que son drapeau était un drapeau rouge, et qu’il est né à l’extrême-gauche, avec Adolf Hitler, choisi même par les socialiste pour être ministre de l’information du gouvernement de Bavière pendant l’insurrection spartakiste. Adolf Hitler qui fit un pacte avec Staline, car qui se ressemble s’assemble.

Rappelez-vous qu’en France même le parti nazi fut créé par Jacques Doriot, le député communiste de Saint Denis et que le parti fasciste a été créé par Jacques Déat, député socialiste.

Oui, ne vous laissez pas faire quand vous êtes accusés de faire le jeu du populisme et des extrêmes par ceux qui s’acoquinent sans état d’âme avec l’extrême-gauche liberticide et qui, il y a un peu moins de 25 ans, ont fait rentrer 35 députés frontistes à l’Assemblée nationale !

Rappelez-vous que nous sommes les enfants du républicain Charles de Gaulle, qui résista aux sirènes extrémistes et tint toujours le cap de nos valeurs dans les pires tempêtes.

Ne vous laissez pas impressionner par les cris d’orfraie des socialistes alors que Barak Obama lui-même refuse de recevoir François Hollande dont il ne lui a pas été difficile de comprendre que ses propositions conduisent la France et l’Europe à la faillite tandis que ses alliances immorales le rendent otage de l’extrême-gauche.

Et puisque j’ai parlé allusivement du Front national, rappelez aux étudiants et à la jeunesse qu’il faut se méfier de tous les tours de prestidigitation. De ceux qui promettent aux Français monts et merveilles avec des idées simplistes.

Non, sortir de l’Europe ou de l’euro ne mènera nulle part, si ce n’est à la ruine de la France et à l’explosion du chômage !

Le vrai combat, responsable et fructueux est celui de la poursuite de la réforme des institutions européennes pour aboutir à une bonne gouvernance, respectueuse des nations.

Voyez ce que nous avons fait pour Schengen. Grâce à notre insistance, la libre circulation ne permettra plus demain l’arrivée incontrôlée d’une foule de clandestins.

Il ne faut pas détruire le système, et vivre au milieu des ruines, mais prendre son courage à deux mains et le réformer en profondeur, de l’intérieur.

Dîtes à la jeunesse de regarder les effets en Grèce et en Espagne des politiques démagogiques. Est-ce cela qu’ils veulent ? Le chaos et l’injustice sociale ?

Oui, chers amis, chers compagnons, vous êtes au premier rang de la bataille des idées, merci d’être là, merci de votre fidélité, merci d’aimer encore notre patrie.

Et c’est parce que je vois votre détermination, parce que je ressens votre enthousiasme, parce que je vois votre attachement à nos valeurs éternelles, que je vous le dis : nous allons gagner la bataille de France et nous fêterons ensemble  la victoire de notre Président, de Nicolas Sarkozy !

Yves ROUCAUTE

Guantanamo, (article dans le Figaro, en français)

Guantanamo : pour en terminer avec la propagande anti-américaine

Par Yves Roucaute, Professeur d’université Paris X Nanterre, agrégé de philosophie et de science politique

07 juin 2006

En pleine guerre mondiale contre le terrorisme, «l’affaire de Guantanamo» est grave. Au lieu de soutenir ceux qui sont en première ligne dans cette guerre d’un nouveau type, livrée par les forces barbares à toutes les civilisations, le poison de l’antiaméricanisme ruine le moral de nos nations.

La propagande antiaméricaine nous ordonne de tourner nos regards vers Cuba. Non pas le Cuba réel, celui de Castro qui, après avoir tué plus de 100 000 Cubains depuis un demi-siècle, domine par la terreur. Non pas les geôles infectes castristes où croupissent plusieurs milliers de prisonniers politiques (336 officiellement). Dans le programme touristique du politiquement correct : «Le goulag de notre temps» est américain, les plages de sable chaud castristes.

Guantanamo donc. La propagande y dénonce l’isolement et le secret, réclame l’intervention des tribunaux américains, invente des prisonniers détenus sans raison, imagine tortures et viol des droits individuels.

Isolement et éloignement ? Il ne faut pas chercher bien loin pour trouver des précédents qui n’ont jamais été contestés. Quand, le 22 juin 1940, Hitler lance une offensive aérienne sans précédent contre l’Angleterre, Winston Churchill obtient du gouvernement canadien la détention de 3 000 soldats allemands capturés par l’armée britannique, conduits dans le plus total des secrets dans des camps isolés du nord de l’Ontario et à Kananaskis dans les Rocheuses. Trois raisons : il évite de voir ces détenus revenir au combat en cas d’évasion, prohibe, à partir de la prison, le passage d’informations, et interdit la construction de réseaux nazis. Quand on voit la façon dont les réseaux islamistes se constituent aujourd’hui dans les prisons françaises ou britanniques, le choix de l’isolement ne répond-il pas à la nature de la guerre asymétrique menée par les réseaux terroristes disséminés dans le monde ?

Le secret ? Il permet d’obtenir des informations sans que l’ennemi ne s’en doute, ne sachant qui est pris, ni quand. Il permet des infiltrations, des substitutions de personnes, des dévoilements de complicités, des jeux de désinformation. Provisoire, ce type d’incarcération n’en demeure pas moins stratégique. Et il sauve des milliers de vies.

L’intervention des tribunaux ? Par quelle étrange vue tortueuse de l’esprit s’imposerait-elle nécessairement ? Comme dans toute guerre, l’enfermement de l’ennemi capturé ne vise pas d’abord à juger, mais à empêcher de combattre et à enquêter. Certes, après un certain temps, les informations sont obtenues et le secret de la capture est éventé. Quand cessent l’intérêt pour le renseignement et la possibilité de reprendre les armes, libération et renvoi dans le pays d’origine sont d’usage. C’est pourquoi les Américains libèrent peu à peu les détenus. En ce qui concerne les contestations actuelles, après la décision de la Cour suprême (juin 2004, affaire Rasul/Bush) et le Detainee Treatment Act de décembre 2005, le débat juridique se poursuit, mais nul être sensé ne peut espérer voir les détenus dangereux de Guantanamo gambader en liberté ou monter des réseaux dans des prisons ordinaires.

Les conditions de détention ? Les républiques ne sont pas sans obligations. Comme le montre Kant, elles se différencient à jamais des tyrannies en ce que toute violation de la dignité de l’homme y est punie. En l’oubliant, un soldat signe un double crime : il viole une loi naturelle et sabote les fondements moraux du pays. Laissons là les tartuffes qui feignent pour leur propagande de confondre exactions et règle. Les tribunaux américains répondent à ce souci moral : ils ont prononcé des sanctions à la suite des révélations d’Abou Ghraïb et non un discours de bienvenue au paradis d’Allah.

Mais où sont les preuves de torture de Guantanamo ? Le fameux rapport de la commission des droits de l’homme de l’ONU (février 2005) sur lequel s’appuient les antiaméricains, laisse pantois. Cette commission, qui comptait dans ses rangs la Chine communiste, le Cuba castriste, l’Arabie saoudite… avait trouvé inconvenante la méfiance des autorités militaires qui acceptaient leur venue mais ne voulaient pas les laisser interroger les détenus. En conséquence, elle a refusé de mettre un pied dans le camp et a établi son rapport grâce notamment aux témoignages des… prisonniers islamistes libérés.

Dernier avatar de la propagande ? Un médiocre «documentaire-fiction», The Road to Guantanamo, ours d’or au Festival de Berlin, aux ficelles si grosses qu’elles font regretter Sergeï Eisenstein et Léni Riefenstahl. N’y avait-il vraiment aucune raison de suspecter les trois héros du film, détenus à Guantanamo ? Doit-on prendre pour argent comptant leurs assertions quant aux tortures subies dont il ne subsiste aucune marque ? Victimes de la malchance, ils seraient partis au Pakistan pour un mariage à Karachi, lieu de rendez-vous des islamistes du monde entier en partance pour l’Afghanistan. Puis, ils se rendent 1 200 kilomètres plus loin à Kandahar, centre de commandement d’al-Qaida, lieu de rendez-vous de la filière pakistanaise. Ils musardent jusqu’à Kaboul, où de nombreux renforts talibans arrivent avec eux. Intervention alliée oblige, nos flâneurs se retrouvent ensuite à la frontière pakistanaise où se sont repliés les islamistes. Poursuivis par la malchance, ils sont arrêtés par l’Alliance du Nord, avec des talibans armés, qui les remet aux autorités américaines.

L’antiaméricanisme apparaît chaque jour davantage comme le nouvel opium du peuple. Le coeur d’un monde sans âme d’où la moralité est exclue, le repère fantasque des consciences perdues par la chute du mur de Berlin. Si la vraie force des républiques réside dans la vertu, comme le montra Montesquieu, la vertu se mesure au courage de se battre pour elles. Guantanamo, c’est ce courage.

* Professeur d’université Paris-X Nanterre, agrégé de philosophie et de science politique, auteur de Le néo-conservatisme est un humanisme (PUF)

 

Guantanamo Bay ‘Represents the Courage of the West’

 

Guantanamo Bay ‘Represents the Courage of the West’

By Yves Roucaute*

Le Figaro, France

Translated By Sandrine Ageorges

June 7, 2006
France – Le Figaro – Original Article (French)

 

In the midst of a global war against terrorism, the « Guantanamo affair » is a serious issue. But rather than support those on the front lines of this new kind of war, being waged by barbaric forces against all of civilization, the poison of anti-Americanism is ruining the morale of our nations [Europe].

The prevalent anti-American propaganda orders us to turn our gaze toward Cuba. Not the actual Cuba, Castro’s Cuba – who after having murdered over 100,000 Cubans over a half century, now rules through terror. Not Castro’s infamous prisons, where several thousand political prisoners rot away (the officially number is 336). In the scenic program of the politically correct: « the gulag of our times » is American, and Castro’s Cuba consists of warm sandy beaches.

Thus we return to Guantanamo. The propaganda denounces isolation and secrecy, calls for the intervention of U.S. courts, invents prisoners hold without being charged, imagines torture and violations of civil rights.

Isolated and beyond reach? One doesn’t need to look too far to find similar precedents that went unchallenged. When on June 22, 1940 Hitler launched an unprecedented air strike against England, Winston Churchill obtained from the Canadian government permission to detain 3000 German soldiers, captured by the British army, in absolute secrecy – at isolated camps at Kannanaskis, North of Ontario in the Canadian Rockies. Churchill gave three reasons: he avoided the chance that the detainees would return to the fight in the event they escaped; he prevented the passage of information from the prison; and he prohibited the development of networks of Nazis. When we look at the way Islamist networks are developing behind bars in France and England, doesn’t the option of isolation seem like a natural response to the asymmetric war being fought by terrorist networks spreading throughout the world?

Secrecy? This makes it possible to obtain information without the enemy suspecting it, and not knowing who has been captured or when. It allows for infiltrations, the substitution of individuals, reveals complicit individuals, and the implantation of disinformation. As a temporary measure, this type of confinement strategically useful. And it saves thousands of lives.

The intervention of the courts? Through which tortuous twist of the mind would this be necessary? As during every war, the confinement of a captured enemy is not to seek legal judgment, but to stop the fighting and investigate. Admittedly, after a certain period of time, the information is obtained and the secret detention is revealed. When interest in gathering information subsides and the possibility of a return to battle ceases, release and extradition to the home country is standard procedure. As for the current protests, after the Supreme Court decision (June 2004 in Rasul vs Bush) and the Detainee Treatment Act of December 2005, the legal debate goes on, but no one wants to see these dangerous prisoners from Guantanamo running lose or setting up networks within ordinary prisons.

Conditions of incarceration? Republics are not without obligation here. As Kant stated, because violations of human dignity are punished, Republics differentiate themselves from any form of tyranny. When forgetting this principle, a soldier commits two crimes: he violates natural law and destroys the founding principles of his country. Let’s leave aside those sanctimonious hypocrites who confuse penalties and rules for the sake of their own propaganda. The U.S. courts have fulfilled their moral purpose: after information on Abu Ghraib was released, they ordered punishments rather than a Welcome to Allah’s Paradise speech [execution].

But where is the proof of torture at Guantanamo? The famous report from the U.N. Human Rights Commission (February 2005) used by the anti-Americans leaves one speechless. This commission, whose members counted communist China, Castro’s Cuba, Saudi Arabia … found improper and suspicious that military authorities had permitted them to visit, but would not allow them to meet with detainees. Consequently, the commission refused to set foot in the camp and wrote its report based in part on testimonies of … freed Islamist detainees.

The last propagandist misadventure? A mediocre « documentary-fiction » film, The Road to Guantanamo, which won the Silver Bear at the Berlin Film Festival, with such thick strings that one only regrets Sergei Eisenstein [Communist film maker and Leni Riefenstahl aren’t alive to see it. Is it true that there is no good reason to suspect the three heroes, who have been detained at Guantanamo? Should we take for granted their assertions that they were tortured, even when no evidence remains?

Victims of bad luck, they supposedly went to a wedding in Karachi, Pakistan, the meeting point for Islamists from around the world on their way to Afghanistan. Then they moved 1200km further down the road to Kandahar, headquarters of Al-Qaeda and meeting point of the Pakistani network. They then made their way to Kabul, where many Taliban reinforcements arrived with them. Due to coalition action there, our strollers found themselves on the Pakistani border to where the Islamists had withdrawn. With never-ending bad luck following them, they are then arrested by the Northern Alliance in the company of armed Taliban, who handed them over happily to U.S. authorities.

With every passing day, anti-Americanism looks more like the opium of the people. The heart of a soulless world from which morality is excluded, the odd reference point for a consciousness lost after the fall of the Berlin wall. If the true power of a Republic resides in its virtue, as Montesquieu once stated, the extent of this virtue can only be measured by the courage to fight for it. Guantanamo represents this courage.

* University Professor in philosophy and political science, Paris-X Nanterre, and is author of « Neoconservatism is Humanism » [Le néo-conservatisme est un humanisme](Published by PUF)